7 sept. 2014

Les rêves surprennent parfois

J'ai fait deux rêves terribles. Des cauchemars dont l'explication m'est claire. C'est la vie, comme on dit. On vit une seconde vie dans le rêve. On revêt d'autres personnages dans le rêve. Je vis des choses inimaginables, que je ne ferais jamais à l'état conscient. Me voilà dans la peau d'un tortionnaire. Agent d'un service de renseignements, je torture Aimé Césaire avec un mèche électrique pour qu'il révèle ce qui l'a motivé à maintenir la Martinique dans le giron français à l'époque où les Africains et ses copains de la négritude se débarrassaient de l'assimilation française. Un procès littéraire. Non, un procès politique. Mieux un procès idéologique. C'est selon.
J'étais là torturant le vieil homme sans force, jurant et lui attribuant comme l'ont fait d'autres, tous les maux et fléaux dont souffrent les Antilles françaises aujourd'hui. Un discours certes tenu par d'autres, mais que j'ai endossé sans discernement... dans le rêve.
A mon réveil, je me suis demandé pourquoi cela! Dans quel but ou intérêt j'aurais posé un tel acte? Une explication. La semaine passée, je préparais un cours de littérature et relisais quelques articles et notes de lecture lorsque l'idée m'est venue de considérer Aimé Césaire d'un point de vue négatif. Senghor oui, cela va de soi. Mais Césaire pour un Africain, pour un critique africain, est complètement immaculé. Il a toujours fasciné les Africains quoiqu'ils n'aient pas tout compris de sa poésie; Georges Ngal le confirmera jusque dans ses derniers écrits. C'est justement une aberration que de trahir l'héritage d'un icône culturel négro-africain, que de vilipender un modèle.
J'ai tout de suite pensé à mon feu papa, à un récit que m'a raconté mon frère Nicolas. Des jeunes gens de Kipiba, du côté de Muni Muhemba, sont allés trouver le chef Kiamfu Kobo pour qu'il intervienne en leur faveur. Ils tenaient à ce que l'école s'appelle EP Muni M'hemba au lieu de Ngungu-Nthambu. Le chef Mbuya après les avoir entendus a demandé:
" De quel directeur parlez-vous?"
" Du directeur Mabana?"
" Lulubuka, lulubuka. (Sortez, sortez tout de suite).
Pour les jeunes gens, c'était la preuve que Papa était un sorcier, qu'il avait envoûté le chef dans ses pouvoirs à tel point que ce dernier ne pouvait rien décider  contre lui.
Des intouchables, il y en a à tous les niveaux. Mon rêve n'était qu'un leurre, insensé, surréaliste ou irréaliste. Les rêves surprennent parfois.

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