2 oct. 2024

Révision de la Constitution?

Le débat est désormais ouvert. Faudrait-il changer ou réviser la Constitution? Tout le monde se croit en droit de répondre à cette question. Le politique, le politicien, le fonctionnaire, le juriste, le constitutionaliste, l'église, la société civile, pourquoi Monsieur tout le monde. Bref, la question touche à toutes les couches de la population. Les commentaires vont dans tous les sens. Les tenants du pouvoir trouvent l'ancienne constitution obsolète, inadéquate et caduque pour faire face aux exigences de la vie politique actuelle. Les opposants y dénoncent une démarche du président pour se maintenir au pouvoir au-delà des échéances constitutionnelles. Les neutres, et il y en a, tergiversent et affirment une position allant tantôt dans un sens tant dans l'autre. Il y a mon cousin Prof Placide Mabaka qui justifie la révision par le fait qu'elle soit congolaise à 100%, la dernière ayant été conçue à l'étranger par des étrangers. Dans son ouvrage Une nouvelle constitution pour un Congo restauré, il propose même de changer le nom du pays en Kongo di Kimbangu. Aussi surprenant que cela puisse être, mon ami Nestor Kiala d'heureuse mémoire proposait déjà en 1972 que le pays soit appelé Nzadi plutôt que Zaïre, et les habitants Nzadibois. Comme quoi à chacun son originalité.

A la question de savoir pourquoi cet empressement qui cache des agendas cachés, l'unanimité est encore plus difficile à atteindre. Pourquoi cette révision devient-elle urgente alors qu'il y a des priorités de sécurité et d'intégrité territoriales qui exigent des réponses immédiates? Pourquoi cette révision alors que la RDC est en guerre? Les opinions divergent comme pour la pertinence de la révision. Intoxication, manipulation, agendas cachés, perénisation du régime en place. Mr Joseph Kabila qu'on traite de pacificateur alors qu'il a pourfendu les résultats des élections et de facilitateur du passage de pouvoir entre un président sortant et un président entrant, n'a pas échappé à cette tentation de tripatouiller la Constitution. Des marches mémorables ont été organisées pour le contrecarrer. La même intention est prêtée à Mr Félix-Antoine Tshisekedi d'aller au-delà de deux mandats afin qu'il réalise sa vision. Chacun y va donc avec ses arguments et ses moyens. Le président actuel en a les moyens, au vu de la majorité absolue dont il dispose au parlement et au sénat actuels, hauts lieux de tous les mécanismes de la gestion du pouvoir. Leur configuration avec les gardes-fous - les anciens présidents présents dans l'organe organisateur - obéirait déjà, selon certains analystes, à cette logique de la continuation du régime actuel et du changement de la Constitution. Il s'agira concrètement de changer le mode de scrutin, passer du suffrage populaire direct au suffrage parlementaire, de modifier le nombre et la longueur de mandats présidentiels. Tout cela pour consolider les acquis de la démocratie. 

Lorsqu'on parle de démocratie, mes positions sont connues; je ne suis plus les Africains. Pour moi, c'est un concept qui dans sa conception et son application convient et appartient à ses propriétaires, les Hélènes. C'est un couteau à doubles tranchants car, au nom de cette même démocratie et des droits de l'homme, les puissances occidentales s'arrangent pour diriger le monde en installant et démontant les dirigeants du Tiers-Monde. Les cas de Kadhafi, Sadham Hussein sont bien connus, où des étrangers sont allés déstabiliser et déchoir des dirigeants jugés dictateurs légitimement élus par leurs peuples. Peut-on dire que la démocratie est présentement installée en Irak et en Libye? Concevons en conséquence nos propres modèles de pouvoir et de gestion républicaine, adaptés à nos traditions, à nos us et coutumes, et à nos besoins. Les schémas occidentaux, que nous imitons et maîtrisons mal, nous apportent en réalité plus des problèmes que des solutions. Des troubles interethniques, guerres et rébellions tribales surviennent souvent avant, pendant et après les élections dont les résultats sont presque toujours contestés. L'accord unanime ne sera jamais obtenu, et le pouvoir en place jouera le tout pour le tout. C'est que la notion même de démocratie n'a jamais été assimilée par les peuples du Tiers-Monde. 

La révision de la constitution ne constitue pas à mes yeux une priorité en RDC sauf peut-être pour les tenants du pouvoir et les pêcheurs en eaux troubles. La vie peut bien se vivre sans changer la constitution. Les défenseurs de la réforme y tiennent mordicus, parfois en termes de laisser leurs empreintes dans l'histoire du pays. Cela sonnerait bien de voir son nom inscrit dans les annales historiques du pays. Qu'à cela ne tienne, la pacification de l'Est et de l'Ouest, la sécurité des personnes et des biens, le fonctionnement efficace des institutions républicaines, le paiement régulier des salaires et leur ajustement aux conditions actuelles de vie, la justice équitable pour tous les citoyens, l'assainissement des centres hospitaliers et sanitaires, la lutte contre la malaria et les maladies endémiques, l'amélioration de l'éducation et du milieu scolaire à tous les niveaux, l'éradication de la pauvreté et l'instauration des valeurs saines humaines, voilà ce qui est prioritaire à mes yeux. Le reste, c'est de la politique. Politica, politica, mani pulite! 

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