En remplissant un formulaire, j'ai été surpris par une question me demandant si j'appartenais à une minorité: "Appartenez-vous à une minorité? Si oui, laquelle?" Sans autre précision. D'habitude, la curiosité des décideurs s'évertue à demander: religion, race, handicap, quer ou cross, profession, végétarien, santé, maladie, casier judiciaire, et que sais-je encore. On prétend que c'est "pour votre sécurité, pour aider à convaincre de la pertinence de votre dossier." Tout dépend de ce qu'on entend par ce vocable polysémique et chargé de connotations discriminatoires. Etre de race noire, est-ce être minoritaire? Cela dépend de lieu. En Occident, oui peut-être. Aux Etats-Unis, oui. Mais pas en Afrique. Or justement, dans le monde des formulaires, c'est celui qui détient le pouvoir qui fixe la définition de la minorité. Comme le formulaire venait d'Europe, j'ai spontanément écrit, oui. Puis, j'ai effacé car je venais par là de faire, contre mon gré, de l'Occidental l'homme le plus puissant du monde et de lui léguer la détermination de mon destin. Or, c'est justement contre de tels mythes que je mène ma lutte identitaire. Ma réponse a été, après réflexion, NON. J'affirme avec force ma personnalité. Je refuse toute catégorisation, tout genre de classement qui m'enforme dans un ghetto. Comme disait Tchicaya à peu près: "Je suis homme, je suis nègre. Pourquoi cela prend-il le sens d'une déception?". L'idée est là, mais je corrigerai la citation si elle se révèle incorrecte. Je tiens à être un homme à part entière, quelque puissantes que soient les pesanteurs culturelles et hégémoniques qui dirigent le monde dans lequel je vis. Je refuse, je n'appartiens à aucune minorité et ne voudrais bénéficier d'aucun traitement spécial, autre que celui que subissent "humblement et courageusement" les gens de mon pays, de ma race, de ma religion, de mes choix idéologiques ou culturels.
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