Depuis des années j'entends dire que la jeunesse n'a plus de modèles, qu'il y a crise de valeurs, que tout va pour le pire. Y a-t-il jamais eu une époque qui ne soit de crise? Lorsque jeune séminariste je commençais la section latin-philosophie, on me rabattait les oreilles avec l'excellence de la section gréco-latine, offerte à la génération de nos aînés. On nous croyais sacrifiés alors même que nous étions admirés pour la perfection de notre conduite, de notre bonne éducation et de notre maîtrise de la langue française. On dirait que chaque génération trouve des failles dans la génération qui la suit. Loi de la nature pour se valoriser soi-mémé. "Si la jeunesse actuelle est encline au crime, à la drogue, au viol, au vol, à la violence, c'est parce qu'elle manque de modèles à imiter", entend-on dire par ci par là.
1. Crise de modèles. Comment voulez-vous qu'on admire un voleur et un pilleur des recettes publiques? La crise s'enlise dans la société parce qu'elle est incapable d'élever sa voix contre ces individus puissants qui la conduisent tant bien que mal au gré de leur pouvoir et de leurs ambitions. Les bandits de grand chemin, les malfrats sans scrupules, les tueurs en séries ont désormais remplacé les saints hommes, les moralistes, les héros épiques des légendes, les sages, les défenseurs de droits humains, qui ont longtemps servi de références vivantes. Les témoignages négatifs et les mauvais exemples exhibés par ces héros de la d'échéance ne représentent aucun obstacle pour l’élévation de ces scélérats à l'échelle du pouvoir ou de la puissance financière. Comme quoi la malhonnêteté est récompensée, tandis que la bonne action est méprisée. La crise de modèles consiste justement en cette incertitude éthique, en cette confusion volontairement maintenue entre les moyens d'atteindre les objectifs qu'on s'assigne.
2. Prolifération de modèles et de valeurs contradictoires. Il y a tellement de modèles et de valeurs qu'il est difficile d'orienter la jeunesse et la société dans un sens comme dans un autre. Tellement des religions du réveil et de second baptême, tellement des sciences occultes et de Graal initiatiques qu'il est presque impossible de trouver la bonne direction. Les églises traditionnelles n'ayant plus voix au chapitre ne sont ni écoutées ni suivies. Elles se contentent d'assurer les statistiques plutôt que de viser un impact sur la société. Elles s'inscrivent souvent en faux face aux problèmes actuels concernant la pédophilie, l'homosexualité, le mariage uni, la contraception, la condamnation à mort, etc. Ce qui les affaiblit politiquement et socialement. Et même dans leurs engagements politiques, elles se situent du côté de l'opposition au lieu de prendre la mesure exacte et réaliste des enjeux du jour. Au résultat, la vie continue sans elles, sommées de se retrancher dans leurs rôles de guide spirituels et moraux. D'autre part, des extrémistes religieux peaufinent les moyens de tuer massivement d'innocents pour la cause de leur guerre sainte. On ne sait plus où se sépare le bien du mal, le spirituel du politique, la prière de la violence. Et bien entendu, dans ces conditions, la jeunesse devient la victime de ces désordres, elle subit gravement les conséquences néfastes de ces déchéances sociales, morales et religieuses. Que le monde semble au fond du trou ne doit jamais soustraire l'espoir sans lequel il ne saurait tenir.
3. Eloge de la violence. Un groupe religieux qui recourt à la violence perd automatiquement son statut d'agent de paix. Pousser la jeunesse à tuer des paisibles passages dans des avions, sur des places publiques et des marchés, constitue déjà un acte criminel à dénoncer. Le recrutement de ces jeunes invités à l'extrémisme est si sophistiqué que les parents n'ont plus d'emprise sur les activités de leurs enfants. Pour ces groupes en lutte contre les païens et les membres d'autres communautés religieuses, la violence criminelle forme le maître-mot pour changer la face du monde. Allez-y voir comment l'amour divin va avec le crime du sang humain.
La jeunesse a bien des modèles, mais des faux. Ceux des BD et des cinémas, ceux de la rue et la religion radicale. Ceux de la drogue, du crime et de l'insécurité. Ceux des loteries, des maisons de prostitution et des multinationales d'armes. Ceux de l'argent facile, extorqué et du crime financier. Que le voleur ne soit pas adulé au détriment de l'homme honnête. Que le tueur n'échappe pas à la prison et que justice soit adéquatement rendue à toute personne. Il est temps d'inverser la roue et que la jeunesse se reprenne en main sous le guide de la bonne conscience.
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