28 mai 2016

Le plus chanceux, le Real, a gagné

Je n'ai suivi le match Real vs Atletico que pendant les 43 premières minutes. Et pour cause? Mon téléviseur n'a plus diffusé les images du match. L'écran s'est arrêté net sur une seule image. Tous mes efforts pour le remettre en marche n'ont rien changé. J'ai alors dû me contenter de suivre la suite à la radio. Ensuite, j'ai décidé de conduire les jumeaux à la plage de Folkstone, à 8-10 minutes de la maison. Là, j'oublié... ou plutôt j'ai nagé avec Claver jusqu'à un tremplin placé à plus de 100 m de la côte. Mon espoir de voir Atletico égaliser s'est accompli. C'est finalement les tirs aux buts qui ont fait la différence. Pour moi, Real chanceux et réaliste a gagné en tirant au sort. Félicitations tout de même à La Maison Blanche. Honneur à Simeone et sa brave équipe.

Finale 2016: Real vs Atletico

Aujourd'hui dans quelques heures aura lieu la finale de la Ligue des Champions entre deux équipes d'une même ville. Un véritable derby madrilène avant d'être espagnol. Ces deux équipes se rencontrent pour la enième fois: elles se connaissent bien. C'est des voisins, mais des frères ennemis. Le classico est certes plus passionné, mais n'empêche que deux équipes d'une même ville disputant une finale européenne, c'est un événement qui touche aux entrailles pulsives et vitales de la ville sportive. Honneur à la ville qui trône majestueusement sur le piedestal du footbal européen.
Difficile de formuler un pronostic qui tienne debout dans ces circonstances. Atletico voudrait inscrire son nom au palmarès des champions alors que Real qui a célébré sa decima contre Atletico en voudrait une autre. L'aura du Real lui accorde un avantage psychologique considérable, n'empêche que les Colchoneros se surmotivent pour abattre le phoenix, meilleur club du siècle dernier. Si la machine du Real fonctionne à son meilleur niveau, elle sera irrésistible et pourra gagner la finale. Mais de l'autre côté, on ne l'entend pas de cette oreille. Chaque équipe a des chances égales de réussite. D'autre part, l'attaque de l'Atletico tourne parfaitement bien. Toute équipe peut battre une autre.
En principe, je serais heureux de voir Atletico gagner le match pour la simple raison que ce sera une première. Mais ce ne sera pas facile, alors pas du tout facile.

26 mai 2016

Lu pour vous: Drums on the Night Air de Veronica Cecil

En mars 2016, j'ai reçu de Mme Schmitt un exemplaire de Drums on the Night Air - A Woman's Flight from Africa's Heart of Darkness de Veronica Cecil, paru chez Constable and Robinson Ltd, London, en 2011. Auparavant, elle m'avait envoyé un exemplaire de Heart of Darkness de Joseph Conrad. Mais n'ayant pas lu le premier livre à temps, j'ai décidé d'inverser le temps en commençant par l'ouvrage le plus récent, comme je connais déjà Heart of Darkness depuis des années. Et même encore, le second livre me paraît de loin plus proche de moi que le premier. Ce sont des événements que j'ai vécus dans ma tendre jeunesse. J'ai subi l'inquiétude, l'angoisse et la terreur que répandaient les rébelles dans le pays.
1. Littérature de témoignage. Les deux ouvrages ont en commun la caractéristique historique. Ils rapportent des faits vécus, avec des noms de personnes et de lieux repérables, avec des références culturelles identifiables. Ce ne sont donc pas des fictions. Ils rendent compte d'une aventure de voyage et de séjour dans un pays non civilisé, voire primitif, qui est brutalement exposé à l'exploitation capitaliste européenne. Le premier révèle le Congo de Léopold II tandis que le second traite de la période immédiatement après l'indépendance qui est marquée par des rébellions et sécessions. Dans l'intervalle de moins d'un siècle, un jeune homme et une jeune femme se sont rendus dans cette jungle, relatent des événements qu'ils ont vécus dans des conditions similaires mais des contextes historiques différents.
2. Une femme blanche au pays des Noirs. Veronica a déjà un enfant Charles lorsqu'elle rejoint son mari David Cecil à Léopoldville où il est affecté comme comptable dans une société d'exploitation agricole. L'occasion est propice pour cette femme anglaise née en Inde qui a séjourné en Afrique du Sud au temps de l'apartheid. Femme singulière et attentive aux phénomènes sociaux, elle y vient avec un désir de contribuer à la construction de la République démocratique du Congo qu'elle décrit métaphoriquement comme "an emerging butterfly," un papillon émergeant de son cocon. Son court séjour à Léopoldville n'impressionne pas vu qu'elle est coincée dans un club uniquement fréquenté par des étrangers blancs. C'est plutôt à la plantation d'Elisabetha sur le fleuve Congo, en aval de Stanleyville, qu'elle trouve le lieu de ses rêves. Elle décrit avec un regard attentif la vie des expatriés cadres de la plantation; elle aborde les intrigues et les rumeurs avec une certaine critique; elle observe également les moeurs des autochtones tout en relevant les  différences insolites dans les rapports humains. Elle est particulièrement fasciné par Nicholas, son factotum, qu'elle apprécie et qui lui rend des services impayables. Très sensible à la question raciale, elle compare ses expériences des Indes, d'Afrique du Sud et d'Angleterre. La colonisation belge, remarque-t-elle, ne s'est occupée que d'exploiter les riches ressources du Congo sans se soucier du bien-être des indigènes. La voilà catapultée du côté des oppresseurs par la force de l'histoire.
3.  L'odyssée de la rébellion. Pendant tout le temps que Veronica passe à Elisabetha, elle se prépare à accoucher à la maternité tenue par des religieuses catholiques. La grossesse arrive à terme et l'enfant est attendu incessamment. Le Congo indépendant est miné par de cruelles rébellions et des sécessions au Kwilu, au Katanga et au Kivu. Mr. Fontaine, le patron de la plantation, rassure ses collaborateurs expatriés sur leur sécurité; il compte sur les Nations Unies et l'armée congolaise pour remettre de l'ordre dans les terrains incontrôlés. Mais les nouvelles qui tombent ne sont pas bonnes: ni l'armée ni l'ONU ne réussissent à empêcher l'avancée des rebelles sur des vastes territoires. C'est le chaos total. Massacres des étrangers, exécutions sommaires, pillages dévastateur, égorgements des victimes, viols massifs, tortures extrêmes, insécurité totale. La chute de Stanleyville provoque tout de suite une évacuation aéroportée d'envergure des expatriés de tous les coins du Congo vers Léopoldville. Une panique s'empare des étrangers Blancs colons et missionnaires contre lesquels s'érige une chasse criminelle. Fontaine décide de mettre en sécurité les femmes et les enfants. Alors que le comptable David est tenu de rester, Veronica enceinte et Charles figurent parmi les premiers à être évacués par vedette puis par avion. Des conditions très difficiles de voyage et dignes d'une odyssée. En dépit des grands risques forcés par la fuite, Veronica arrive finalement à Léopoldville et donne naissance à une jolie fillette nommée Jessica.
4. Au coeur des ténèbres. Dans la fuite précipitée, les cadres noirs de la compagnie, ghanaïens et congolais, sont abandonnés à eux-mêmes lorsque la décision est prise de quitter Elisabetha. Dieu seul sait quel sort les Simbas leur ont réservé. Quelle injustice! Pour Veronica, le retour à Londres via Teheran constitue un point de non retour: cette douloureuse expérience du Congo a laissé de sérieuses séquelles dans sa vie:
"On leaving the Congo, I entered my own heart of darkness. Nowadays it would probably be classified as "post-traumatic stress syndrome. I had become allergic to civilization" (274) (En quittant le Congo, je suis entré dans mon coeur des ténèbres. Aujourd'hui, cela pourrait être classé comme un "syndrome post-traumatique". J'étais devenue allergique à la civilisation."
Cette femme qui voulait participer à la construction de la Nouvelle Afrique en apportant sa pierre, a été déçue et désillusionnée par la réalité. Atypique, critique et éclairée, Veronica a vu s'effondre devant ses yeux toutes les valeurs auxquelles elle avait toujours cru. L'indicible, l'impensable, l'inhumain ont pris la place du coeur de l'homme.  

20 mai 2016

Abbé Laurent May Muke in memoriam

19 mai 2016, c'est le jour que le Seigneur a choisi pour rappeler à sa maison l'abbé Laurent May, prêtre du diocèse d'Idiofa. Que son âme repose en paix! C'est d'abord par un email de l'abbé Michel Ngob que j'ai appris la mort du serviteur de Dieu. J'en ai ensuite reçu confirmation sur le blog d'Idiofa. La nouvelle était attendue pour certaines personnes, mais elle est quand même tombée comme un coup de tonnerre. Un ami commun m'a soufflé qu'il avait des problèmes de santé. Je le savais missionnaire à Asti; je lui avais même écrit un email demeuré sans suite.
Je ne saurais pas dire avec exactitude de quand date ma première rencontre avec l'abbé May. Par contre, j'ai pris connaissance de ses compositions musicales avant même que j'entre au grand séminarire. A l'époque, son nom cotoyait ceux des abbés musiciens Lufwael, Yakim ou Binia. Je l'ai cependant mieux connu du temps où je travaillais à l'évêché de Kenge et qu'il était coordinateur régional des écoles conventionnées catholiques de Bandundu. Il avait remplacé l'abbé Louis Nzala, muté à la conférence épiscopale.
A ce titre, il venait souvent à Kenge dans le cadre de son travail. J'ai découvert en lui un aîné très patient, toujours à l'écoute de ses interlocuteurs, et aussi très fin dans son langage. Homme de terrain, il savait gérer des dossiers difficiles avec une adresse remarquable. Je me souviens particulièrement d'un événement très sérieux qui a eu lieu à Kenge, en 1987. Un désaccord avait surgi entre le gouverneur Mananga ma Mpolo et l'évêque M'Sanda à propos de la gestion du personnel et de la mutation des enseignants. Un préfet muté de Bandundu par la coordination diocésaine avait été réhabilité par le gouverneur. La situation était très tendue; et on avait frôlé l'impasse. L'abbé May a usé de sa sagesse et de son sens de négociation pour ramener tour à tour l'évêque et le gouverneur à la table du dialogue. Témoin privilégié, je suis resté admiratif devant le calme et la fermeté dont avait fait preuve l'abbé Laurent en face de ces deux "juristes" contradictoirement attachés à la loi.
Au niveau personnel, c'est plutôt l'abbé Modeste Kisambu qui lui était le plus proche. Lors de mes passages à St Hippolyte, je ne manquais pas de bénéficier de ses conseils et de son amabilité. Merci Mbuta pour tant d'affabilité! Je n'ai plus eu de contact avec lui, mais j'étais informé de ses responsabilités au niveau de la coordination nationale et de son diocèse.
L'abbé Laurent May a servi l'église, et plus particulièrement la jeunesse, son diocèse, notre pays avec une constance et un zèle exemplaires. Missionnaire fidei donum en Italie, il est allé semer la parole de Dieu dans la vieille Europe. Que Dieu, dans sa grande miséricorde, l'accueille dans sa demeure céleste.
Au diocèse d'Idiofa et à sa famille biologique, à ceux et celles qui pleurent l'abbé Laurent en ce jour, à la jeunesse qu'il a servie sans rien attendre en retour, j'exprime mes sincères condoléances. Moyo na yandi kuvunda na ngemba!

19 mai 2016

La domination espagnole sur le football européen

La victoire hier de Séville sur Liverpool (3-1) en finale de l'UEFA confirme incontestablement la bonne santé du football espagnol. Avec Barcelone, Real et Atletico, Séville domine la scène européenne des clubs toutes associations confondues. Il faut l'avouer, au vu des résultats, La Liga est le meilleur championnat de clubs en Europe au cours de ces dernières années. Quel autre pays peut présenter ce monopole sur le plan européen? En Angleterre, c'est surtout l'argent. Les clubs - Manchester United, Manchester City, Arsenal ou Chelsea - ne sont forts que localement et financièrement. Très rarement, ils atteignent les demi-finales des coupes européennes. En Allemagne, il n'y a en fait que le Bayern que suit très timidement le Borussia Dortmund. L'Italie aligne la Juve, l'AC Milan et l'Inter, ces deux dernières étant en crise. En France, le PSG peine à atteindre les sommets de la scène européenne, en se faisant éliminer en quarts ou en demi. Bref, les clubs espagnols dominent. On devra de plus en plus s'attendre ou s'habituer à des finales européennes les opposants entre eux.
Il y a un génie propre à ce pays qu'il ne faudrait pas sous-estimer. Comment par exemple justifier l'échec de Pep Guardiola au  Bayern de Munich sinon par une incapacité à gérer les "sensibilités" culturelles de la Bavière? Je regrette de l'avouer: c'était une très mauvaise d'imposer le jeu de Barcelone à une équipe aussi légendaire que le Bayern. D'autre part, avait-il le choix? On ne peut donner que ce qu'on possède. On ne peut transmettre que ce qu'on sait. Atletico qui connaît bien ce jeu a réussi à éliminer le Bayern à deux reprises. De la même façon que Trappatoni avait échoué, Guardiola a échoué. Une mentalité ne s'impose pas. Les Latins ont du mal à s'accommoder de la rigueur anglo-saxonne ou slave. Ce n'est pas le cas de Jupp Heynckes ou Otmar Hitzfeld, tous deux issus de cette tradition culturelle. J'ose prédire que Guardiola échouera à Manchester City s'il tient à imposer le système Barcelone à des Anglais férus du jeu physique et des balles arrêtées. La circulation des entraîneurs est une très bonne migration professionnelle, mais elle n'évolue pas forcément dans le bon sens. On voit Van Gaal peiner à Man U, alors qu'il appartient à l'école du football total néerlandais. Avec le talent et l'expérience professionnelle qu'on lui reconnaît, le Hollandais aurait sans aucun fait un meilleur coach de Barcelone ou d'Ajax que là où il se trouve. Il en est aussi ainsi des joueurs, brillants dans un championnat et incapables d'offrir les mêmes prouesses dans le championnat où le mercato les parachute. Et un bon entraîneur sait gérer ces types de situations.
Considérons une équipe comme Séville. L'entraîneur Unai Emery y a passé trois saisons, et y a gagné trois coupes de l'UEFA. Un bilan extraordinaire! Dites-moi qui est le meilleur entraîneur? Aucun entraîneur n'a aligné ces dernières années autant de victoires en finales européennes. Il y a donc de quoi réfléchir au développement du football européen. Respect et chapeau à Séville!
Pendant que j'écris ces lignes, une question me vient à l'esprit: "Claver, tu habites aux Antilles, tu parles du foot européen, mais pas du foot africain, ton continent d'origine. N'est-ce pas de l'aliénation mentale?" Plutôt que de parler d'aliénation, c'est plutôt du reflet de mon parcours qu'il s'agit. Je suis exposé à ce football plus qu'au foot africain. Comme j'aurais aimé parler de mon continent natal! D'autre part, je considère le football non seulement comme un sport qui dépasse l'étroitesse nationaliste et raciale, mais aussi comme un art d'excellence, car il englobe les potentialités de tout l'homme. Un bon joueur n'a pas de nationalité quoiqu'il s'adapte mieux à un environnement culturel donné. Le beau foot, c'est du beau foot, peu importe qui le pratique. C'est là que le modèle européen ou latino-américain pourrait servir de référence.

18 mai 2016

LIverpool vs Séville

Voilà un match qui s'annonce intéressant. Deux entraîneurs ambitieux, deux styles de jeu. Klopp qui a fait ses preuves à Dortmund n'en est pas à sa première finale européenne. Unam Emery qui entraîne Séville depuis 2013 a raflé les deux dernières coupes de l'UEFA. Y aura-t-il un nouvel entraîneur champion? Ou bien le magicien de Séville réussira-t-il le triplé? Telles sont les questions que l'on se pose concernant l'issue de la  soirée de football d'aujourd'hui.
Comme c'est très difficile de faire un pronostic à ce niveau sur deux équipes finalistes. Si les Espagnols ont l'expérience de cette coupe qu'il n'ont pas lâchée depuis deux années, il n'est pas moins vrai que les Anglais possèdent la rigueur et la diligence nécessaires pour obtenir leur meilleur résultat à St Jakob. Un stade que je connais du temps où je faisais du ministère Muttenz. Des amis disent qu'on l'a modernisé. Soit. Les deux équipes sont très solides, peut-être avec un léger avantage aux tenants du titre. Mais je ne serai pas mécontent que Liverpool gagne... en fait, j'aime bien voir le belge Origi jouer et marquer. Un talent qui mérite une telle récompense. Mais les finales des tournois sont parfois décevantes. C'est parti.

16 mai 2016

Adieu Mr. Banza Mukalayi

C'est par un message Skype de l'abbé Michel N'Gob hier que j'ai appris la mort de Mr. Banza Mukalayi, ministre congolais de la culture et des arts. Que son âme repose en paix!  Je n'aime pas parler des personnalités politiques, mais je tiens à rendre un hommage à un compatriot un homme de convictions et d'actions. Son patriotisme et son militantisme étaient remarqués en hauts lieux pour avoir vaillamment défendu les idéaux du MPR. Cet ancien journaliste engagé "aurait" frappé un Belge qui eut le malheur de critiquer la révolution zaïroise. Sa carrière politique est riche, impressionnante: il a dirigé plusieurs ministères aussi bien sous Mobutu que sous Kabila; il est mort ministre, au service de la nation.
Comme par coïncidence, la veille, j'ai suivi une vidéo-interview de Papa Wemba dans laquelle ce dernier l'accusait lui et Kiamwangana d'avoir détourné 100.000 USD offerts aux musiciens par une société brassicole. "C'est quoi 50.000 USD pour un ministre?" s'exclamait Wemba. Il ne m'appartient pas de le juger. Vous connaissez mes positions sur la pratique de la politique.
Pour moi, au-delà de l'homme politique, je vois en Banza Mukalayi un homme de lettres, diplômé en langue et littérature française. A ce titre, il a développé sa vision du monde et sa lecture de la politique. Des Mots récurrents de la transition politique au Zaïre (1990-1997) aux Mots récurrents de la vie politique en RD Congo (1997-2015) se perçoit un effort de conceptualisation et de rationalisation de l'action politique de l'homme des lettres. Un travail intellectuel admirable. On peut ne pas adhérer à sa pensée, on ne peut pas ne pas reconnaître qu'il y a chez ce politologue averti un désir d'éveiller les consciences à la réalité politique de notre pays.
Comme beaucoup, je ne l'ai rencontré de visu qu'une seule fois, dans un restaurant au centre ville, du côté de building de l'Onatra. Mes commensaux qui l'ont reconnu me l'ont présenté. C'était en août 2003.
Condoléances émues à sa famille et à notre pays. Mr. Banza Mukalayi a servi son pays à la mesure de ses capacités. Que le Seigneur lui accorde le repos éternel!
 
 

14 mai 2016

L'accès des femmes au diaconat

Depuis hier, j'ai appris que le pape François est d'accord pour que les femmes accèdent au diaconat. Dans l'église catholique, le diaconat est l'entrée dans l'ordre ou le statut de clerc. En tant que tel, le diacre peut administrer tous les sacrements sauf l'eucharistie et la confession. Vous rendez-vous compte de l'ampleur de la réforme qui est entreprise si elle vient à jour? Une véritable révolution!
Il faudra réviser le droit canon. Le droit traditionnel stipule que les religieuses ont statut de laïc dans l'ordre canonique. Exactement comme les frères réguliers. Le ministère diaconal par contre est conféré par une ordination. Canoniquement, on est ordonné diacre, prêtre, évêque (dernière étape). Un laïc ou un prêtre peut être créé cardinal. Un pape est d'abord évêque, l'évêque de Rome. L'admission des diaconesses dans le clergé catholique constitue un événement historique, sans pareil, aux conséquences imprévisibles. Il existe des diacres mariés depuis Vatican II. Y aura-t-il des diaconesses mariées? Quel sera leur statut? Il existe déjà des mères abbesses dont le statut épiscopal est officiellement établi et reconnu par l'église. 
Il me faudra décidément le droit canon car la question me paraît très complexe. Il est encore trop tôt pour élaborer une théologie consistante là-dessus. Que les canonistes nous éclairent. S'il y a donc ordination diaconale des femmes, pourquoi n'y aurait-il pas ordination sacerdotale pour les femmes. Que des implications historiques! Et de fil en aiguille, le mariage des prêtres. L'église catholique est-elle prête à opérer cette réforme qui changera son visage et son avenir? Quelles seront les conséquences sur le plan canonique, ecclésiologique, liturgique ou religieux?  Attendons donc voir la suite du débat dans ce tournant qui s'annonce passionnant, révolutionnaire et moderniste.

Un prêtre a accusé un évêque à un tribunal civil

Cet article est inspiré d'un email que j'ai reçu de la part du prêtre concerné. Mais je n'ai pas l'intention de le publier in extenso. Par contre, je tiens à en parler librement. Le prêtre est un belge d'origine congolaise. Voilà qu'après dix ans de ministère, il est licencié par l'évêque du lieu qui le prie de regagner son diocèse d'origine. Il conteste la décision et porte l'affaire à un tribunal civil en exigeant des dommages et intérêts. Il accuse à la fois l'évêque et le diocèse. J'arrêterai ma réflexion à quelques éléments.
Une affaire interne à l'église? Deux types de droit se concurrencent dans cette affaire. L'évêque applique le droit canon et le prêtre recourt au droit civil du travail. La première réaction des avocats du premier est de contester la compétence du tribunal pour siéger sur cette affaire. Comme le litige relève de la loi belge, elle est recevable. L'évêque et le diocèse ont été représentés par deux avocats tandis que le prêtre a comparu en personne, accompagné d'un avocat. Le verdict est tombé condamnant l'évêque à une amende de quelque 1000  euros pour n'avoir ni octroyé un contrat conséquent ni explicité le motif justifiant le licenciement. Par contre, l'exorbitante somme réclamée par le prêtre pour les DI a été déboutée. 
Dans le document du jugement, on apprend que fort de sa nationalité belge le prêtre a opté de rester en Belgique. Il a entamé une démarche d'excardination de son diocèse afin de s'incardiner à Bruxelles-Malines en vertu de cette nouvelle nationalité. Démarche restée cependant sans suite. Je sais par expérience que, canoniquement, l'excardination se demande après avoir obtenu un accord formel du diocèse incardinant. En fonction d'un accord commun, car c'est sur présentation d'un document d'acceptation que l'excardination s'obtient. Logique! On apprend également que le prêtre est désigné comme ancien prêtre. Ce changement de statut rend contradictoires les chefs d'accusation déposés au tribunal. On a l'impression que l'essentiel de l'accusation tourne principalement autour de l'argent. Ce que le verdict va refléter.
En réalité, notre compatriote n'a rien gagné de ce procès. Ce procès est un tournant de quitte ou double, et beaucoup de facteurs ont joué en sa défaveur. Une issue contraire m'aurait considérablement surpris. Ce verdict confirme son chômage et le catalogue désormais comme un indésirable, rendant ainsi son séjour et sa vie difficiles. Il devra trouver un autre boulot. J'ai depuis longtemps perçu qu'il lui serait difficile, voire impossible de trouver, après cette révocation, du ministère en Belgique comme dans un autre pays d'Europe. C'était évident. Venons-en à sa nationalité belge! Cette nationalité lui accorde des droits certes, mais on sait combien la couleur de la peau joue un rôle important dans cette même société. Européen naturalisé oui, mais tant que tu n'es pas de souche, tu es quand même tenu pour un étranger. Un étranger qui gagnerait un procès contre un natif de souche, cela se voit très rarement, même dans des états dits de droit. Un ami qui a lu le verdict s'est écrié, outragé: "Mindele kele mbote ve".
Ce qui m'intrigue dans ces genres de procès, c'est le préjudice et le dévolu qu'il jette sur les autres compatriotes qui seront dorénavant vus et jugés par rapport à cette affaire. C'est un précédent. L'ami n'est plus aux affaires, mais les conséquences tomberont sur d'autres. Des mesures drastiques seront prises pour limiter l'engagement de nos compatriotes africains ou noirs dans les institutions ecclésiastiques européennes. Si nous, habitués à notre tradition orale, oublions vite, les Européens eux, munis de leurs archives, n'oublient rien. Qu'on se le dise.

Autour de la mort de Papa Wemba

Beaucoup d'anecdotes, beaucoup de règlements de comptes, beaucoup de surprises, beaucoup de polémiques. Kiamwangana et Tshala Mwana indésirables aux funérailles, finalement c'est pour apprendre que c'est plutôt Kiamwangana seul et Koffi Olomide. Beaucoup a été dit, revu, commenté dans tous les sens.  La presse, très présente, a couvert les événements du début à la fin; elle a livré des interviews avec des proches, amis et enfants de Wemba. Des enfants de PW se sont plaints du mauvais accueil, d'humiliation, d'avoir été traités comme des moins que rien. Il y a tellement à dire qu'on écrirait aisément un livre sur cette icône remarquable. Il y a également beaucoup de leçons de vie à retenir.
Le 2 mai, le président de la RDC a élevé Jules Shungu Wembadio au rang de "Grand Officier dans l’Ordre National « Héros Nationaux Kabila – Lumumba »  (sic) pour son œuvre.. Interprétation populaire: il est héros national. Est-ce une lecture correcte de l'ordonnance? Je laisse le débat aux spécialistes.
De son vivant, Wemba déclarait sans se gêner non seulement son amour pour les enfants mais aussi le nombre de ses enfants biologiques. Il déclarait son amour indéfectible envers Amazone. Dieu seul sait ce qu'il avait dans son cœur. L'existence de nombreux enfants hors mariage - de bâtards quoique ces enfants refusent ce titre - montre quel genre de mari il était. Il était un artiste-musicien: or justement, l'artiste trouve son inspiration dans son vécu quotidien, dans les expériences qu'il tire de ses rencontres, de ses rêves, de ses illusions, de ses projets, etc. Toulouse-Lautrec trouvait son inspiration dans des bordels et  boites à putes: sa peinture érotique n'est-elle pas l'une de plus admirables? Pourquoi alors s'étonner qu'une star adulée par le monde entier soit aimée des femmes et ait beaucoup d'enfants? Tabu Ley, Madilu, Kester n'ont pas fait exception à cette règle. A la mort des artistes se révèlent des secrets longtemps inconnus. Certains sont morts sans laisser d'héritiers connus, encore moins d'héritage ni d'adresses. C'est aussi cela être une star de chez nous. La personnalité de l'individu compte beaucoup. Ndombe Opetun a eu aussi une vie comme Maxime Soki ou Emile. Chaque musicien a son histoire et son sort. Au-delà de ces événements, il y a des points de réflexions intéressants à relever.
Les femmes aiment bien les vedettes musicales, sportives ou artistiques. Mon ami (pourfendeur) ajouterait volontiers les prêtres ou pasteurs à la liste. Elles les adorent, les placent au sommet de leurs aspirations. Curiosité, ambition de succès, plaisir de vivre avec une personnalité bien connue, amour (?), attrait de leur argent, arrogance tirée de l'aura de la vedette, tout cela contribue à l'attraction envers l'objet de leurs rêves. Et ces vedettes possèdent l'art de la parole susceptible de les attirer vers eux. Par leurs comportements, par leur sape, par leur notoriété, ils savent imposer leur prestige à la face de leurs "victimes". Comment une femme qui sait bien que cet homme a des engagements ailleurs peut-elle succomber à cette tentation? Comment se permettent-elles de relations non protégées avec des hommes réputés coureurs de jupons, ignorant complètement le risque d'être infectées? Dans ce domaine, les opinions divergent. Les hommes savent se montrer convaincants lorsqu'ils entreprennent ces démarches de séduction. Hommes et femmes sont fautifs dans ces types de relations.
La notoriété fascine les femmes. Il y en a qui sont prêtes à porter un enfant d'une vedette rien que pour l'honneur d'être vue comme telle. "Moi, je suis la fille de Youyou Mère Supérieure." Une référence de poids pour tous les mélomanes de Viva ou de la musique congolaise. Un jour, il m'est arrivé de rencontrer "MT La Vérité" chez les Kasongo à Clarens. "Oyo MT oyo Wemba  ayemba na Zaiko." 'C'est MT que Wemba a chanté dans Zaiko) Un autre jour, c'était Marie-Jeanne: "Yai mpangi na beto me butaka bana zole ti Tabu Ley." (MJ, c'est notre sœur qui a eu deux enfants avec Tabu Ley). Cette carte de visite fait classe, honneur. En règle générale, être "chanté" ou "être cité comme libanga" fait entrer l'individu honoré dans la cour des grands, dans l'histoire. Et ce prestige sans commune mesure s'apprécie immensément à tel point qu'on peut se couper en quatre pour y accéder. Les femmes en s'offrant généreusement, les hommes en payant des sommes faramineuses. Voilà une source des drames qui suivent la mort d'une vedette.
L'argent, c'est aussi synonyme de femmes. Les vedettes, c'est aussi, aux yeux des femmes, l'argent. "Tobandi na yo na ba pauvre, lelo osi okomi mobali ya bato" (Nous avons commencé avec toi dans la pauvreté, aujourd'hui tu es l'homme des autres". Passer dans la presse et les média montre qu'on est une personne en vue, donc une personne à succès. L'argent tombe et coule automatiquement à flots. Et souvent, c'est de l'illusion. Comment entretenir ces femmes et ces enfants? Et chaque enfant clame qu'il était aimé de son père, soigné et scolarisé par son père. Supposons que Wemba ait laissé 1 million de dollars dans son compte, combien recevrait chaque enfant si la loi autorisait que cet argent soit distribué équitablement? Une explication: nous avons une autre conception de la famille et de l'enfant en partie parce que le régime polygamique fait partie de notre patrimoine social et culturel. Je crois qu'en vivant dans la société moderne nous devons adapter nos us et coutumes.
Comme dans tous les domaines, que ce soit en politique, en religion ou dans le domaine de la vie familiale, nous prenons les conceptions modernes tout en gardant intacts les usages traditionnels dans la pratique. Le chef du village demeure intouchable, l'avis du sorcier est irréfutable, le chef de famille reste le "pater familias" vénéré et incontestablement impérial. Sans être féministe, j'avoue qu'on reste dans un cycle strictement patriarcal. Une mentalité ne se change pas en un tour de main.
 
 

Dieu merci, il n'est pas comme les autres

La fameuse prière du pharisien, je l'ai vécue une seule fois dans ma vie. Et pourtant, elle se décline tous les jours au présent. Je me vois vivre et j'observe les autres aussi vivre. Je suis comme les autres, en même temps je ne suis pas comme les autres.
Lorsque j'étais plus jeune, un ami m'avait surpris en se vantant d'avoir toutes les qualités attendues d'un élève de son âge. Pour le prouver, il a accusé un autre d'avoir émis des insultes à l'endroit d'autres condisciples. Quarante ans plus tard, j'observe le comportement du même ami. Il n'a pas changé d'un iota. Une vie faite d'incidents et de ruptures, de divorces et de remariages, de tensions continuelles et de procès en justice. Pourquoi? Il a une volubilité incontrôlée.
Maladroit dans ses propos, inconsistant dans son raisonnement, il exprime des positions difficiles à tenir devant le commun des mortels. Il n'a guère cure des autres, tellement il est imbu de lui-même. Elève très moyen, il est cependant imbattable - il ne se reconnaît jamais battu - dans des discussions, même celles dont il n'est pas spécialiste. Comme il n'arrête jamais de parler et tient à garder la dernière parole dans un débat, il baigne dans une illusion qui le montre plus grand, plus talentueux, plus intelligent, plus sage, plus combattant, etc. que les autres. En réalité, il s'est créé une "persona" à travers laquelle il voudrait que le monde le perçoive. Hélas, le naturel revient au galop lorsqu'on l'élude. Un personnage digne d'être dépeint par La Bruyère dans ses Caractères.  L'erreur mythique de Narcisse, c'est le nombrilisme, l'incapacité de voir plus beau, plus malin, plus parfait que soi. Des études sur ce type de personnalité sont concluantes pour relever qu'il s'agit d'une anomalie susceptible d'être soignée par des spécialistes. Cependant, Dieu merci, il n'est pas comme les autres.

11 mai 2016

Le chef Mwambu est mort

11 mai 2016. C'est hier que j'ai appris de Bernardin Mbuku la nouvelle de la mort du chef Mwambu, Kabadi. Paix à son âme! Ce matin, je viens d'avoir une conversation Messenger avec Bernardin qui confirme la nouvelle et ajoute que le gouverneur André Kimbuta a fait publier une annonce officielle à la télévision à ce sujet. 
Comment dire? J'ai connu du temps de mon école primaire à Makiosi. Comme les enfants des villages autour de l'école, il marchait tous les matins de Kimwambu pour l'école et y retournait les soirs. Il était proche des enfants du Chef de C.I. Mandokolu. De là il est allé à Kenge, mais je n'ai pas suivi son curriculum scolaire. Par contre, il s'est engagé avec succès comme "animateur" dans le groupe-choc de Kenge, au service de la propagande mobutiste. C'est donc au sein de la JMPR qu'il a évolué. Je le croisais de temps en temps en compagnie de Lazarre Kimbuta d'heureuse mémoire. Du temps où je travaillais à l'évêché dans les années 80, l'animation ayant perdu son entrain, Kabadi travaillait à la Sous-Région comme agent à la MOPAP. Le secrétaire sous-régional Anicet Mondo était son chef direct. Je le mentionne parce qu'à ce titre, nous avons eu une conversation sur une parcelle que j'avais achetée au camp ONL de Kenge - juste à côté des Nkonika - , que son patron convoitait. Kabadi était intervenu pour que je revoie ma position; mais c'était trop tard. A la mort du vieux Mandokolu, Kabadi et Papa Gabriel Ndikita ont sollicité une messe que j'avais célébrée à la paroisse Notre-Dame. C'était en 84 probablement. Je m'en souviens parce que c'était l'une de mes toutes-premières messes de morts.
Plus tard, Kabadi s'est fait introniser Chef Mwambu, titre et responsabilité qu'il a assumés d'une main de fer jusqu'à la fin de sa vie. Installé depuis à Kimwambu, il a beaucoup souffert de diabète, selon Bernardin. Il serait même allé se faire soigner en Inde à deux reprises. On lui aurait amputé une jambe. L'enterrement, selon Bernardin, aura lieu au village car on devra opérer les cérémonies traditionnelles liées à son rang de chef. Le retrait des mitsunga et des attributs chefaux se fait selon des rites stricts qu'on ne saurait opérer à Kinshasa. D'autre part, la présence des autres chefs - Kiamfu, Mwela, Kidima, Kayombo, Mukata - est nécessaire afin de faciliter l'installation de son successeur au trône. Comme quoi, ce n'est pas facile de mettre en terre un chef. Mais moi, je pleure un frère avec qui j'ai partagé une partie de ma vie terrestre.
Ah Mfumu Mwambu Kabadi, wenda mboti. Bankhaka ba kutambwasa!


10 mai 2016

Le triste sort de Platini

Michel Platini doit démissionner de son poste de président de l'UEFA. Sa suspension est réduite de 6 à 4 mois. Et pour cause? L'argent. Ce joueur que nous avons admiré à St Etienne avant de poursuivre sa carrière à la Juve est un des meilleurs numéro 10 de l'histoire du football. Une véritable légende en France. L'ancien capitaine de l'équipe de France n'a jamais gagné la coupe du monde, mais c'est tout comme. Un sacré distributeur de balle, un formidable tireur de coups francs et de penalties, et surtout un maître à jouer et patron de son équipe sur le terrain. Les admirateurs du bon jeu se souviendront longtemps des prouesses de Platini. Puis le prodigieux artististe du ballon rond s'est lancé dans l'encadrement technique et professionnel du football jusqu'à se hisser à la tête de l'UEFA. La présidence de la FIFA lui serait revenue s'il n'était pas tombé dans le traquenard de Sepp Blatter. Et là alors, tout a tourné de mal en pis. Une véritable descente en enfer. 
C'est vraiment dommage pour une telle sommité du foot qui a tout donné à ce sport, que de se retrouver entraînée dans cette sordide boue. Toute la gloire qu'il a bâtie par l'excellence de son génie est ruinée, démoliée par l'argent. Oui, l'appât de l'argent est une malédiction. Il plaide non coupable sans doute, mais cela ne suffit pas pour laver l'opprobre qui l'entoure depuis des années. Il ne saura jamais prouver à qui que ce soit son innocence, car il s'agit non seulement d'affaires de gros sous, mais aussi d'un système de corruption qui dépasse tout entendement. Il est accusé de délits d'initiés c'est-à-dire d'avoir bénéficié des faveurs et avantages liés à son statut de membre de la FIFA. Les dégâts causés par ces accusations sont considérables à tel point que son honneur et sa probité sont remises en causes. Désormais, les gens oublieront le talentueux footballeur qu'il fut et ne retiendront de lui que l'épisode de la corruption qui a écroulé sa dignité. Quelle pègre que ce cette FIFA! "Oeuvre de tant de jours en un jour effacée!" Un triste sort que celui de Platini.

7 mai 2016

La Fête des Mères

8 mai 2016. Lorsque je célèbre cette fête, du moins depuis que je la connais et l'ai insérée dans mes habitudes, je pense d'abord à ma mère Christine et à toutes mes mamans. Cette désignation s'étend de mes tantes à mes soeurs, de mes nièces à mes belles-soeurs, mes filles, mes amies. Au sens propre comme au figuré, par consanguinité comme par alliance. Elles appartiennent toutes à mon univers intime et spirituel. Aujourd'hui, je voudrais bien spécialement penser à mes mères spirituelles: j'en ai eu, j'en ai, j'en aurai. J'en ai eu une qui insistait que je l'appelle "mère adoptive" alors que Mama Resi qui a pourtant tout fait pour moi n'avait jamais exigé de moi que je l'appelle ainsi. Pour cette dernière, j'ai été le fils spirituel qu'elle n'a pas enfanté biologiquement. Son affection était totale jusqu'à son dernier souffle de vie, survenu à deux semaines de mon colloque doctoral.
Je pense notamment aux religieuses et aux femmes consacrées, mères spirituelles au vrai sens du terme. Quelle dédication, quelle générosité, quelle serviabilité! Je les revois dans mon enfance (les Salésiennes de Kenge) sillonnant les rues pour visiter les pauvres, apporter des soins appropriés aux nouveaux-nés à la maternité comme au dispensaire. Je les vois veiller à notre éducation intellectuelle, morale et chrétienne. Je les vois à Kimbau, Masamuna, Bandundu, Fatundu, Kisantu, Kikwit, Kinshasa et ailleurs au service des plus démunis, modèles impressionnants d'humilité et de fidélité au Seigneur. A Rome au Collège Urbain, elles étaient tellement dédiées à notre service que le recteur Natale Fumagalli ne s'est pas un jour empêché de les présenter comme "le nostre mame". L'expression était parfaitement choisie. En optant pour une maternité spirituelle plutôt que biologique, ces femmes ont mis Dieu au centre de leur existence. Ces mères spirituelles exercent dans une discrétion remarquable des services impayables et dont la valeur n'est pas calculable. De véritables héroïnes dans l'ombre. Elles sont nombreuses à travers le monde, quoiqu'on ne souligne pas assez leur qualité de mère. Pour quoi, je dis, être mère n'implique pas forcément avoir porté un enfant dans son sein.
Ma pensée en ce jour va spécialement à une de mes mamans qui se trouve en convalescence à la suite d'une sérieuse opération. Ma prière l'accompange.
Dans ma famille étendue et restreinte, depuis que nos parents biologiques sont partis, nous nous consolons en disant que "nous sommes désormais nos propres mères et pères." Un slogan pour nous encourager mutuellement! Nos parents, paix à leurs âmes, nous ont inculqué des valeurs humaines et spirituelles sur lesquelles se justifie notre amour fraternel. Je parie que cela peut s'étendre au-delà de nous.
"Bonne Fête des Mères" à toutes les femmes. Un coucou particulier à Ngudi'a Bodi!

6 mai 2016

Détaxer le livre

"L’ONG «Nous et le Livre» appelle le gouvernement congolais à réduire les taxes douanières dues à l’importation des livres. La présidente de cette structure, Jenny Kilele, a lancé cet en marge de la journée internationale du livre et des droits d’auteur, célébrée le 23 avril de chaque année.
«Pour rendre le livre accessible, il faudrait qu’on puisse tenir compte de l’accord de Kenya qui appelle à la détaxation du livre. Il faudrait que le pays puisse s’inscrire à cette politique et permette qu’on ne puisse pas taxer les livres comme les marchandises consommables», a-t-elle indiqué.
Jenny Kilele a également appelé l’Etat à subventionner les producteurs des ouvrages et créer des imprimeries en vue de faciliter la production des livres."
(Source: http://www.mediacongo.net/article-actualite-17583.html)

Commentaire spontané:
C'est une initiative très louable. Je félicite Jenny Kilele dans ce combat car le livre constitue une denrée très chère pour les Africains tellement son prix est décourageant. D'où sa dévalorisation. Dans nos pays pauvres, acheter un livre est un luxe réservé aux nantis. On nous reproche de ne pas lire, de ne pas savoir lire.  Comment voulez-vous que les gens lisent dans un pays où les besoins de base ne sont pas satisfaits? Acculés à décider entre l'essentiel et l'accessoire, les parents choisissent de nourrir, soigner leurs enfants plutôt que de les élever intellectuellement. Il y a trop d'obstacles pour qu'une culture du livre émerge du matérialisme auquel est soumise la société. Là réside justement le problème. Le livre doit être mis à la portée de toutes les poches, si l'on considère que l'éducation est la clé du développement. Nos pays opèrent souvent sans bibliothèques publiques, sans centres de lecture ni media-centres. Beaucoup de pays émergeants détaxent l'importation et la fabrication du livre afin d'assurer le développement socio-culturel et économique de leurs populations. Les matériels didactiques utilisés dans les écoles sont distribués gratuitement dans ces pays où l'éducation est généralement la priorité des priorités. L'éducation ouvre des opportunités insoupçonnées aux récipiendaires et permet un dévéloppement harmonieux. Qu'on se le dise, pas de développement sans éducation. Et pas d'éducation sans livre. C'est lié. Le niveau d'alphabétisation d'un pays reflète souvent son niveau de développement. Bonne chance à l'ONG "Nous et le Livre" dans son noble combat.

Encore un mort dans la famille: Damien Kuketuka

J'ai beaucoup hésité avant de publier cet article. Mon cousin Damien est mort il y a une semaine. Paix à son âme! J'ai d'abord appris cela sur Facebook par Frinck Butandu avec photos à l'appui: 
"Chers amis et connaissances, chers anciens de l'UNIKIN, de l'ERAIFT, particulierement ceux de la faculté des sciences agronomiques, chers anciens de la C.R.U.K, vous tous qui connaissez l'ingénieur Damien Kuketuka, c'est avec consternation que je vous annonce son decès. Cela est arrivé par noyade sur le fleuve Congo, à Kinkole. Le corps est à la morgue et le programme nous sera communiqué ultérieurement."
Comme je ne réussissais pas à joindre Kinshasa, je suis entré en contact-Viber avec Jean Mabaka au Canada qui a ajouté une précision: "Bonjour yaya, oui, je l'ai appris hier. Il semble qu'il était allé acheter du bois à l'Equateur; c'est en cours de route que des ennemis l'ont attaqué et jeté son corps dans le fleuve." (Sic) D'autres confirmations ont suivi, et aujourd'hui, je me résouds à diffuser la nouvelle sur le blog.
Damien, c'est ma famille. J'étais à l'école primaire à Kenge lorsqu'il est né; et je l'ai vu grandir. On disait de Tante Georgette, sa mère, qu'elle avait eu même des quadruplés, tous décédés. Un événement unique! Moi j'appartiens plutôt à la génération de ses soeurs et frère aînés - Charlotte, Pangu, Marie (paix à son âme), Lucien -. Je l'ai certes bien connu, mais comme un cadet. Quand je leur rendais visite sur la rue de l'école, c'est plutôt avec ses aînés que je parlais le plus. J'étais particulièrement attaché à ma congénère Marie. Lorsque je travaillais à l'évêché, Damien venait régulièrement me visiter. En juillet 2012, lors de mon dernier passage à Kenge, il était du groupe de ceux qui m'ont accompagné voir les tombes de "mes morts". C'est d'ailleurs lui qui nous a aidés à identifer la tombe de ma soeur Louise, enterrée à quelques pas de Tante Georgette. Nous avons prié ensemble pour Louise, Papa Frédéric, Mgr M'Sanda et les abbés enterrés à Katende.
Comme si une fatalité nous frappait, Tante Georgette est décédée à la suite d'un accident de circulation sur la N1 entre Kenge et Kinshasa. Marie a mené une vie très difficile avant sa mort: la dernière fois que je l'ai vue en 2007, c'était au bureau du Dr Mayengo. Aujourd'hui, c'est Damien qui nous quitte dans des conditions accidentelles très atroces. Comment exprimer cette lancinante tristesse? Comment pleurer ce jeune homme respectueux, doué et doté de tant de générosité que la mort vient d'arracher si brutalement à notre amour? Les mots ne suffiront pas pour traduire cette douleur ni assouvir notre désir de lui témoigner affection. Notre peine est trop forte pour être effacée en un tour de mains.
De la lointaine Barbade, je m'unis à notre grande famille pour pleurer Damien dans la dignité et le respect de Dieu. Ah Damien wenda mboti, Mfumu Nzambi kakusambula!


4 mai 2016

Mon pronostic était correct: une finale madrilène à 100%

Comme je l'ai écrit, les équipes espagnoles ont fait une bonne affaire à l'aller. Hier c'était Atletico, aujourd'hui c'était au tour de Real Madrid de se qualifier. Exactement comme je l'avais pressenti. Comment dire? Voilà une re-finale de 2013. La Maison Blanche retrouve les Colchoneros en finale. Ce ne sont plus les mêmes équipes quoique certains joueurs aient joué il y a trois ans. Cette fois-là, le Real Madrid avait gagné. Sera-ce de même cette année? Atletico a gardé son entraîneur qui est sur le départ pour la Premier League, RM a un ancien du sérail, Zinedine Zidane. L'équation, cette fois-ci, est plus difficile à résoudre. Sur papier, RM est favori à cause de son expérience, de ses vedettes et de sa valeur historique. Atletico est une équipe de plus en plus habituée à ces derbies. La chance aidant, elle peut s'en sortir et gagner la coupe. D'autre part, ces deux équipes se connaissent bien, et savent comment se contrer. C'est un peu le match du pauvre contre le riche. J'estime qu'El Colcho étant un entraîneur plus expérimenté que le Français, saura dénicher des failles chez les Madrilènes pour tourner le match en sa faveur. J'estime que, sur papier, les deux équipes possèdent des chances égales de gagner la coupe quoique le RM ait un léger avantage psychologique. Le derby de Milan risque de se réduire à un match de championat espagnol si les deux équipes ne prennent pas de risques: je crains qu'on aille aux tirs de penalty.

2 mai 2016

La France va accroître ses effectifs militaires en Côte d'Ivoire 2

Dans ma réflexion d'hier, je m'interrogeais sur cette annonce en termes de colonialisme à rebours, de loi du plus fort, et de rapports de force inégaux. Aujourd'hui, comme pour illustrer  ces propos, RFI vient de publier sur Internet un article sur le regrettable bombardement de Bouake par les forces armées ivoiriennes en 2005, qui a coûté la vie à neuf soldats français et un Américain. L'article "Affaire Bouaké: Genèse d'une énigme franco-ivoirienne" révèle le contexte dans lequel ce bombardement s'est opéré.
1. Pressions politiques et diplomatiques. De la lecture de cet article découle l'idée que la France fonctionne dans la logique des intérêts occidentaux. Et au nom de ces intérêts, elle dirige et contrôle les dirigeants africains; elle s'allie, quand nécessité oblige, à ses partenaires de l'Ouest pour changer l'ordre du monde. La chute de Kadhafi est à attribuer à ce plan hégémonique. L'article expose des contacts téléphoniques entre Chirac et Gbagbo au sujet de l'action militaire que ce dernier voulait entreprendre pour récupérer le contrôle du nord de la Côte d'Ivoire tombé aux mains de rebelles. "Arrête... cette connerie" aurait dit Chirac à son interlocuteur africain. Quel mépris! Quelle condescendance! Un tel échange, s'il a vraiment eu lieu tel qu'il est rapporté, me semble bas, vil et irrespectueux. La présence de l'armée française, La Licorne, sur le territoire ivoirien permet aux Français de tenir un discours de pouvoir hégémonique ou impérialiste sur les dirigeants de ce pays. Maîtrisant la réalité du terrain mieux que l'armée locale, elle peut aisément tourner les cours des événements militaires dans le sens qui lui convient. La France dicte ses ordres à ses partenaires ou alliés, affirmant ainsi sa suprématie inconditionnelle. Et chaque mot est une menace prise très au sérieux par l'interlocuteur africain.  En retour elle attend une obséquiosité sans faille de ses partenaires africains. Hélas, c'est cela la coopération militaire, c'est-à-dire pressions politiques et diplomatiques.
2. Remise en cause de la souveraineté nationale. Hier, je posais la question de savoir si les pays africains sont vraiment indépendants. Ce qui nous est imposé comme logique et normal n'a pas de réciprocité. La logique du plus fort fonctionne à merveille. La France décide d'accroître ses effectifs militaires en Côte d'Ivoire, les Ivoiriens comme les autres Africains acceptent cela sans se poser des questions. Nos journalistes relaient la nouvelle comme un succès "militaire" et sécuritaire, sans se donner la peine d'expliquer à la population ce que nous perdons en termes de souveraineté. Non seulement le renfort militaire démontre l'incapacité des Africains de se défendre face au terrorisme, il lance un message clair de notre dépendance face aux puissances de ce monde. Nos états ne seront souverains que lorsqu'ils seront en mesure de décider librement de leur sort. Contrairement à ce que l'on croit ou laisse croire, la coopération sous toutes ses formes obéit à la volonté du plus fort. Et la coopération - diplomatique, économique, militaire, culturelle - bénéficie d'abord au partenaire fort qui, de facto, dicte sa loi. Ce genre de partenariat remet en cause la souveraineté nationale de nos pays. A se demander si nos dirigeants réagissent rationnellement à ces pièges à moins qu'ils soient des complices corrompus qui ne tiennent qu'à leur pouvoir. N'est-ce peut-être pas entre autres la raison de l'éviction de Laurent Gbagbo car sa responsabilité dans ce bombardement est sujet à insinuations?
3. Ces réflexions, que d'autres intellectuels mènent également, se prouvent ou s'illustrent dans la réalité. L'ambiguïté qu'entretient la Francophonie n'est pas isolée ni séparée de cette politique hégémonique. Sous la façade de la démocratie se dissimulent de fortes pressions, des pouvoirs de domination et d'hégémonie qui se balancent comme des épées de Damocles sur nos dirigeants. En renforçant sa présence militaire, la France étend une fois de plus sa main-mise ou sa main basse sur l'Afrique. Parlez-moi encore de pays africains indépendants, souverains ou démocratiques!

1 mai 2016

La France va accroître ses effectifs militaires en Côte d'Ivoire

Avant-hier, j'ai lu un article, avec photo à l'appui, sur la visite du ministre français de la défense en Côte d'Ivoire. Là il était question d'augmenter la présence militaire française dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Un événement pareil me surprend, me fait frémir et m'amène à entreprendre des réflexions sur la politique française en Afrique.
1. Colonialisme à rebours. Il y a plus de cinquante ans depuis que ce pays africain est indépendant, mais la présence militaire française y est aussi forte que par le passé. La seule différence est qu'au temps colonial n'existait que l'armée coloniale d'occupation et de maintien d'ordre. Aujourd'hui existe sous le couvert d'une coopération militaire une armée française opérante à côté de l'armée nationale. Cette situation prévaut dans les anciennes colonies françaises. Les forces armées françaises exercent une sorte de surveillance sur l'ancienne colonie, jouant à la fois aux pyromanes et aux pompiers. Elles sont présentes partout et parfois dans les recoins inaccessibles aux forces locales. Une ambiguïté est délibérément entretenue, souvent masquant maladroitement les méandres de la Françafrique.
2. La loi du plus fort. Est-il possible de s'interroger sur la pertinence de cette situation? Mongo Beti dénionçait les dictatures francophiles qui ont régné sur l'Afrique sous la protection avérée de l'ancienne puissance coloniale. On peut dire que le pouvoir en Afrique vient de l'ancienne puissance coloniale. Les événements du Burkina Faso ont montré combien la France influence la politique africaine à tous les niveaux. L'armée française a "exfiltré" le dictateur Blaise Compaoré pour l'amener en Côte d'Ivoire, le mettant ainsi à l'abri des dangers qui le guettaient s'il était tombé entre les mains de la population révoltée. La France a également montré sa force en Côte d'Ivoire lors de la passation  calamiteuse du pouvoir entre Gbagbo et Ouatara. En Centrafrique, le scénario n'est pas très différent quoique elle opère sous le couvert de l'ONU. La présence militaire française va de soi en Afrique alors qu'il est inconcevable qu'une armée africaine aille mener des opérations sur le territoire français. Mille fois inconcevable. Le rapport entre la France et ses alliés africains n'est ni mutuel ni réciproque: la nation la plus forte impose sa loi au plus faible; mais cela ne se déclare pas.
3. Rapports de force inégaux. Qu'un pays africain accepte sans réchigner ni se méfier que la France augmente ses effectifs militaires sur son territoire, fut-ce au nom de la lutte contre le terrorisme, mérite vraiment qu'on pousse la réflexion un peu plus loin. Lumumba, Sankara ont été tués pour avoir remis en cause l'hégémonie occidentale sur leurs pays. Nos autorités perçoivent-elles vraiment toute la portée d'une telle coopération? Sont-elles conscientes des conséquences néfastes qui peuvent découler de tels actes? Il est clair que pendant que les Français s'infiltrent dans les entrailles du pays africain, aucune concession n'est accordée à l'état partenaire sommé désormais d'obéir au doigt et à l'oeil de l'ancien maître colonial. Souvent, le dictateur francophile s'englue dans ces alliances aux contours très peu définis, obnubilé par les bénéfices ou les dividendes qu'il tire immédiatement de cet  accord. Il en va souvent de la vie politique des leaders africains, car les coups d'Etat se décident depuis Paris. Quand est-ce que l'Afrique deviendra vraiment indépendante? Quand pourra-t-elle se défendre toute seule sans l'apport paternaliste de l'Europe? A mon sens, il faudra qu'elle soit d'abord consciente de sa puissance pour clamer une quelconque autonomie militaire. Nous sommes encore à la merci des anciens colonisateurs. Pas si sûr que nous sortions tôt de cette soumission militaire.