Le mensonge est-il inné ou acquis? La tricherie, la falsification, le faux, ont assurément des racines plus profondes dans la nature humaine. C'est avant tout une attitude de l'esprit. Je ne suis pas qualifié pour donner un avis de spécialiste, je me contente de quelques observations.
Chrystelle et Claver grandissent, je veux dire, ils commencent à faire des choses qu'ils ne faisaient pas il y a quelque temps. Par exemple, se défendre à corps perdu lorsqu'ils commettent une bêtise. Ils ont pris conscience de la culpabilité et de la faute, au point de mentir ou de détourner la vérité quand c'est nécessaire. De là à repenser qu'ils disaient toute la vérité il y a à peine quelque temps.
Des phrases telles que les suivantes - "Papa, c'est pas ma faute... C'est pas moi qui ai fait ça. C'est un accident. Je n'ai rien fait. J'ai pas ouvert la télé, elle a commencé à marcher comme ça."- sont de plus en plus fréquentes. Si vous y ajoutez la complicité des jumeaux, vous aurez une belle peinture familiale.
L'autre jour, revenant de l'université, j'ai trouvé mes babouches à l'extérieur, mouillées par la pluie. Or je sais que mon fils, obéissant à la règle qui leur défend de marcher pieds nus sur la pelouse, se chausse parfois de tout ce qu'il trouve de disponible que ce soit de sa taille ou pas. Suivez alors la conversation qu'on a eue à peu près:
- Qui a laissé mes chaussures dehors, sous la pluie? Ai-je demandé.
- Pas moi, Papa.
- Qui alors?
- Je sais pas.
- Alors c'est toi.
- Non Papa, c'est pas moi.
- Alors c'est moi qui les ai laissées là?
- Oui, oui, c'est toi, Papa. Je t'ai vu avec ça avant la pluie.
- Tu m'as vu avant la pluie?
- Oui, Papa. C'est toi, c'est toi qui a laissé les babouches.
- Pinocchioooo! Attention au mensonge!
- Non, Papa. Je ne veux pas avoir un long nez.
- Mais ton nez est déjà long.
- Non, non, c'est non. Quand je dis non, c'est non. (Une phrase que je dis souvent)
Chrystelle qui vaquait à autre chose, s'en mêle: C'est pas Claver qui a fait ça.
- Qui alors?
- C'est toi, Papa.
- On ne joue plus, sinon pas de télé ce soir. Qui a laissé mes babouches dehors?
- C'était un accident, Papa.
Dans quelques jours ou semaines, Claver va perdre ses premières dents de lait. Cela me rappelle ma propre enfance, et tous les drames farfelus fomentés autour de cet événement. Lorsque je commençais ma première primaire à Mutoni, mes dents perdues à Kabwita, n'avaient pas encore repoussé. Le chef Mutoni de l'époque exigeait que je lui apporte des noix de cola pour qu'il me les rende. Mon père refusait de me donner ces colas, arguant qu'elles repousseraient naturellement. Quant à moi, je croyais mordicus que le chef Mutoni, par ailleurs parent de mon père, y était pour quelque chose.
Une chose est sûre: on en conservera symboliquement quelques-unes pour leurs grand-parents encore vivants. Tradition africaine oblige, semble-t-il. Mais que diable, ces enfants ne sont-ils pas barbadiens?
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