16 sept. 2014

Des anecdotes sur Papa Mosimi

De son vivant, M. Bernard Mosimi portait plusieurs chapeaux. Il ne portait que des chemises blanches et des pantalons noirs bien repassés. Il paraît qu'on appelle cela "style corbeau". Ce serait peut-être l'uniforme de son matanga au dire de certaines langues soucieuses de préserver une certaine hégémonie du défunt ou de marquer ce jour d'une empreinte inoubliable.
Un jour qu'il avait reçu à Bandundu sa belle-fille, Ma Jacky venue droit de Kinshasa. Cette dernière avait fait la lessive et exposé les couches et autres vêtements de sa bébé-fille au soleil. Quelle ne fut sa surprise de constater à son retour que tous les habits avaient été reversés dans un seau plein d'eau et de savon Omo, sous prétexte qu'ils étaient encore sales!
Homme plein d'humour et de rigueur, il a élevé ses enfants dans une stricte discipline. Son métier de surveillant le suivait partout, même à la maison. Il posait des principes du genre: "Moi, je ne conduis un enfant qu'une seule fois sur le chemin de l'école, le jour où je le fais inscrire". A comprendre comme suit: "Si tu échoues, tu te débrouilleras seul(e) pour te trouver une école et retrouver le chemin de la maison".
Chez lui, à la maison, il plaçait une barrière à partir de 18 heures, un morceau de bois ou un bâton qui assurait la discipline de la maison. Cela signifiait que ceux qui étaient dans la concession ne sortiraient plus et que ceux qui étaient dehors resteraient dehors.
Un après-midi, alors qu'il avait décidé de prendre sa sieste, il a donné  l'ordre à ses enfants de ne pas le réveiller quel que soit le motif; de le déclarer absent à n'importe quel visiteur éventuel. Voilà qu'est arrivé sur les lieux son meilleur ami, Papa Albert. Ayant entendu ses enfants "obtempérer à ses injonctions", il est intervenu du fond de sa chambre où il était supposé dormir:
- Ah dis Albert, tu es là.
- Mais Papa tu nous a interdit de te réveiller.
- Mais je vous ai pas demandé de fermer la porte à Albert. Dis Albert, attends-moi, je m'apprête.
Juillet 2005. Nous sommes à Binza-Pigeon chez sa fille Solange. Papa devrait aller, comme à son habitude, faire sa sieste. Mais voilà qu'il y avait beaucoup de boissons restées sur la table. Alors que sa Primus était finie, après plusieurs hésitations sans doute, il a demandé: "Maman, verse de la bière dans ce verre". Il avait décidé de vider les bouteilles entamées sans tenir compte de la marque de la bière. Le temps de la sieste est ainsi passé.
Musicien, organiste, je l'ai une fois vu jouer du piano tout en chantant des chants grégoriens. La mélodie des chants était là, mais l'ensemble formait une cacophonie indigeste à faire bouger Mozart dans sa tombe. Il avait sa façon de manifester ses intentions:
- Papa comment allez-vous?
- Je vais bien, mais les poches sont trouées.
A une époque, vers 2005, nous voulions le délocaliser de Bandundu pour Kinshasa où il bénéficierait de soins appropriés. Refus catégorique. Il fallait le comprendre. A Bandundu, M. Mosimi était un monsieur, alors qu'à Kinshasa, il n'était qu'un hôte de ses enfants. Voici sa solution au cas où on insisterait de le déplacer: "Eh bien vendez la maison, prenez votre part, donnez-moi la mienne, j'irai m'installer à l'Hôtel Lenko." "Et après?" ai-je rétorqué. "Après? Beh, une fois l'argent terminé, Dieu s'occupera de moi."
A propos de ses enfants, M. Bernard Mosimi a donné à tous ses enfants le deuxième nom de "Marie", et chacun d'eux a au moins quatre prénoms. Ainsi Clavère s'appelle: "Mosimi Abuka Abiami Marie Clavère Bernadette Régine". Il y a des Ladislas, des Chrysostome, etc.
Vers la fin de sa vie, il accusait des pertes de mémoire. Ainsi lorsque je l'ai vu le 4 août, tout en sachant que je venais de France, il m'a soudain demandé: "Ebwe na Kenge?". Un sursaut de mémoire qui l'ait, il est remonté trente ans plus tôt lorsque j'arrivais de Kenge à Bandundu.
Paix à son âme!

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