3 mars 2020

Semaines de malheurs

Les deux dernières semaines ont été terribles pour moi, tristes, éprouvantes et pleines d'émotions. Quoi de plus terrible que de perdre un beau-frère? Par dessus-tout le premier à avoir honoré mes parents en épousant ma sœur la plus proche dont je peux dire que je suis le jumeau. Je me souviens encore de l'époque où Béa et moi n'étions que deux. Il y a très très très très longtemps. La voilà aujourd'hui triplement grand-mère et veuve, seule et égarée devant la fatalité de l'existence et l'impitoyable regard du monde. Quoi de plus triste que de perdre un cousin dont on n'a pas longtemps apprécié l'amitié et la grandeur? Oui, Me Nzundu empoisonné et abandonné à son triste sort s'en est allé dans une précarité qui a soulevé ma révolte et mon indignation. Avec un ami on s'est interrogé sur le sort des intellectuels alors que les caciques du régime et complices pillent impunément les ressources du pays. Éprouvant que de gérer en son intimité des proches parents défunts quoique l'un ait vécu loin de l'autre. On en arrive au point où on ne sait plus tourner la tête tellement l'épouvante émotionnelle vous guette à travers les gestes et pensées. Les émotions partagées dépassent la ligne du supportable, on vit comme si on ne vivait plus. "Chacun gère ses malheurs à sa façon", me dit ma fleur inspiratrice. 
La mort vous met à l'épreuve de la vie. Elle vous interroge sur le nécessaire, le contingent et l'essentiel. Elle remet en cause toutes les aspirations matérielles et spirituelles. Elle vous met en face de ce qui compte vraiment. Elle étreint votre conscience sur la raison d'être des biens, des richesses, de la puissance et de l'amour puisque tôt ou tard ce que l'on a construit patiemment finit par se révéler caduc et inutile. Le semblant a tellement pris la part importante de nos préoccupations que nous sommes confondus devant l'inanité de nos prétentions et options futiles et insensées. La tombe est le destin du corps, encore faudra-t-il que le corps soit retrouvé entier ou en lambeaux, en poussières, en cendres ou en un état de total délabrement nauséabond. 
Des semaines d'intense tension intérieure dont je me dépouillerais volontiers comme d'une exécrable puanteur. Des semaines à oublier et à ranger parmi les pires de sa vie. Ces semaines-là sont nombreuses, plus déroutantes et déconcertantes qu'on ne le croit. Comment ne pas s'ébranler psychologiquement devant de telles déconvenues? Je n'irais pas jusqu'à dire que cela n'arrive qu'à moi car je fais partie d'une humanité, d'un réseau de relations et d'une famille qui souffle le vent et le froid, la pauvreté et la misère spirituelles, la joie et la peine. C'est dans la solidarité et le partage commun de ces événements heureux ou malheureux que survient la qualité de la vie. Semaines de malheurs à ranger au placard funéraire de mon coeur et de ma mémoire!

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