Après les indépendances africaines, beaucoup d'intellectuels ont adopté l'option de Julius Nyerere à propos de l'usage des langues africaines dans l'éducation scolaire. Un ancien ministre de la culture ou de l'éducation m'a raconté son aventure à travers les villages congolais. Jeune et dynamique à l'époque, fraîchement sorti de ses études d'histoire, surtout convaincu de l'idée que les Africains se réapproprient leur histoire et leur identité spoliées par l'Occident, il était en pleine campagne de sensibilisation lorsqu'il fut interpelé par un vieux du village. Lisez:
- Vous proposez qu'on étudie en monokoutouba ou lingala dans les écoles?
- Exactement, répond le jeune ministre.
- Mais vous-même êtes devenu ministre justement parce que vous maîtrisez la langue française?
- Que non? Je ne suis pas contre le français. Je propose que l'enseignement soit africanisé dans nos écoles. Nous devons sortir du néocolonialisme en rompant avec l'usage unique du français. Nos enfants doivent être capables de lire et écrire nos langues véhiculaires, et d'apprendre les sciences dans nos propres langues. C'est notre seule voie de salut.
- Monsieur le ministre, ce que vous demandez là est impensable. Avec le monokoutouba et le lingala, nos fils ne deviendront jamais ministres, n'iront jamais se former aux pays des Blancs comme vous. Je regrette de soutenir le contraire. Pour preuve, comme l'abbé Youlou en son temps, Massamba-Debat ne s'adresse à la nation qu'en français. Avez-vous jamais entendu un seul mot kikongo ou lingala de sa bouche? Revenez nous en parler une autre fois.
Ce fut la fin de la campagne.
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