31 déc. 2014

A propos de "Beethoven était bel et bien noir" (Facebook)

29 décembre 2014. Après lecture de www.blackfeelings.com, j'ai réagi sur la page Facebook d'EPP:
Claver Mabana: 
"C'est un vieux débat. J'avais visité, grâce à l'Institut Goethe, sa maison de naissance en 1980, non loin de l'Hôtel de ville de Bonn. Son nom est flamand mais je ne crois pas à sa filiation noire. S'il nous faut à tout prix des génies, trouvons-nous en d'indiscutables. Même si Beethoven avait réellement été noir, cela n'aurait rien changé à l'histoire. C'est un musicien allemand."
Evariste Pini-Pini: 
"Pourquoi faut-il chercher ce qui existe? Il ne s'agit pas de trouver, mais de reconnaître car ils existent. il ne faut pas oublier qu'Alexandre Dumas, l'un des pères de la littérature française, est noir. C'est un fait. Ce n'est pas à chercher, c'est un fait qu'il faut reconnaître. Il ne s'agit pas de s'approprier des noirs, mais tout simplement de reconnaître ceux à qui cette si belle identité a été ôtée peut-être avec leur concours ou sans leur concours."

En exergue de la version anglaise l'auteur a écrit: "This is Just My Opinion... Valued by Me And Nobody Else"

Voici un commentaire éclairant:
"Assuming that Beethoven had some African ancestry, are you going by the one drop rule? Does having a drop or two of African blood mean that he had any African cultural heritage? I'd assume if he had an ancestor who passed for white, they wouldn't have brought along any recognizable African heritage, even assuming they had any, given that the ancestor was probably not in an environment with any appreciable African culture (ie may have been purchased as a child and raised in a household with no other people of African origin)....
Ultimately, most of us, with the possible exception of the most milky white or night black have an unknown mix of blood. We need to get beyond the color of skin to who we are." Malusinku, Sept. 28, 2009.

(Source: http://open.salon.com/blog/ronp01/2009/09/27/the_african_heritage_of_ludwig_van_beethoven)


Beethoven noir, Alexandre Dumas noir, et alors?


Révisionnisme? Revalorisation de la race dite sauvage, inférieure et sans histoire? Un peu de tout cela car le but est de contester l'eurocentrisme trop voyant qui domine le monde depuis des siècles. J'en arrive là après une discussion que j'ai eue sur Facebook avec l'ami Evariste Pini-Pini, dont je respecte la pensée et les revendications sans que j'y adhère.
Pendant cette semaine où les Africains-Américains célébrent leur Kwanzaa, j'aimerais tout en respectant l'existence culturelle noire réfléchir sur un thème controversé: l'identité raciale noire. Mon point n'en est qu'un, c'est-à-dire discutable, ouvert et imparfait. Seulement, j'y crois ferme car j'aime la mesure en toutes choses. Que la race noire retrouve son identité perdue, annulée ou méconnue, ne me pose pas problème. Qu'elle refuse d'être observateur plutôt qu'acteur de l'histoire n'est qu'à son honneur. Je crois que j'y contribue à ma façon.
Les catégories de la "différance" comme dirait Dérida font que le monde se divise en unités biologiques, linguistiques, socio-culturelles, etc. A vouloir chercher dans ces différences une spécificité propre, on risque de tomber dans le piège du racisme que l'on combat. C'est l'essentialisme jadis décrié chez tous les mouvements négristes: négritude, black power, ujaama, etc. Quoi qu'il en soit, du moment que vous tentez de remonter à la structure, le risque est grand de radicaliser votre discours.
L'église africaine se montre sage lorsqu'elle réclame l'africanité de Saint Augustin, Cyprien ou Tertullien quand bien même ces derniers constituent des pivots majeurs de la pensée occidentale. C'est la culture méditerranéenne et chrétienne qui a fait d'eux ce qu'ils sont devenus. Leur africanité relève de l'origine géographique et biologique. Que de reconnaître leur contribution universelle fait preuve de bon sens. A l'heure de la mondialisation, réfléchir en termes de races, genres ou sexes, mène forcément à une discussion sur le pouvoir: qui définit l'identité individuelle? qu'est-ce qui la caractérise? Cette discussion est aussi vieille que le monde, car elle a suscité les voyages de conquête et d'exploration, les guerres d'occupation, la formation des royaumes et empires, les systèmes d'organisation politique et sociale, les colonisations et autres tentatives de domination.
Aujourd'hui les mouvements migratoires des populations et les contacts interculturels font qu'on parle de métissage, d'hybridité, de trans-culturalité. Ce changement suscite d'autres attitudes conservatoires: la pureté de la race dans un monde multiethnique passe à l'extrême nationalisme. Les "fronts nationaux" constituent, on ne le dira jamais assez, une tentative claire de préservation raciale sous le couvert de la nation. Une défense musclée et arrogante de son soi. De l'autre côté, les minorités jadis colonisées cherchent à ébranler ce soi eurocentrique pour le relativiser en s'attribuant quelques galons ou en remettant en cause l'origine biologique de certaines figures emblématiques. Cette attitude répond à un désir de se revaloriser, de montrer qu'on est l'égal de l'autre. Pouchkine, le célèbre poète métis russe, était fier de son ascendance africaine, mais n'a rien fait pour valoriser son africanité, sa "différance". Il n'en avait pas besoin. Le combat racial ne finira jamais tant que différentes races vivront ensemble, tant que chaque race affirmera sa spécificité pour contrer ou anéantir l'autre race. La lutte existe déjà entre familles, ethnies, tribus, langues, régions, pays selon qu'ils sont du nord, du sud, de l'est ou de l'ouest. Imposer son identité face aux autres en jetant le déni sur eux, constitue en dernière analyse l'objectif ultime de cette démarche.
La vraie question à poser consisterait plutôt à savoir à qui profiterait cette identité ou ce qui se tirerait de cette affirmation. Si Beethoven était noir comme Alexandre Dumas, je maintiens ma position, cela n'aurait rien changé à l'histoire puisque dans leur âme et conscience ils ont servi la culture de leurs nations respectives. Beethoven est un génie musical de la tradition allemande tout comme Dumas en littérature française. Qu'ils aient eu des traces de sang noir dans leurs veines, encore faut-il le prouver, on pourrait également le dire de l'humanité entière puisque l'Afrique noire est le berceau de l'humanité.

29 déc. 2014

"Que vos bouches exhalent partout l'odeur des oignons"

Discours du roi Léopold II de Belgique. Le roi Léopold II avait donné aux missionnaires belges des instructions, une sorte de vadémécum pour régler leur comportement en fonction de l'idéologie coloniale. J'ai déjà lu et entendu beaucoup de commentaires à ce sujet. Bref, les missionnaires belges avaient mission non d'évangéliser les Africains car ceux-ci connaissaient déjà Dieu, mais de les soumettre à l'exploitation, à la pauvreté et à la dégradation humaine. A entendre le texte lu par un interprète de talent, à voir les illustrations qui accompagnent ce texte, l'évangélisation faisait, en d'autres mots, partie d'un vaste agenda colonial, blanc, d'occupation du territoire africain et d'oppression de l'Africain. Un plan d'anéantissement total du Noir sur sa propre terre et de sa soumission à l'idéologie coloniale. L'objectif ultime était l'enrichissement de l'empire, l'appauvrissement total de la population africaine en leur privant de tout sens d'humanité et de dignité.
Le texte que j'ai suivi sur Facebook est caricatural, satirique et pamphlétaire. C'est ce qui dérange. Loin de moi l'idée de laver le roi Léopold de ses opprobres, j'aime user de mon sens critique devant ces genres de situation. Mon souvenir de Léopold II date de la statue qui surplombait jadis le Boulevard du 30 juin à Kinshasa, que j'ai vue en juillet 66. Je garde en moi cette image impériale de ce sinistre criminel qui a construit sa richesse en souillant sauvagement le sol et le sang de nos ancêtres. Enfant, je n'avais rien à redire et avais même regretté de ne plus la voir plus tard.
Un hic toutefois pour accepter la véracité de ce message. C'est dû à ma formation peut-être. Formé dans un institut dédié depuis des siècles à la propagation de la foi, j'ai appris à interpréter l'évangile à partir des sources et à éradiquer toute exploitation hérétique qui s'en suivrait. On me dira naïf et ingénu. Mais je dispose d'un sens qui refuse de "racialiser" l'évangile dans son acception quotidienne. Comme tout texte, l'évangile peut être exploité dans un sens extrémiste, ce serait le cas de Léopold II. Si j'admettais que cela s'est passé ainsi et que ce texte est authentique, il me resterait une pléthore de questions sans réponses. Le tout-puissant roi des Belges avait-il vraiment besoin de ces instructions alors qu'ils disposaient de tous les moyens temporels pour maîtriser les colonisés? Ses milices ont-elles recouru à des justifications bibliques pour mutiler leurs millions d'estropiés et tuer leurs millions de victimes? Il faut aussi noter d'autre part que le Noir avait créé ses mythes de soumission à la force magique du Blanc, et ses dispositions à la terreur du fusil-canon qui dispersait par milliers des villages entiers.
"Que vos bouches exhalent partout l'odeur des oignons", une recommandation qui ne peut que perpétuer la sublimation du Blanc bien nourri, plein de lui-même, admirable et enviable quand bien même il puerait exécrablement. Symbole de suprématie et de conquête sur des pauvres sommés de mourir de faim, de maladie et de détresse. Couronnement de l'anfractuosité intestinale du Blanc venu aux tropiques pour dominer le pauvre Noir destiné à l'obséquiosité et à la géhenne des feux infernaux. Comme quoi, Dieu l'a voulu ainsi.
Je m'informerai auprès de collègues historiens pour y voir un peu plus clair. Je ne voudrais pas décriminaliser la colonisation, mais je voudrais savoir avec certitude ce qui s'est passé. Le révisionnisme n'est pas mon point fort. Alors pas du tout!

Au fil des lectures

Une année finit, une autre commence. L'heure est au bilan. On revoit l'année précédente, on projette l'année suivante. Ainsi tourne la roue de l'histoire.
Pour des gens qui comme moi ont un certain âge, c'est un plan de vie qui s'apprécie plutôt que le pan d'une année. On revit depuis des temps passés dans sa mémoire. Je suis de ceux qui se souviennent de certains détails que d'autres oublient aisément. C'est un don que j'ai reçu de ma mère, et pourquoi pas de mon père. Je m'étonne même de me souvenir de ces choses inutiles, inhabituelles qui ont survenu dans ma vie. Aujourd'hui cependant, il ne s'agit pas de moi, mais des autres. J'ai déjà trop parlé de moi. Un problème se pose tout de même: puis-je parler des autres sans parler de moi? En effet, je dévoile une face de moi-même chaque fois que je parle des autres, les loue ou les critique.
Je choisis de reconsidérer quelques lectures effectuées au cours de cette année. Commençons par la dernière. Making The Future (2012) du linguiste-philosophe Noam Chomsky me donne le format que prendra l'autobiographie qui sera tirée de ce blog. Le livre entier consiste en un collage d'articles de réflexion politique écrits entre 2007 et 2011. Un travail de collection, de juxtaposition, axé autour de quelques points thématiques majeurs qui forment les parties du livre. Opération facile de prime abord, mais difficile à agencer. Lorsque j'avais co-édité avec Victor Simpson New Perspectives in Contemporary Hispanic and Francophone Studies j'étais parti de l'idée que ce serait une entreprise facile et expéditive. La réalité s'est révélée contrairement à mes prévisions instructive, longue et astreignante. J'ai ainsi appris le noble métier d'éditeur. Sur le tas sans doute, mais encourageant.
La lecture des deux versions - anglaise et française - du Manuel d’approches bibliques en Afrique (2014) d'Albert Ngengi Mundele m'a retrempé aussi bien dans la science exégétique de mes études théologiques que dans l'actualité de l'herméneutique de textes à laquelle je m'adonne depuis bientôt trente ans. En soi, l'exégète qu'Albert est et le littéraire que je suis fonctionnons, suivant des perspectives différentes, sur un commun domaine textuel sous sa forme orale et écrite. Le domaine de compétence diffère certes, mais quelque part, nos bibliographies coïncident. Nous le savons tous les deux par nos différentes communications personnelles.
J'ai lu via notre département des livres de la collection Franco/polyphonie des Editions Rodopi. Entre autres Le théâtre de Koffi Kwahulé: l'utopie d'une écriture-jazz de Virginie Soubrier ou Une femme puissante. L'oeuvre de Marie Ndiaye de Daniel Bengsh et Cornelia Ruhe. Des études critiques sur des sujets aussi variés que le post colonialisme, la poétique ou l'esthétique, le transculturel, les tendances actuelles en littérature. 
Je pourrais poursuivre la liste, mais je m'arrête là pour aujourd'hui. Que réserve l'année prochaine qui se pointe dans trois jours?

27 déc. 2014

Buna bwa malembi

Birmingham 27.12.2014. Lelu mu pibaNicolas kisidant kasadi kuna hata diandi. Kaminio dimosi diatuki keti kweyi disi mututa mu vwatidi diandi, ku ndambwa shofela. Nzambi kena ngolu, kalwadiku, katutaniku mu bibende bia watidi. Kena mboti, mana vwatidi dia yandi dia fini. Shofela wuna kakangi nteti, mana watini, kakadi wakwati malafu. Nzambi buna kena ngolu, Nicolas wamongi numelo ye foto dia kaminio dieni, batemwe mpi batambwasi ni bazonza kwana bapudisi ni babatela. Mboti kena yandi mutu. Mana buna bwa malembi. Keba!

25 déc. 2014

L'épreuve s'est plutôt bien passée

Mercredi 24 décembre. Il est peu après 17h30 lorsque nous arrivons à l'église St. Francis. L'église est déjà pleine à craquer. Quelque trois - quatre cents personnes envahissent tous les espaces libres. A ces fêtes, on retrouve ceux et celles qui n'y viennent qu'une seule fois l'an. Les enfants sont happés dans le groupe de leurs congénères tandis que leur mère se place à quelque pas du lutrin; et moi au fond de l'église. La messe commence à 18h00, Chrystelle et Claver sont dans la procession; le stress monte. Claver lit le psaume responsorial: il lève la main pour indiquer aux gens la reprise de l'antienne. J'admire son sang froid quoique sa voix ne me parvienne qu'affaiblie. Le tour de Chrystelle est un peu plus sérieux: "Second Reading. Reading from the letter of St Paul to Titus." J'entends à peine les mots mais je connais le texte par coeur, à force de le répéter. Les fautes qu'on craignait n'existent plus. Bravo! L'épreuve du feu est réussie pour les deux. Leur instructrice me rassure qu'elle recourra à eux dans un proche avenir: "Please ask your little ones to raise their voice when they read". 
Congrats young guys for your first test in public: "Jesus is born today. Rejoice and celebrate!"

Joyeux Noël

25 décembre 2014

Meilleurs voeux de Noël à tous
Auguri di Buon Natale a tutti voi
Euch allen Frohe Weihnachten
Merry Christmas to you all
Nkinsi ya Lubutuku ya mbote na beno yonso.
Mbotama elamo na bino banso
Benu bosu lubutuku lwa Yezu lwa mboti

Kahiudi, Chrystelle, Claver-e

24 déc. 2014

Baptême de feu

24 décembre 2014. Aujourd'hui, on s'est réveillés dans une ambiance particulière de Noël.Claver et Madeleine doivent lire à l'église St Francis à la messe du soir pour les enfants. Comme ils se préparent à la première communion, ils ont été désignés pour lire respectivement le psaume responsorial et la deuxième lecture. Les textes à répéter leur ont été distribués depuis dimanche. Ils les répètent. En soi, les textes ne sont pas difficiles à part quelques mots que Madeleine a du mal à déchiffrer: "revealed" sort souvent comme "relieved"; "ambitions" comme "ambaditions" et "possible" comme "impossible". L'enfant lit sans lire vraiment. Les deux premiers mots lui ont été inconnus jusqu'à ce texte. "Possible" est par contre plus rare qu'"impossible". Claver s'en sort relativement bien. 
La cérémonie de ce soir sera vraiment un baptême de feu pour ces jumeaux de 8 ans. On les sent stressés, décontenancés. Comme toujours dans des pareils cas, je pense à ma propre expérience. Je n'avais jamais lu à l'église jusqu'à mon entrée à Kalonda. Et même là, j'avais lu une fois en kikongo lors d'un campement scout à Musaka. J'étais au CO fin 1970. Mais c'est en troisième littéraire (1972) qu'eut lieu ma première vraie lecture; et j'étais parmi les tout premiers du groupe à lire. A cette époque, ces lectures étaient attendues de toute la communauté des séminaristes comme un événement initiatique. Les "moyens" franchissaient ainsi le pas de la "majorité" puisqu'ils devenaient "grands" le semestre suivant. 
J'eus la chance de tomber pour ma première lecture sur un texte que tout le monde savait presque par coeur. Quelque trois années auparavant, un aîné nommé Ndula avait eu de la peine à le finir: "Sur ce sujet, nous aurons beaucoup de choses à dire, mais ce sont des choses difficiles à expliquer". C'était un jeudi, mais je n'ai pas la date en date. 
Nous sommes maintenant à deux heures de la messe. Chrystelle est déjà habillée de sa sa nouvelle robe - elle ne pouvait pas attendre - tandis que Claver s'amuse encore avec ses jeux. Ole les gars.

23 déc. 2014

Tel père tel fils

 Matin du 23 décembre 2014.
- C'est toi qui as déplacé les Tiki de Claver?
- Oui, je les ai mis à l'abri, sinon il les finira en deux jours.
Le tiki, c'est une sorte de biscuit au chocolat. Claver en mange beaucoup. De temps en temps, on lui achète un paquet pour lui faire plaisir. Et c'est le cas ce noël. Il s'est fait que, hier à mon retour de l'université, j'ai trouvé un paquet de tiki ouvert au bar de la cuisine. Par prudence, j'ai caché le paquet. Ce matin, à mon réveil, Claver m'interpelle:
- Daddy do you have my Tikis? 
- Nope!
- You hid them I know.
- Nope.
Quelque temps après, pendant que j'apprête le petit déjeuner, je lui apporte un tiki. Il le prend, mais au lieu de me remercier et de le consommer sans problème, il m'interroge irrité:
- Où tu as pris ça? Où est le paquet de tiki?
- Tu n'as pas besoin de le savoir. Chaque fois que tu en auras envie, tu me demanderas.
- Non, papa, c'est mon tiki.
- Oui, c'est ton tiki. Seulement tu le mangeras sous mon contrôle.
- Ah non, c'est pas juste. C'est pas toi qui as acheté le tiki; c'est maman. Donc montre-moi où est le tiki.
Quand il repart dans sa chambre, mécontent, je revois mon propre passé. La scène se passe à Kabwita avant que j'entre à l'école primaire. On est en 1963, je crois. J'ai déjà raconté ce récit. Je rentre dans notre maison un après-midi alors que Papa fait sa sieste. Béatrice me présente un ou deux quartiers d'orange bien murs. Mais avant de les consommer ou pendant que je les consomme, je m'enquiers de l'origine de ce beau nectar rare à cette époque:
- Où t'as pris ça?
- C'est papa qui m'a donné ça. J'ai mangé ma part et il a laissé ça pour toi.
- Où est-ce que papa a pris ça?
- Je ne sais pas.
A ce moment, je deviens menaçant: "Où est-ce que papa a pris l'orange?". Etc.
Papa a suivi toute la conversation depuis sa chambre et sans doute décelé le mobile de cette question. Il l'a aussitôt raconté à maman. Et ensemble ils me l'ont raconté beaucoup plus tard, je pense que j'étais déjà au petit séminaire. Comme pour dire que j'étais un garçon rusé. Comme Claver Jr actuellement. Tel père tel fils.

21 déc. 2014

Adieu Maman Antoinette Kingwaya

Le malheur n'arrive jamais seul. Un malheur peut en cacher un autre. Après l'annonce du décès de Maman Fala, l'abbé Kisambu m'en signale un autre: "Salut Claver et merci de ton réconfortant tél, j'ai oublié de te dire que maman Anto Kingwaya, dite maman condif, est  dédédée il y a  trois semaines. Sala mboti ti famille. Modeste"
Quoi dire? Silence, méditation et pieuse prière en mémoire d'une femme éducatrice et activiste-féministe qui vient de quitter ce monde. Maman Kingwaya a fait partie de nos proches à Bandundu, alors qu'elle a quitté l'enseignement pour embrasser la politique en tant que responsable régionale de la condition féminine. Puis elle s'est installée à Kinshasa où elle a activement participé à la Conférence Nationale Souveraine patronnée par Mgr Monsengwo. Je l'ai revue, la toute dernière fois, le 29 juin 1992 à l'évêché de Kenge. Je n'ai jamais oublié cette date.
Ce soir là, le Frère Simon Van Steen SVD et moi voyagions de Kinshasa pour Kenge lorsqu'autour de 18h nous avions été attaqués à l'arme par des éléments en uniformes au niveau des collines qui surplombent la rivière Kwango, à un endroit où la route était complètement abimée. Le chauffeur Zoro Musitu a réussi à les semer en fonçant sur eux. Les assaillants au nombre de 4 ou 5 ont tiré sur nous. Sans dégâts, Dieu merci. Arrivés à Kenge, nous avons croisé à l'évêché Maman Kingwaya et son frère qui revenaient, à bord de deux jeeps, du Kwilu où ils avaient pris part à l'enterrement de leur chère maman. Bien que nous les ayons prévenus du danger, la conférencière tenait à assister aux assises de la CNS le lendemain. Ils ont continué et ont été pris d'assaut par les mêmes bandits armés qui les ont dépouillés de biens (argent ou bijoux). Ils ne s'en sont sortis que grâce à leur chauffeur qui a bifurqué sur le commissariat de Masina à Pascal, obligeant ainsi les bandits à sauter du véhicule et à fuir. Un voyage de cauchemar!
Depuis, j'avais sporadiquement de ses nouvelles par des amis. J'ai encore eu l'occasion de lui parler au téléphone alors que je me trouvais à Matran, chez l'abbé Modeste en juillet 2013. Ce jour-là, j'avais dans l'après-midi visité la tombe de son fils à Fribourg-Schönberg. J'avais appris qu'elle était à la retraite et qu'elle tenait bon. Malheureusement, on ne s'est plus parlés alors que je dispose jusqu'à ce jour de son numéro de téléphone dans mon portable. Ainsi va la vie, j'entends, la vie réelle.
Maman Antoinette, kwenda mbote! Lufwa kele nzila ya beto yonso. Mfumu Nzambi kuyamba nge na kimfumu ya zulu.


Paix à l'âme de la maman de Benjamin

Je viens, au cours d'une conversation avec l'abbé Modeste Kisambu, la mort et l'enterrement de la maman de l'abbé Benjamin Fala. Paix à son âme! Je n'ai eu l'occasion de la voir qu'une seule fois, le jour de notre ordination sacerdotale (7.8.83). Mes condoleances à la famille éprouvée, que le Seigneur soit leur seul consolateur en ce temps difficile.
Maman, kwenda mbote! Vanda na ngemba na bwala ya Mfumu Nzambi.

Les enjeux d'une réforme catholique

(La réflexion suivante était écrite du temps du symposium sur le mariage. Je n'y ai ajouté que le dernier paragraphe afin de le remettre à jour).

L'aggiornamento amorcé jadis par Jean XXIII et poursuivi par Paul VI avait accouché au-delà du concile Vatican II d'une souris: Monseigneur Lefèvre; et d'un schisme douloureux qui a vu ce dernier consacrer deux évêques contre les normes du droit canon. L'église missionnaire voulue par les pères conciliaires n'a pas résolu tous les problèmes du monde contemporain tels que le divorce et le remariage, le célibat des prêtres, les pilules et contraceptifs, l'avortement, le contrôle des naissances, l'homosexualité, la pédophilie, la prostitution, etc. Autant de sujets sur lesquels l'église demeure rigide alors que l'évolution du monde va de l'avant. Certains théolgiens se sont vus retirer la missio canonica pour avoir reproché à la hiérarchie son anachronismes sur des sujets d'actualité ou pour s'être placés du côté des pauvres dans un contexte marxiste. Des activistes ont été muselés pour avoir osé transgresser l'ordre canonique en vigueur. 
Aujourd'hui, l'église est à cette croisée de chemins. Elle a à sa tête un pape très charismatique et moderniste, prêt à transgresser les "normes" afin de mettre l'église au milieu du village. Le Pape François qui refuse le luxe doré des palais pontificaux pour se contenter d'un modeste bureau et d'une chambre sans éclats a le courage d'interroger le bien-fondé de l'église dans un contexte moderne où la liberté est prônée comme vertu sacrée. Il a le courage de répondre aux uns et aux autres dans un langage simple, concret et humain. C'est cela sa grande révolution qui élève contre lui les conservateurs purs et durs de la tradition catholique. Il est surprenant de constater l'écart qui le sépare de son prédécesseur immédiat. Un "mondialiste" a remplacé un "conservateur", dans une harmonie parfaite. Il y a certes des défections dans la hiérarchie suite à de telles prises de position, mais le gouvernail demeure braqué vers la réforme.
Tous les sujets sont désormais discutés avec une meilleure ouverture d'esprit. C'est ce qu'il faut retenir de ce pape. Le jour de son anniversaire a lieu place St Pierre un immense Tango. Impensable dans l'histoire de l'église. Le jour de son anniversaire, du côté des Amériques, Barak Obama et Raoul Castro décident de mettre fin à cinquante ans de rupture diplomatique entre les US et Cuba. J'y reviendrai.

19 déc. 2014

Joyeux Anniversaire Muteba

19 décembre. C'est l'anniversaire de l'abbé Modeste Kisambu. Je l'ai souvent manqué, mais cette fois, j'ai décidé de remettre la pendule à l'heure.
Bon Anniversaire Muteba! Puisse le Tout-Puissant t'accorder paix et joie, santé et bonheur, grâce et zèle dans l'exercice de ton ministère sacerdotal.
A Yakala! Zayi ngeyeni hana twakalaka. Kola!
C

La journée d'hier

17 décembre. J'avais programmé mon réveil pour 4h30 car je devais accompagner un collègue ougandais à l'aéroport. Le départ était prévu pour 5h00. Malheureusement, comme souvent dans de tels cas, j'ai dû me réveiller presque une heure plus tôt de peur de rater le rendez-vous. Puis, j'ai attendu. A 5h15, je l'ai appelé. Réponse: "We are locking the house. We should be by you in about 10-15 minutes maximum". Ils ne sont arrivés qu'à 6h05. Commentaire: "My apologies. I am accoustomed to traveling like that. Last minute is part of me. I can't help it". Le trajet vers l'aéroport a exceptionnellement pris quelque trente minutes. On a roulé à tombeau ouvert. Ils étaient les derniers dans la queue d'attente. De là, je suis retourné à la maison.
Deux heures plus tard, je me remets en route car je dois assurer la permanence dans mon bureau et dans mon département en ces temps d'examens. Clavère et les enfants continueront pour un rendez-vous médical après m'avoir déposé à l'université. En route, Chrystelle: 
"- Papa, je peux avoir ton téléphone?
- Non, que je dis, je conduis; impossible de le sortir de ma poche.
Deux minutes plus tard, nous sommes obligés de nous arrêter et attendre que le trafic reprenne:
"- Maintenant, donne-moi le téléphone car tu ne conduis pas.
- Mais je conduis.
- Non, tu ne conduis pas. La voiture ne bouge pas.
- La voiture ne bouge pas, mais le moteur est allumé.
- Non, tu ne conduis pas, Papa, " renchérit Claver Jr lui intéressé de jouer avec le téléphone. 
Il est 11 heures lorsque j'ouvre mon bureau. On doit se retrouver à 16 heures parce que leur maman a à rencontrer une dame à 16h30. Ma tache consiste à les occuper. Je décide de les amener jouer au parc le plus proche de Cheffette, un établissement genre McDonald, où ils peuvent glisser sur des toboggans, monter des marches, manier des gouvernails, grimper sur des cordes, etc. J'en profite pour corriger des copies d'examens. Une heure, ça passe vite. La queue étant trop longue pour que je m'attarde à leur acheter de l'eau, je les embarque pour une station d'essence près de là. Contrairement à mes prévisions, chacun voudrait prendre la bouteille moyenne plutôt que la petite. Pour les départager, je propose un quiz. Qui trouve la réponse obtient la bouteille désirée. Claver trouve le quiz injuste, car seule Chrystelle qui a une bonne mémoire de personnes peut y répondre; malgré cela, elle n'a pas réussi. Lasse d'attendre, cette dernière opte pour la petite bouteille (celle-là même que j'avais prise pour elle) et le jeu est clos.
Il est peu après 19 heures lorsqu'on retourne à la maison.


16 déc. 2014

Très sincères félicitations Juge Antoine Mindua

13ème session de l’Assemblée des Etats Parties au Statut de Rome à New York
La Coalition Nationale pour la Cour Pénale Internationale de la République Démocratique du Congo (CN-CPI/RDC) se félicite de l’élection d’Antoine Kesia-Mbe Mindua, candidat présenté par la RD Congo, au poste de juge à la CPI par les membres de l’Assemblée des Etats Parties à sa 13ème session, qui se tient actuellement à New-York aux Etats-Unis. Le juge Antoine Kesia-Mbe est l’un de six juges que l’Assemblée des Etats Parties au statut de Rome ont élu pour remplacer ceux dont le mandat expire en mars 2015.

(Source: http://www.afriqueredaction.com/2014/12/un-ressortissant-congolais-elu-juge-a-la-cour-penale-internationale.html)

Félicitations, Antoine-Didier, de représenter, par ton élection à la CPI, l'excellence à laquelle nous avons été formés dès notre jeune âge. Un grand honneur pour Kalonda! Puisse l'Eternel t'assister dans cette lourde charge.
C

15 déc. 2014

L'enterrement de Mama Kibangu


Maman Kibangu a été enterrée samedi dernier, 13 décembre 2014. Paix éternelle à son âme! Pendant près de deux heures, j'ai parcouru les photos gentillement diffusées sur Facebook par le père Serge Tsunda, SVD. Quelle émotion que de revoir le portrait de la défunte! Quel enterrement où j'ai retrouvé beaucoup de visages connus et aimés!
Merci à Serge d'avoir posté ces photos qui nous ont en quelque sorte unis à ce douloureux événement. Beaucoup de personnes présentes y ont été par sympathie pour la défunte, mais aussi par reconnaissance pour son feu frère. A moins de me tromper, j'ai été surpris de n'y voir aucun de ses ordonnés, mis à part mon cadet Rigo Kabwita. J'ai par contre reconnu Soeur Brigite Mbambu. L'assemblée était représentative de toutes les couches de la population.
Maman Kibangu a pu atteindre un siècle d'âge. J'ai la réponse car je me suis souvent posé la question de son âge. Je me souviens qu'une fois, Mgr M'Sanda m'a révélé qu'il y avait un grand écart entre sa "maman" et lui. Après les festivités du jubilé sacerdotal de Mgr fin juillet 86, j'avais effectué un voyage Kenge-Kinshasa avec elle qui retournait chez elle. Je me rendais d'urgence à Kin pour des examens radiographiques de crâne, car j'avais quelques jours auparavant connu un accident en moto (vespa) au carrefour en delta de la N1 à Kenge. En plus, l'accident a eu lieu alors que je faisais des démarches pour l'enterrement d'une nièce ou un neveau à elle, un enfant de feu Papa Missioni. Comme la mort réunit les destins et croise les gens!
Louange soit rendue à Dieu pour ses merveilles. Que l'âme de Maman Kibangu repose en paix! Et condoléances à sa famille biologique et à notre communauté éprouvée.



13 déc. 2014

Kenge: Qui en est l'auteur?

J'ai trouvé dans mon "junk mail" ce message-tract de Maker Maditkwo (?) adressé à l'Evêché de Kenge. Jugez surtout le niveau de langue, le style, l'expression et l'argumentation.

QUI A RAISON QUI A TORT
"Félicitations parce que vous avez compris finalement qu’il était de l’intérêt du diocèse que ce mercenaire cesse d’être le VG du diocèse. Pourquoi avez-vous attendu pendant si longtemps ?
Nous ne comprenons pas votre mensonge sur sa démission : S’il avait réellement démissionné depuis le 15 juillet vous le dites pourquoi vous l’avez maintenu dans les affectations du 30 aout 2014 où son nom est en gras et-ce à la première page ? Vous l’avez même muté de BDD pour l’Evêché de Kenge, donc à vos cotés.  Il vous a donc désobéit ? Quel est le mobile/cause de sa lettre de démission et pourquoi nous l’avez-vous caché ? Les fameuses mises en places ont été faites à huit clos par vous deux par après modifiées par vous tout seul. Vous l’avez déçu concrètement donc car il nous a dit que vous ne l’avez pas consulté. Voyez-vous jusqu’à quel point vous avait-il déjoué ? Vous êtes alors tous deux des menteurs et aventuriers. Franchement des menteurs. Nous allons vous démystifier. Ceci ne serait jamais le cas lorsque vous pouviez dès sa nomination revenir à la raison. Tout genre de conseil-critique-recommandation-propositions ne vous ont délibérément pas été les bienvenues. Vous vous êtes abusivement fait sourd d’oreille. Et voila maintenant, où en sommes nous ? Vous avez largement et inutilement été têtu ! Merci de nous dire quel est son bilan.
Son vrai problème réside au niveau de départ de la paroisse St Hyppolite où vous-même l’avez promis resté jusque le jour où le coq aura des dents.
Quelle est actuellement sa nouvelle adresse ? N’est-ce pas : DESTINATION INCONNUE ? Voulez-vous nous faire croire que le droit canonique ne prévoit aucune sanction à son endroit ?  Nous nous souvenons qu’il nous a à plus d’une fois souligner que : Kenge est tellement pauvre que lui n’y habiterait plus jamais à aucun cas. Il s’y tient donc. Nous sommes impatients d’attendre la sanction qui en résulte tel que l’ont écopé INJUSTEMENT d’autres prêtres, plus distinctement du coté Nord du diocèse.
Et qui le remplace maintenant que vous êtes devenus pratiquement inaptes ?  Etant donné que la vraie raison de mettre un VG dans ce diocèse vous fut sacrée et demeure pressante. Sans doute, Onésime MUYEMBE ne sera jamais outre à jamais remplacé par un autre Onésime MUYEMBE. Ne voyez-vous pas que puisqu’il a démissionné, vous devrez aussi bien suivre son exemple et nous laissez en paix ? Au lieu de partir d’un VG à un VG ? Quelle impuissance alors de votre part ? Comment feriez-vous la tournée obligatoire des festivités de la naissance de notre Seigneur Jésus Christ qui vous attendent dans quelques dix jours seulement ? Qui le fera à votre lieu et place, vous étant maladif eternel ?
Nous ne comprenons également pas des expressions floues contenus dans votre lettre autour de sa démission tel que : le service de nos frères humains dans notre Mère l’Eglise.
 Nous vous aimons." (SIC)

(Email du 12 décembre 2014 de Maker Maditkwo: m.maditkwo@gmail.com )

10 déc. 2014

Au travail Monsieur!

Rien de tout ce que j'ai programmé cette semaine n'a marché jusque là. Des circonstances indépendantes de ma volonté ont fait que mes projets avortent, ou presque. J'ai par exemple entrepris la finalisation de ma dernière intervention au symposium de philosophie, je n'ai pas réussi à éditer une seule ligne. Faute de temps? Paresse ou manque d'intérêt? Je voulais faire du sport au gym ou à la plage, j'y ai renoncé. Pas de motivation. Oui, c'est le mot. J'attends que quelqu'un me motive. En RDC, motiver est synonyme de corrompre. Je suis très sérieux. Tout bon Congolais te le dira sans hésiter. J'attends donc qu'on me "corrompe" pour que je pratique à nouveau ma culture physique.
Demain, j'ai une réunion de trois heures soit de 9 à 12h, le genre de réunions où l'on parle beaucoup plus pour parler que pour résoudre des problèmes. Au cours de ces réunions, des gens monopolisent la parole afin de faire passer leurs opinions. Cela leur réussit. Après tout, ce qui compte à ces réunions, c'est parler. Donc on va parler pendant trois heures, sans interruption ni obstruction. On va donc parler pour le plaisir de la langue et de la loquacité. Rien de plus. Les problèmes seront à peine abordés qu'on décidera de n'y plus revenir. Cela s'appelle clôturer des dossiers. Dossiers de Noël afin de recevoir tout serein le Divin Enfant.
Voilà. J'ai trouvé comment sauver ma semaine. Encore un mot difficile: "sauver". A l'époque où les machines électroniques IBM ou Brother étaient à la mode, j'avais effectué un déplacement de Bonfol à Delemont soit une bonne trentaine de kilomètres rien que pour sauver mon texte sur une carte mémoire. Il s'agissait de vider la machine, sauvegarder le contenu sur la carte, et continuer d'écrire le texte. Comme je ne l'avais jamais effectué auparavant, "sauver" m'était inconnu avant de devenir un terme informatique familier. Combien de textes n'ai-je perdus au cours de telles opérations? Combien de fois ai-je dû reprendre tout un chapitre de ma thèse que j'avais par mégarde annihilé. On vient de loin. Oui, c'est décidé. Je sauverai ma semaine. Sur une carte mémoire s'il le faut.
En ces temps-ci, tout est miniaturisé. Il y a à la place de lourds PC des laptops, portables, téléphones, iphones, ipads, etc. Les gros disques, les disquettes et autres cartes mémoires ont disparu au profit des USB, clés, sticks, mediadiscs et autres gadgets qu'on ne se gène pas d'exhiber, attachés au cou, modernité ou mondialisation obligent. Il n'est plus besoin de se surcharger. Le téléphone portable - smartphone - peut seul faire office de bureau et de secrétaire.

9 déc. 2014

Papa Petelo

Fin 1984. L'évêque de Kenge revient d'Europe après un mois d'absence. Papa Petelo va lui présenter des fleurs: "Ah Mbuta-Nganga, mbote mpila nge me vutuka na bwala na nge. Beto awa kuvandaka kufingila mpimpa mwini sambu na kukunda nge". (Mgr, c'est bien que vous soyez revenu. Nous ici attendions nuit et jour afin de vous glorifier). J'ai éclaté de rire au point d'embarrasser l'évêque qui s'est contenté de sourire et de le remercier. Cette histoire vieille de trente ans, et que j'ai complètement effacée de ma mémoire, me revient à l'esprit pendant que je réfléchis sur les raisons avancées pour justifier la révision constitutionnelle dans des pays africains.
Dans ce monde, il y a des gens dont la vie consiste à acclamer d'autres, plus doués ou puissants qu'eux. Papa Petelo était de ceux-là. Vie de subordonné, vie destinée à chanter la gloire de ses chefs. Très sérieux dans la sauvegarde des biens, cet ouvrier était le plus fidèle de tous. Toujours présent quoique pas forcément efficace, il faisait partie de l'évêché comme un meuble. Il défendait les biens de l'évêché, parfois prenant position contre ses pairs. Les maçons avaient l'habitude de détourner des sacs de ciment pour leur propre besoin, mais Papa Petelo se désolidarisait d'eux et les dénonçait sans hésiter.
Un homme trop modeste. Un soir, feu abbé Jean-Pierre lui avait demandé:
- Papa Petelo, sambu na nki nge me kwelaka ve? (Pourquoi ne t'es-tu jamais marié?)
- A Tata Missie Lubé, kana mono kumona nkento, nge ta kwedila mono yandi? (Mr. l'abbé, si je trouve une femme, tu vas l'épouser pour moi?)  Entendez: verser la dot.
La suite ne me revient pas. Je préfère ne pas l'aborder. Mais on disait de lui qu'il avait été une fois marié mais que le mariage n'a pas tenu longtemps à cause de son caractère viscéralement célibataire. Il n'aurait pas supporté la présence trop encombrante d'une seconde personne dans son espace vital. Je me souviens clairement de sa signature kilométrique. A chaque paie mensuelle, il signait son livret de paiement: il continuait de signer jusqu'à ce que je lui dise d'arrêter. Des fois, il en profitait pour glisser un message, une plainte ou une réclamation. Avant chaque fin du mois, il empruntait de l'argent chez moi. Pour une raison ou une autre Petelo était toujours endetté chez moi.
Fidèle parmi les fidèles, Petelo exhalait une certaine naïveté mêlée d'une dose de ruse et d’ingénuité. Une fois, à l'occasion d'une fête du MPR, je lui avais demandé pourquoi il n'était pas aux manifestations: "A Tata Missie Lubé, mono ke kwenda makinu yina ve; makinu bo ke kinaka kuna kele mbote ve ata fioti." (Mr. l'abbé, je ne vais jamais à ces danses; les danses qu'on exhibe là ne sont pas bonne du tout).
A l'ancien évêché, il avait fait passer quelques moments d'embarras à notre ami séminariste Damien Pakasa Mafema qui avait osé frapper à la porte de l'évêque sans son autorisation: "Awa nge me kukokotila, yo kele luzitu e nki?" (Maintenant que tu as toqué, est-ce de la politesse ou quoi?). Surpris par cette interpellation, Damien n'avait pas pu se défendre jusqu'à ce que le chauffeur Jean Mvwabika est intervenu.
De sa vie, il n'avait connu qu'une seule rivière, la Bakali. Une fois qu'on l'avait transporté à Bonga-Yasa pour une opération d'"adeni" (entendez: la hernie), il appelait toute rivière traversée Mbakadi. Or il y a les ponts de Konzi, Inzia, Luie et le bac sur la Mokamo: toutes ces rivières étaient des Mbakadi, selon l'abbé Albert N'Koy qui était aussi du voyage. Ce fut le voyage le plus long de sa vie, j'en suis sûr. Témoin du déplacement des installations missionnaires de Kenge II à Kenge I fin 50-début 60, ce baptisé de Mukila évoquait avec fierté certains noms SVD: Mgr Jan v.d. Heyden, Mgr Hoenen, "Van Golop", Otte, etc. Et bien entendu Masela Matsutsusu (Soeur Marie-Robert des Salésiennes), ma précédente à l'évêché.
Et chaque fois que mon père passait par l'évêché, ils se parlaient; je n'ai jamais trop su de quoi. De temps en temps, je lui offrais un petit cadeau symbolique pour lequel il se courbait en remerciements. Selon ce que j'ai appris, il serait mort avant l'an 2000. Paix à son âme!

Noël dans deux semaines

C'est l'euphorie. Euphorie non pas pour célébrer la naissance du Fils de Dieu, mais pour bénéficier de quelques cadeaux liés à cette fête qui coïncide avec la fin de l'année civile. Cette euphorie est présente un peu partout. Certaines familles se permettent de fabuleuses dépenses en renouvelant leur garde-robe et les effets éléctro-ménagers, en repeignant la maison, en changeant les rideaux et les embrasses, en redécorant l'intérieur. D'autres excellent dans les plaisirs du boire et du manger: le bon vin et la bonne chair. La dinde de Noël est achetée en même temps que les guirlandes qui vont sublimer l'espace de la concession familiale. Et la robe dernier cri, les griffes de la mode, la veste ou le costume de la plus grande maison de couture ainsi que d'autres tralalala vont orner le décors familial. C'est Noël.
La messe de minuit ou du matin, on y pense à peine. Toute l'attention est prise par les choses du monde, les choses matérielles. On pense plus au paraître, on pense plus à impressionner le voisin afin de le rendre jaloux des biens qu'on étale avec un malicieux plaisir. Dans la recherche éffreinée des biens et des cadeaux, cette période est propice aux vols de tout genre. Ce que les gens ne peuvent s'acheter mais dont ils ont absolument besoin, ils  l'acquièrent par des moyens malhonnêtes ou le volent simplement. Combien de fois dirais-je, que l'on ne connait jamais complètement l'origine des biens qui sont ostensiblement exposés à la vue des passants et des amis. Et surtout, il ne faut jamais oser s'en enquérir. Ce serait crime de lèse-majesté.
Bref, une euphorie matérialiste et eudoniste qui n'a rien de spirituel. D'aucuns vous diront que Noël est davantage une fête commerciale, mondaine et culturelle. Temps idéal pour faire du business et du shopping. Des entreprises s'ouvrent juste pour le temps de Noël, réussissent à écouler leurs produits et atteignent aisément leur chiffre d'affaires annuel. Ce n'est pas un défi extraordinaire. 
Noël se fête en famille, entendu chez soi. C'est normal. Pour les Barbadiens, c'est normal que des frères, soeurs et autres parents reviennent des Etats-Unis, d'Angleterre ou du Canada, pour fêter Noël ici. La question qui leur vient naturellement  à l'esprit: "Et toi, tu voyages/ ne voyages pas?", oubliant que je viens d'un pays très lointain. Et comme si cela ne suffisait pas: "Est-ce que vous fêtez Noël chez vous? Quels sont les plats ou produits spéciaux de Noël dans votre pays? Nous on a le conkies, le sorel, etc. " En général, je donne à de telles questions des réponses qui viennent spontanément en tête, selon l'ambiance du moment.

8 déc. 2014

8 décembre - L'immaculée conception

Un dogme de l'église catholique que l'immaculée conception. Très disputé même parmi les théologiens les plus réputés. Nous sommes au coeur de l'identité de Jésus. L'immaculée conception confirme le fait que la Sainte Vierge a conçu son Fils par l'action du Saint-Esprit, tel que l'a annoncé l'Ange Gabriel à Marie, alors fiancée à Joseph. D'autres vous diront que Jésus est né comme tout enfant, au sein d'une famille ordinaire et que Marie et Joseph ont eu d'autres enfants. Ce qui contredit la théorie du fils unique et de la virginité. Au-delà de ces affirmations, c'est de la personnalité même de Marie qu'il s'agit. Qui est-elle? Je laisse le soin aux mariologues de tout bord d'y répondre.
Quant à moi, je pense en ce moment à mon prof. de "De Revelatione", le père Sante Di Giorgi qui m'a incité à approfondir ma connaissance des hérésies des premiers siècles, condamnées jadis par les premiers conciles. Le concile d'Ephèse (431) a proclamé "Maria, Theou Tokos", etc. Sous l'égide de Pie IX, le dogme de l'immaculée conception a marqué un point final à des disputes séculaires et consacré un culte marial solidement enraciné dans la tradition catholique.
Plutôt que d'évoquer Jean-Paul II, je préfère me rappeller d'un modeste grand homme d'église: Alfred Mayamba, catéchiste et agent d'évangélisation à la MC Kimbau. Cet homme de Dieu a marqué la vie pastorale de Kimbau dans les années 40, 50, 60 et 70. Kha Lufweleti est mort pendant que j'étais au grand séminaire. Paix à son âme! Toute personne qui est passée à Kimbau entre ces années doit l'avoir connu ou croisé sur l'espace de la mission. Observant les changements de moeurs qui survenaient dans le monde, il a dit un jour de 1969 à mon père: "Les jeunes de ce temps ne respectent plus rien; ils jouent partout, voire ils passent sans s'incliner devant la statue de la Sainte Vierge Marie". Il avait prononcé le nom de la SVM en baissant la voix en signe de profonde vénération. Pour ceux qui connaissent Kimbau, il s'agit de la grotte de la SVM située entre le camp des soeurs et l'église paroissiale. Le brave catéchiste était scandalisé par l'attitude désinvolte des jeunes.
"Je vous salue Marie, en Dieu vous avez cru// à Dieu vous avez plu; Vierge qu'il a choisie, pour nous donner Jésus".






5 déc. 2014

Hommage au Père Henri Schwis SVD

Pater Heinz Schwis SVD (1934 – 2014)

Un autre monument de la mission SVD quitte ce monde: le père Henri Schwis. Paix à son âme! Ce n'est qu'aujourd'hui que je viens d'apprendre la mort à St. Wendel (RFA) du père Schwis décédé le 23 novembre 14. Etonnant que je n'aie pas ouvert www.steyler.de ces deux dernières semaines!
J'ai connu le père Henri dès mon entrée au petit séminaire, en 1969. Je ne me souviens pas l'avoir vu avant le chemin de Kalonda alors qu'il était vicaire à Matari. Dans sa grande bonté, il assurait le transport des petits séminaristes de Matari à Kalonda de même que le faisait le père Everard Leferink pour ceux de Kimbau. A l'époque, le camion Magirus de Théo n'assurait le transport que des séminaristes du nord du diocèse. Les pères SVD s'occupaient de transporter ceux de Kimbau-Matari à l'aller comme au retour des vacances. Dès lors, lorsqu'il avait les séminaristes, il s'arrêtait à Mutoni chez mes parents.
Le premier souvenir que je garde du père Schwis concerne non pas la religion, mais curieusement le football. Je n'avais jamais de ma vie suivi à la radio un match de football de coupe du monde. Ce soir-là de juin 1970 l'Allemagne jouait la demi-finale de la coupe du monde contre l'Italie. Le match est allé aux prolongations. Comme les pères et les abbés du diocèse étaient en réunion à Kalonda, le père Schwis, ce soir-là, interrompait la réunion pour s'enquérir du score tellement il était emballé par la rencontre. Je le revois encore tout triste à l'issue de ce match où la Manschaft a été éliminée. 
Depuis, je l'ai revu à plusieurs occasions. J'étais informé de son travail avec les animateurs pastoraux et ruraux dans la brousse de Matari et du diocèse de Kenge; depuis l'évêché j'étais témoin de son travail dans le domaine du développement et de la lutte contre la faim, la pauvreté. De Matari, il a été muté à Kimafu avant de rejoindre Kenge Saint-Esprit. Nous sommes une fois passés à Kimafu en son absence. Très lié au Père Triebel, il formait une équipe de travail admirable lors des sessions qu'ils organisait à Ito comme à travers le diocèse. Je le connaissais déjà certes, mais je l'ai mieux connu comme collègue à Kenge. Il nous est arrivé d'organiser ensemble des journées des jeunes à Saint-Esprit. Je publierai une photo prise à cette occasion si je la retrouve. Lorsque je l'abordais en allemand, il me taquinait, comme le père Meffert, en soutenant que mon accent était du Sud.
Le père Schwis avait un franc-parler sans duplicité; il était de ceux, rares, qui exprimaient ouvertement leur désaccord à l'Evêque. Par exemple, lorsque l'évêché avait rendu public le rapport quinquennal rédigé à l'occasion de la visite ad limina de 1982, le père Schwis y ayant remarqué des inexactitudes n'a pas hésité de dire à l'évêque: "Ba...ba... bababa... eh... Rapport na beno me fuluka na luvunu". Ce qui n'était pas du tout du goût du Prélat. J'étais témoin de cet événement. 
Missionnaire infatigable, toujours en mouvement à travers sa brousse, voyageur intrépide, le père Schwis a vraiment contribué à l'implantation de l'église à Matari, à Kimafu et à Kenge I. Passionné de la brousse, organisé et discipliné, cet apôtre a vraiment réalisé le charisme d'évangélisation de la SVD. Un excellent agent de l'évangile dont l'idoneïté ne souffre d'aucune ambiguïté, un témoin de la parole et de l'oeuvre divines, voilà en bref ce qu'a été, selon moi, le Père Henri Schwis. Merci, Pater Heinz, pour tant de zèle, de diligence, d'amour et de charité dont tu as été le modèle. Puisse l'Eternel t'accorder la couronne réservée à ses élus.
Je m'unis à la prière de la SVD Congo et de sa famille biologique pour rendre grâce à Dieu et hommage à ce grand pilier de la mission. Père Henri, Kwenda mbote na bwala ya Mfumu Nzambi. Ngemba na moyo na nge!



Père Henri Schwis (1934-2014) in memoriam

Email du P. Séraphin à l'abbé Henri Tamuzi:
"Henri,
Bubu kitanu na nkokila (18h), les SVD à Kin vont dire une messe en mémoire de Père Henri Schwis, le missionnaire héroïque, dont j'ai pu apprécié la profondeur du travail durant mes 5 mois à Kimafu avec Abbé Fidèle Pindi. Je suis pris dans une session SMA à Mbiti, je reste en union de prière avec eux pour implorer la vie éternelle pour ce pilier du diocèse.
Union de prière,
PKS"
 
Email du 26 novembre de l'abbé Tamuzi au P. Séraphin Kiosi;
 
"Merci et bonjour cher Seriph,
"Oui, le seigneur a fait pour nous des merveilles, Saint est son Nom".
Hier, j'ai reçu un message du père Lesch nous annonçant le décès du père Henri Schwis, "ce broussard héroïque" cherchant partout où il a été au diocèse, le développement de tout homme et de tout l'homme, mapapa na makulu dikaya na munoko, volant na maboko, wa yenda dans nos brousses. "Il a combattu un bon combat, il achevé sa courde, puisse l'Eternel le combler de ses bienfaits". Oui, des pages d'histoire de Kenge qui se tournent et qui doivent continuer à tourner avec des"abbés Noirs". Souvent dans ma tête, je revois les abbés, Makula, Ngara, Binton, Belengi, Makolo, Luhangu, Kilunga et M'sanda venant en réunion à Kalonda...vers les années 1968 et 1969.
Prions pour notre clergé. Nous savons que les réalités socio-économiques ne sont plus les mêmes pour entretenir tout ça, mais nous devons continuer à inventer et survivre.
Pour Nico, comme convenu dès qu'il y aura du neuf, je t'en tiendrai au courant.
A bientôt. En toute fraternité.
Tien, Enrico "
 

Les jeux des yeux de scène

Je pense à n'importe qui. Me voilà à Kimbau. Le chef Mbau de Mulopo Tsunda ou Ponton se déchaîne avec sa cour de danse traditionnelle. Parmi ces gens, je reconnais le papa de Mutombo Maringuoin. Un monsieur. Impressionnants sont ses gestes, impassible est son regard. Plus sérieux que le chef lui. Lui, c'est le mulopo du feu chef Kiba, si ma mémoire est bonne. Ce regard, je l'avais connu enfant; je l'ai retrouvé adulté à l'occasion de nos prémices le 10 août 83. En fait, cet homme au regard de sang est un notable de Ponton, qui protège l'autorité du chef.  
Cela me rappelle le regard sanguinaire de Chaka, l'irréductible figure zouloue. Avec la particularité que le regard du Bayete est criminel, inhumain. Sur la scène de la vie et du pouvoir, le chef porte un regard condescendant et autoritaire sur les siens. C'est ce regard qui fait de lui le maître de l'univers après Umzikulu. Ce qui se voit est sous son pouvoir. 
Me voilà de nouveau à Kimfingia. Juillet 1969. Mes amis de jeu sont mis dans un camp initiatique. Des villages voisins, de Kimbela, Kasenzi et .Mukomba, de Makiosi, Kingwanga, Kikweku, Muteba, Kimwambu, Kisala, Kimwela, Kingwadia, Kitundu, etc. sont venus des jeunes comme des vieux pour la grande célébration. La veille, c'est la soirée du mukamba: "E Mukamb'e lelele lelele, mukamb'e, lelele leele".C'est la soirée carnavalesque où tous les sens se débrident, où toutes langues se délient, et où la pudeur fait place à l'insolence. Cela en toute impunité. Soirée de vérité, soirée de déliquescence des moeurs et des sens! Et les yeux prennent le visage de la scène. Le jour de la circoncision a lieu la parade des futurs circoncis qui offrent un spectacle de kutamuka ye misesa, avant qu'on les transporte sur des fusils vers le camp d'où ils ne reviendront que plusieurs semaines plus tard. Tout de suite après, c'est les yeux imprégnés de sang des tsiapula qui impressionnent. Les circonciseurs reviennent avec leurs samba: "A samba, a samba, mwana Masala " criait Kha Kahiudi, mon grand père et mon maître es sciences. Quel défilé où l'effusion de sang atteint l'euphorie du délire. Et moi, enfant de douze ans, j'observe de mes yeux "scolaires" ces traditions dont je comprends la signification symbolique mais auxquelles je demeure quelque peu étrangers. Je suis terrorisé par la scène; mon grand-père me prend, m'amène au camps pour m'initier: "Mu kataku". L'enfant de la cité peut bénéficier des bienfaits de nos traditions; il risque d'être stérile (sic) s'il ne subit pas cette cérémonie. On pose un pied sur le sol alors que l'autre demeure en haut, et à chaque touche sur le sol, on doit frapper fort. Un rituel très stylisé que je n'ai vécu que cette seule fois. Entre temps, on vous souflle par la bouche des produits sur le front, sur les épaules, sur les mains, sur la poitrine, tout en changeant de pied car les deux pieds du sacrificateur ne peuvent pas se poser en même temps sur le sol. Les yeux de scène ont vu ce jeu, et l'ont intériorisé jusqu'à ce jour.
Me voilà de nouveau à Kenge I. 1966. Chaque samedi se tiennent des danses folkloriques de Batshioko. Moyo ewa, mwana wahinduka? Kha. Des scènes qui faisaient peur aux enfants que nous étions. Car rien qu'à les voir, les minganji étaient parés de raphia, avec des maracasses aux pieds et aux bras qui rythmaient leurs pas cadansés. Représentations fétichistes car désormais les . danseurs étaient supposés être possédés par les esprits supposés méchants. Et les enfants étaient obligés de s'en éloigner.
Mes yeux ont vu ces scènes et s'en souviennent. Les jeux des yeux de scène!

3 déc. 2014

Madeleine-Chrystelle et Claver ont huit ans

3 décembre 20016-3 décembre 2014. Cela fait aujourd'hui huit ans que Chrystelle et Claver sont venus au monde au Queen Elizabeth Hospital de Bridgetown. Je m'en souviens bien sût comme d'hier. L'attente de la naissance est un moment inoubliable dans la vie d'un père et d'une mère. Cela l'a été encore plus dans notre cas. Suite à une intervention médicale, j'ai été le premier à voir ces deux trésors moins de cinq minutes après leur naissance. C'est seulement le jour après que leur maman anesthésiée les a vus. Je n'oublierai jamais l'instant où la pédiatre, Dr Jennings amenant les jumeaux entre ses mains, m'a gentiment présenté les enfants dont je découvrais pour la première fois les visages: "Daddy, look at your beautiful twin babies". C'était peu avant 18 heures.
Pendant que j'écris ces lignes, je viens de demander à ma fille qui se souvient de tout, le nom du Dr. entre les mains de quel docteur ils sont nés. "Oncle Chris", a-t-elle répondu spontanément. Elle est toujours convaincue qu'elle est au bureau de Oncle Chris. En effet, Dr. Christian Ugwaugu est un pédiatre nigérian qui s'est énormément occupé de ces jumeaux. Un frère toujours prêt à nous assister avec les soins de ces enfants. Salut Chris, à Belize où tu te trouves en ce moment.
Comme ils étaient aux soins intensifs, ils sont sortis trois jours plus tard de l'hôpital QEH. Depuis, ils sont restés à la maison jusqu'à ce jour, se déplaçant avec nous à chaque vacance et voyage. Une année entière s'est écoulée sans que leur maman travaille ou fasse quoi que ce soit d'autre. Puis on les a mis à Little by Little, un jardin d'enfants, jusqu'à trois ans.  Pendant leur deuxième année, nous nous sommes installés à Apes Hill où nous vivons voilà six ans. Aujourd'hui, ils sont élèves de Class One à St. Patrick R.C. School depuis cinq ans. Ils suivent le parcours scolaire catholique de leurs parents. Ad multos annos!


1 déc. 2014

Worldcat et moi

Worldcat me présente comme "Editor, Redactor" mais moi-même je me définis littéraire. Je touche un peu à tout. Enseignant, je produis et dirige du théâtre à mes heures perdues. Le théâtre est devenu une passion pour laquelle je me bats. En effet, le festival intercampus de l'université des West Indies aura bel et bien lieu à Cave Hill alors que des contraintes économiques se dressaient contre ce festival. J'ai réussi à convaincre nos services pour que cet événement dont Cave Hill est le campus fondateur se tienne comme prévu à la Barbade.
Editor, oui; mais Redactor non ou pas encore. Je n'ai jamais pensé me présenter sous ce titre. Par contre, je peux prétendre être critique littéraire. Mieux, un mythologue. Initié à l'analyse littéraire, formé en philosophie, théologie, langue, littérature et linguistique françaises, j'aime placer au-dessus de mes profs. mon propre grand-père, Kahiudi. Un savant qui ne savait ni lire ni écrire quoiqu'il ait rompu son stylo dès la première primaire. Un savant maître dans l'art du savoir et du dire. Philosophe authentique dont la sagesse a marqué mes premiers pas d'intellectuel et de penseur.
Si je devais à tout prix me trouver un titre, je reviendrais volontiers à mes premières amours: la littérature. Que dis-je? La politique.

Henri Lopes aurait fait un excellent SG de l'OIF

S'il est des personnes déçues de voir le poste de secrétaire général de l'OIF échapper à Henri Lopes, je suis de ceux-là. La Francophonie manipulée par la France a raté de voir un grand écrivain africain diriger cette institution. Peut-être aurais-je eu l'occasion de faire passer ce que je pense de la francophone grâce à l'amitié que j'éprouve pour le créateur de Bwaka Mabé na Sacadé.
Lopes. Un homme fascinant à plusieurs égards. Simple, élégant, noble, Henri appartient à la catégorie des gens qui ont embrassé la politique par souci de servir leur nation. Il l'a fait et continue à servir son pays. Ministre, premier-ministre, directeur général adjoint de l'UNESCO, ambassadeur, Henri Lopes demeure un homme exceptionnel et digne de foi. Un des rares politiciens que je respecte, parce qu'il est un littéraire comme moi. Notre rencontre à la Foire du Livre de Pointe-à-Pitre en 2006 m'est restée mémorable car, ne l'ayant jamais approché auparavant qu'à travers ses écrits, j'ai découvert un homme au grand coeur, ouvert et sympathique. Sa défunte épouse était présente. Paix à son âme! Je me souviens particulièrement du dîner pris ensemble chez André et Simone Schwartz-Bart. C'est par devoir d'amitié et d'appréciation personnelle que j'ai publié un article "Henri Lopes" dans The Encyclopaedia of Africa and the Americas (Santa Barbara,  2008).
A défaut de le voir au sommet de la France-co-caco-phonie, nous lui organiserons un bon anniversaire de quatre-vingts ans d'ici là. Les amis s'arrangeront pour l'honorer et lui rendre hommage le moment venu. Ses oeuvres de plume parlent pour lui. Courage et meilleurs voeux Henri! Ainsi va la vie.

Wenda mboti Mama Kibangu

Ce matin est décédée à Kinshasa Maman Kibangu, la grande soeur de Mgr M'Sanda. Que le Seigneur lui accorde le repos éternel! Je l'avais vue sur des photos avant de la rencontrer en 1975. Cette femme a élevé son éminent frère qui l'appelait tendrement "maman"; elle a mené une vie simple, humble et paisible.  Elle m'a donné un conseil que j'ai gardé: "Yandi ni katombula ndinga, ngeyi zonziku".
Wenda mboti, Mama. Baheka mboti bana wamona kuna... Nzambi kakusambula.

30 nov. 2014

Weekend de l'indépendance de la Barbade

La Barbade est devenue indépendante le 30 novembre 1966. Cette journée est célébrée chaque année avec un faste impressionnant. Parades militaires et défilés accompagnent des événements culturels du pays. Le vendredi 28 novembre, l'école St. Patrick où étudient les jumeaux a organisé des spectacles de gymnastique, danses, chants et .poèmes exécutés par les élèves. Les parents étaient invités à la cérémonie. Je m'étais donc préparé à y participer, car c'était une première. Je me suis excusé auprès de la coordinatrice de langues modernes, qui a organisé une réunion à 14 heures. Hélas, juste au moment où je me préparais à me rendre à l'école, mon téléphone a sonné. J'étais attendu d'urgence à par le comité des ressources humaines de l'université réuni dans la grande salle de conférences. En ma qualité de chef de département, il fallait clarifier certaines situations sur les promotions de collègues que j'avais recommandés. J'ai donc laissé Marie-Clavère partir sans moi. Tous les espoirs d'assister au premier spectacle de mes enfants s'étant volatilisés, j'ai dû, quelque quarante minutes plus tard, me contenter d'un repas d'indépendance offert par les collègues du département d'histoire et philosophie.
Comme je me trouvais encore sur le campus, n'ayant plus de voiture, j'ai dû ensuite participer à la réunion de la discipline des langues modernes. Pas moins de deux heures. Tout l'après-midi s'est transformé en une série d'activités et de rencontres improvisées. Réception d'un collègue, d'une étudiante, avant de prendre le chemin du Errol Barrow Centre for Creative Imaginiation où m'attendait Dr. Hatar, un collègue ougandais. 
Le lendemain, il m'a fallu aller à un autre spectacle. Cette fois, c'était Chrystelle seule en action le dernier jour du ballet pour ce semestre; ce jour est consacré à un spectacle aux parents et amis des enfants. Du connu car cela fait quelques années depuis que Chrystelle fait la ballerina. Beau spectacle de musique classique et de gestes suaves et majestueux présentés par nos filles. De quoi vous donner la chair de poule! J'ai beaucoup aimé. J'avais pourtant prévu de finaliser, pendant ce weekend, quelques dossiers administratifs qui traînaillaient dans mes tiroirs. Au lieu de cela, le soir à partir de 16 heures, j'ai conduit les enfants à une foire de l'église Notre Dame des Douleurs. De là, on a déposé le fils Hatar chez lui avant de retourner à Apes Hill.
Dimanche a été de tout repos. Un mécanicien est passé remettre en place le démarreur de ma vieille BMW, un véhicule en attente de mort. Pour la petite histoire, ce mécanicien apparaît lorsqu'on ne l'attend pas et disparait sans laisser d'adresse. Là, je l'attendais depuis jeudi; il ne s'est pas présenté, voire n'a pas pris son cellulaire. A chaque jour son prétexte.
Demain, 1er décembre, auront lieu les festivités politiques et culturelles marquant le 48e anniversaire de la Barbade. Je suivrai le tout à la télévision tout en incitant les jeunes gens à préparer leurs examens trimestriels. Ainsi se passe le weekend de tata bodi, père de jumeaux.

Quelques anglicismes

Nés et élevés dans un milieu anglophone, Chrystelle et Claver réfléchissent en anglais et traduisent leur pensée en français. Bilingues avec une prépondérance anglaise, ils utilisent des structures anglaises en français.

- Papa, tu n'écoutes pas à moi.
- J'ai nettoyé mon dents.
- Attends pour moi.
- Je veux du wawourt.
- Tu as laissé moi toute seule.
- Je vais enlever mon z habits.

- Pourquoi ne fermes-tu pas la porte?
- Non, c'était ouvert, que répond Chrystelle.
- C'était fermé.
- Non, ce n'était pas.

- Claver, est-ce que tu as pris la clé?
- Oui papa, j'ai.



Le XVe sommet de la Francophonie

Dakar, Sénégal, 29 et 30 novembre 2014. La Francophonie a vécu. Une nouvelle secrétaire générale a été élue ou désignée.
J'ai ma petite idée de la Francophonie, une institution politique qui n'a plus rien de culturel. Un tremplin pour la France en vue de s'assurer l'hégémonie politique sur d'autres pays sous le prétexte de la langue française. Je ne cesserai de le répéter. La France a comme tout état le droit de s'associer à d'autres pour des causes communes. Maintenant que la coopération culturelle qui a été le fondement de sa raison d'être s'est complètement évaporée de la francophonie, j'estime qu'il est temps de changer le nom de cette institution. Dans son état actuel, elle ne correspond plus aux motivations et intentions de ses pères fondateurs en devenant un agglomérat davantage politico-économique.
Au lieu de trouver au sommet des poètes, musiciens, cinéastes, artistes et autres hommes et femmes de culture francophones, on voit défiler des chefs d'états et de gouvernements pour lesquels le français est le dernier des soucis. C'est plus politique, politique, politique. La France y descend, paternaliste et condescendante, pour donner aux Africains des leçons de démocratie et des mises en garde contre les révisions de constitution. 0n comprend que dans ces conditions la ministre des affaires étrangères du Rwanda s'en prenne ouvertement au discours de président de France. La France dans ces assises ne se considère jamais au même rang que les autres pays. Le colonialisme a encore de beaux jours devant lui.
Voulez-vous encore une preuve de ce que j'avance? Lors de l'opération pour désigner le nouveau sécrétaire général de l'OIF, le ministre français des affaires étrangères a appelé les Africains à l'unité et à l'entente devant la disparité des voix et des candidatures. De quelle autorité dispose-t-il pour tenir ce propos, s'il se considérait égal aux autres ministres présents? Comme toujours, il y a les Français d'un côté, et les francophones de l'autre.
Encore une preuve? En conformité avec ce somment, un titre du genre "Urgent! C'est officiel. Hollande vient d'exiger de Kabila de quitter le pouvoir" (Source: Coraliekienge.com), publié sans discernement ni esprit critique, montre le colonialisme auquel succombent nos compatriotes. C'est le peuple congolais qui élit son président au suffrage universel, et non pas le président de France. Malheureusement, comme je l'ai toujours soutenu, la raison atteint ses limites dès qu'il s'agit des Africains.
Ouvrons l'oeil!

29 nov. 2014

Les yeux de scène

Parmi les acteurs qui m'ont marqué par l'usage de leurs yeux, Mangobo figure en bonne position. Cet homme de Nkutu Moke avait toutes les qualités que l'on peut attendre d'un acteur comédien en terme de tenue, d'attitude et de disposition. C'était un véritable artiste de la parole. Je ne sais pas trop comme il a évolué par la suite. Ce qui m'intéresse pour ce propos, c'est son jeu d'yeux. Ses yeux très expressifs impressionnaient: rien qu'à les voir, le spectateur était presqu'infailliblement porté à rire. A cela, il ressemblait beaucoup à au catcheur Hulk Hogan, un autre artiste très médiatique. C'était . spectaculaire de voir Hogan se relever des assauts de son adversaire, tous ceux qui l'ont vu à l'oeuvre s'en souviennent.
Une anecdote. On raconte qu'à la suite du décès d'un proche parent, Mangobo s'était rendu à la veillée mortuaire. Dès qu'il a osé pleurer son parent, toute l'assemblée occasionnelle a éclaté de rire. Impossible de distinguer l'artiste de l'individu-monsieur tout le monde. Tout le monde a cru à une farce. Le talentueux histrion aurait été prié de quitter le lieu. Les yeux d'Edingwe pouvaient vous transformer en esclave de sa volonté et vous faire danser au pas de "Moto na ngenge." Il fallait les éviter à tout pris. Et les fameux yeux de Mobutu, on les disait de léopard. Je les avais regardés à Rome sans apercevoir quoi que ce soit d'extraordinaire. Le mythe de ces yeux envoûtants était tellement répandu qu'on se souviendra de la rencontre Mobutu-Kabila sur l'Outenika autour de Mandela. Kabila évitait visiblement de le regarder. Dans de cas pareils, la croyance populaire ajoute souvent à l'irrationnel.
Lors de la visite de l'empereur Hailé Selassié en Jamaïque en 1966, toute la foule venue à sa rencontre a dû s'incliner et baisser les yeux devant Ras Tafari, l'incarnation de Dieu. Les Rastafari ne pouvaient croiser les yeux de leur dieu sans mourir. Yeux baissés, signe d'humilité et d'obséquiosité. On n'est pas du tout loin des croyances concernant Janus, le dieu du Forum Romain.
Le message des yeux peut être encore plus explicite. Le clin d'oeil connote une certaine complicité, tandis que le chef dirige son monde avec ses yeux. C'est un langage qui, souvent, ne souffre d'aucune ambiguïté. Observez les gangsters dans les films, les jeux d'yeux accompagnent leurs gestes et codent les messages. Etc. etc.

Les jeux de scène

La mise en scène est un sujet privilégié dans mes études, analyses et recherches. J'aime bien suivre l'évolution d'un individu dans le temps et l'espace, considérer les éléments qui se juxtaposent devant mes yeux et ainsi voir ce qui est montré sans que cela soit dit, exprimé ou transmis sans qu'on s'en rende compte. C'est ce que les critiques appellent le non dit, l'impensé. La mise en scène elle-même est un message qu'il faut savoir décoder et interpréter. C'est là que toute ma formation antérieure, livresque et autodidacte m'aide. Je vous surprendrai en évoquant l'impact prépondérant de Kimfingia, mon village paternel, dans ma conception du mythe. Ce que j'ai appris à Mutoni, Makiosi, Kenge, Kimbau, Kalonda, Mayidi, Rome, Fribourg, Paris et Munich constitue un pan de ma propre mise en scène autobiographique, mon côté de colonisé culturel. Ce blog constitue également un jeu de scène qui reprend, comme je l'ai révélé il y a quelques semaines, des passages d'un livre qui s'est écrit en format traditionnel et que je réécris au rythme de la nouvelle technologie. Voilà pour l'anecdote!
Une des tribunes les plus intéressantes pour observer les acteurs ou actrices se révèle être la politique. Ce pourrait être aussi l'église, la congrégation, le milieu du travail. Mais restons en politique car elle embrasse notre vie qu'on le veuille ou non. Les rapports de pouvoirs au niveau mondial, continental ou national, constituent de bons pans de mise en scène. Le monde est tellement fondé sur le mensonge qu'à chaque fois que quelqu'un dit "en vérité", il ment. Le monde est tellement fondé sur le manque de respect qu'à chaque fois que quelqu'un dit, "avec tout le respect que je vous dois", il vous insulte ou presque; il tient des propos indécents. Le monde est tellement tordu que toutes les vertus jadis vantées sont devenues des mirages, des illusions presqu'impossibles à réaliser.
Les acteurs politiques passent pour maîtres sur ces portables quotidiens. Ils promettent pour aussitôt ignorer leur promesses; ils calculent leurs ambitions au gré des circonstances et tracent des trajectoires d'actions en fonction de leurs agendas cachés. L'homme politique qui se trouve devant vous est un monsieur ou une femme à double ou triple casquette. Il tourne casaque et fait volte-face à la moindre obstruction. "Je sers mon pays" = "Je sers mes ambitions". Ne vous détrompez pas. Bref un acteur sur la scène politique. Je n'aime pas la politique, mais j'adore ses jeux de scène.
Au pays des hommes intègres, tout un peuple qui a adoré Compaoré pendant vingt-sept ans ouvre aujourd'hui sa bouche pour le vilipender. Un colonnel qui a assuré sa protection, a permis qu'il quitte le pays, réclamerait son extradition du Maroc au cas où un procès serait ouvert contre lui. Son parti se désunit, l'armée contrôle les manoeuvres alors que ce n'est pas elle qui a pris l'initiative de la révolte populaire. Si l'armée s'était révoltée, Compaoré ne serait sans aucun doute pas parti. Le président de la transition voudrait que la tombe de Sankara soit rouverte pour des tests d'identification. Viennent ensuite les autres assassinats non élucidés. Etc. Autant dire combien le bouleversement ou les enjeux du damier sont imprévisibles.
Les jeux de scène permettent un sport cérébral ou imaginaire susceptible de prédire l'inconnu ou de prévenir contre toute surprise. Vous comprenez pourquoi la politique a mis en place de puissants services de renseignements. Les mêmes analyses ont amené à des guerres comme à des invasions préventives. Souvenez-vous de la guerre de George Bush contre l'Irak sous prétexte que ce pays disposait d'énormes armes de destruction massive. Dans ce sens, les jeux de scène sont forcément proactifs. J'y reviendrai.