Cet article est inspiré d'un email que j'ai reçu de la part du prêtre concerné. Mais je n'ai pas l'intention de le publier in extenso. Par contre, je tiens à en parler librement. Le prêtre est un belge d'origine congolaise. Voilà qu'après dix ans de ministère, il est licencié par l'évêque du lieu qui le prie de regagner son diocèse d'origine. Il conteste la décision et porte l'affaire à un tribunal civil en exigeant des dommages et intérêts. Il accuse à la fois l'évêque et le diocèse. J'arrêterai ma réflexion à quelques éléments.
Une affaire interne à l'église? Deux types de droit se concurrencent dans cette affaire. L'évêque applique le droit canon et le prêtre recourt au droit civil du travail. La première réaction des avocats du premier est de contester la compétence du tribunal pour siéger sur cette affaire. Comme le litige relève de la loi belge, elle est recevable. L'évêque et le diocèse ont été représentés par deux avocats tandis que le prêtre a comparu en personne, accompagné d'un avocat. Le verdict est tombé condamnant l'évêque à une amende de quelque 1000 euros pour n'avoir ni octroyé un contrat conséquent ni explicité le motif justifiant le licenciement. Par contre, l'exorbitante somme réclamée par le prêtre pour les DI a été déboutée.
Dans le document du jugement, on apprend que fort de sa nationalité belge le prêtre a opté de rester en Belgique. Il a entamé une démarche d'excardination de son diocèse afin de s'incardiner à Bruxelles-Malines en vertu de cette nouvelle nationalité. Démarche restée cependant sans suite. Je sais par expérience que, canoniquement, l'excardination se demande après avoir obtenu un accord formel du diocèse incardinant. En fonction d'un accord commun, car c'est sur présentation d'un document d'acceptation que l'excardination s'obtient. Logique! On apprend également que le prêtre est désigné comme ancien prêtre. Ce changement de statut rend contradictoires les chefs d'accusation déposés au tribunal. On a l'impression que l'essentiel de l'accusation tourne principalement autour de l'argent. Ce que le verdict va refléter.
En réalité, notre compatriote n'a rien gagné de ce procès. Ce procès est un tournant de quitte ou double, et beaucoup de facteurs ont joué en sa défaveur. Une issue contraire m'aurait considérablement surpris. Ce verdict confirme son chômage et le catalogue désormais comme un indésirable, rendant ainsi son séjour et sa vie difficiles. Il devra trouver un autre boulot. J'ai depuis longtemps perçu qu'il lui serait difficile, voire impossible de trouver, après cette révocation, du ministère en Belgique comme dans un autre pays d'Europe. C'était évident. Venons-en à sa nationalité belge! Cette nationalité lui accorde des droits certes, mais on sait combien la couleur de la peau joue un rôle important dans cette même société. Européen naturalisé oui, mais tant que tu n'es pas de souche, tu es quand même tenu pour un étranger. Un étranger qui gagnerait un procès contre un natif de souche, cela se voit très rarement, même dans des états dits de droit. Un ami qui a lu le verdict s'est écrié, outragé: "Mindele kele mbote ve".
Ce qui m'intrigue dans ces genres de procès, c'est le préjudice et le dévolu qu'il jette sur les autres compatriotes qui seront dorénavant vus et jugés par rapport à cette affaire. C'est un précédent. L'ami n'est plus aux affaires, mais les conséquences tomberont sur d'autres. Des mesures drastiques seront prises pour limiter l'engagement de nos compatriotes africains ou noirs dans les institutions ecclésiastiques européennes. Si nous, habitués à notre tradition orale, oublions vite, les Européens eux, munis de leurs archives, n'oublient rien. Qu'on se le dise.
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