30 mai 2020, la nouvelle est tombée comme un couperet sur l'écran de la vie: l'abbé Oscar Makolo, le puissant coordinateur diocésain des écoles conventionnées du diocèse de Kenge, est mort à la Polyclinque Bondeko de Kinshasa. Que son âme repose dans la paix éternelle du Seigneur. Amen Alleluia. Par où commencer pour décrire le souvenir que laisse cet homme de Dieu? Un homme-symbole à plusieurs titres. J'ai déjà parlé de lui sur ce blog car il a aussi marqué ma vie en tant que formateur et confrère prêtre. L'article s'intitulait: "Où est passé l'abbé Oscar Makolo?" Je l'ai assez connu pour rendre ce témoignage strictement personnel.
Dans l'entrée de mars 2016, j'ai écrit ce qui suit:
"Il était mon formateur au petit séminaire de Kalonda. Comme tous mes aînés, il a énormément contribué à ma formation personnelle, notamment en français-langue. Je l'ai revu pour la dernière fois en 2008 à la Première Rue. Il ne m'appartient pas de le juger, mais de souligner simplement que son jubilé sacerdotal aurait été un moment important dans l'histoire du diocèse étant donné qu'il a été, en 1957, le tout premier séminariste admis à Mayidi pour le compte de la Préfecture Apostolique de Kenge. Son jubilé aurait bien coïncidé avec celui du diocèse. C'est vraiment dommage qu'un tel événement n'ait pas été célébré en bonne et due forme. La contribution de l'abbé Makolo au diocèse de Kenge et à la coordination nationale ne sera jamais effacée de nos mémoires. Où qu'Amos se trouve en ce moment, quoi qu'il fasse, je lui envoie mes salutations, je lui souhaite paix et joie, grâces et bénédictions divines."
Ma première rencontre avec l'abbé Oscar date de 1966-67 à Kenge alors que je suis en troisième primaire. Responsable de discipline et enseignant à St Jean Bosco (Nto-Kiese), il est connu de la génération des gens comme François Mayengo, Félicien Kasiala, Jean-Marie Petipeti et compagnie (Ignace Mbanza, Philo Kayolo). Il célébrait la troisième messe à St Esprit, en français. A l'époque, il m'arrivait de suivre deux messes de suite. Je le voyais, l'écoutais mais il ne m'avait jamais adressé la parole. C'est plutôt en septembre 1970 que je le reverrai au petit séminaire de Kalonda alors qu'il continue des études de lettres à Lubumbashi. J'apprendrai dans la foulée qu'il est l'oncle de mon condisciple Antoine Mindua, l'actuel juge à la CPI. On le voit souvent en compagnie de l'abbé Firmin Kilunga.
L'année suivante, à la fin de sa licence en philologie romane, le spécialiste de Jean Giono (dont j'entendais parler pour la première fois d'ailleurs) revient remplacer l'abbé Kilunga comme préfet de discipline à Kalonda. Aussi rigoureux que son prédécesseur, Amos "racourbattra" avec l'abbé directeur M'Sanda, un excellent travail dans la formation des jeunes séminaristes. Il fut mon professeur de français, de chimie organique, d'esthétique… je retiendrai qu'en poésie, il m'enseigna l'acrostiche. Les prêtres enseignaient tout, avec une certaine réussite, même des sciences en dehors de leurs spécialités. Lorsque notre professeur de trigonométrie et de mathématique devint évêque, il s'arrangea pour s'assurer les services de son meilleur compagnon de l'époque.
Une parenthèse. En 4e littéraire (1972-73), je fus vice-bidèle général d'Anicet Kerezina. La fête du 3 juin 73 connut un incident: Mgr Franz Hoenen n'était pas installé au siège d'honneur qui lui revenait lors de la représentation théâtrale. Ce qui souleva une colère indignée de l'abbé directeur. La faute me fut imputée car Kerezina était suspendu en ce temps-là. Je fus sérieusement menacé de renvoi par le directeur. Je me voyais déjà au collège de Bandundu, mais l'abbé Oscar me rassura que je ne serais pas renvoyé, divulguant au passage un secret que je ne saurais diffuser ici. Tout en le remerciant, je n'ai jamais oublié qu'il m'a fait jouer le rôle de Véronique dans Le voyageur sans bagages de Jean Anouilh.
Mai 1974: l'abbé préfet avait l'habitude d'éteindre brusquement la lumière dans la salle de classe lorsque nous dépassions l'heure de l'étude, ou de s'infiltrer incognito dans le dortoir des grands afin de s'assurer qu'on faisait silence à notre arrivée. Un soir on entendit dans l'obscurité: "Tais-toi Florent" - "Tais-toi toi-même Makolo" que lui avait répondu Florent Gabati signant ainsi son renvoi du séminaire.
Entre 1974 et 1981, l'abbé Oscar Makolo fut le bras droit de l'évêque qu'il appelait amicalement "Dieudonné" et qu'il tutoyait en public. C'est lui qui assumait la charge du diocèse chaque fois que Mgr M'Sanda voyageait hors du pays. Une collaboration et une complicité sans failles dans la gestion du diocèse. 1974-76, préfet de Nto-Kiese. 1976-77 directeur du petit séminaire de Kalonda. 1977-81 coordinateur diocésain des écoles conventionnées catholiques.
Septembre 1975: L'abbé Makolo nous a conduits d'Ito où l'abbé Henri Izwa nous a prêché la récollection des grands séminaristes. Nous sommes passés par Beno que je voyais pour la première fois, avons atteint Kalonda avant de continuer nuitamment sur Kenge. Au niveau de Tsakala, un cycliste ivre a failli se faire écraser n'eût-été la maîtrise du volant de l'abbé Makolo. Témoins les séminaristes Michel N'Gob, Firmin Mukwasa, Eugène Kapita, Alexis Olenga, Séraphin Kiosi et moi. Le groupe resté à Ito comme celui de Kenge traduisait du français en kikongo le missel édité et publié plus tard par Nicolas Berends sous le titre de Fukimina Mfumu Kikanda ya Nzambi.
Octobre 1977: Séraphin Kiosi et moi sommes à Bulungu après la session église-monde de Ngi. L'abbé Oscar nous rappelle par la phonie de l'état et organise notre voyage pour Kin par Kenge-Rapide d'Omadjela.
Juin 1978: Faustin Mampuya et moi nous nous inscrivons au jury universitaire de philosophie organisé par les Facultés Catholiques de Kinshasa. L'abbé Makolo ne nous accorde pas l'autorisation alors que nous nous trouvons déjà au Centre Nganda avec d'autres grands séminaristes venus de différents coins du Zaïre. Faustin appela cet épisode "Mutshatsha", un lieu hécathombe où les FAZ déguerpirent lors de la guerre du Shaba.
En 1981- l'abbé Makolo fut nommé coordinateur national adjoint à la CEZ avec l'abbé Dibalu comme patron si ma mémoire est bonne. Les relations entre les deux tenors se détériorèrent lamentablement, créant irrémédiablement et ostensiblement une fissure qui consacra la division Nord-Sud du diocèse. Une page sinistre de l'histoire de ce diocèse dont les séquelles se ressentent encore subrepticement jusqu'à ce jour. Après ses mandats à la conférence épiscopale, l'abbé Oscar est retourné au diocèse notamment comme curé à la paroisse Notre-Dame de Malebo, puis économe diocésain, etc. Je ne saurais rien dire sur ces années-là n'ayant pas vécu ces événements personnellement.
Je l'ai revu en 2008, en 2017. Il me croyait enseignant aux Indes: University of the West Indies. La toute dernière fois le 15 juillet 2018 après-midi à la procure de Kenge. Je ne l'oublie pas car c'était après la fête du mariage d'Alice et Jude à Apocalypse, Ndjili. J'y suis vite passé rencontrer Oscar Lemfu qui m'attendait. Amos se trouvait à l'entrée en compagnie de l'abbé Robert Lusilu avant que les abbés Fansaka, Lemfu, Matonga et un autre ne nous rejoignent.
L'abbé Oscar Makolo, un autre qui n'a jamais eu de nom authentique zaïrois. Je me souviens de ses blagues universitaires sur les "curés". Autoritaire, cassant, mais humoriste à ses heures, Amos a servi le diocèse de Kenge et l'église avec ses capacités humaines et spirituelles. Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, il mérite respect et reconnaissance.
Je m'unis volontiers à la douleur de sa famille biolgique et du diocèse de Kenge en ce moment difficile de confinement. Kwenda mbote mbuta. Kuvila beto ve. Nzambi kuyamba nge na bwala na yandi. Amen.
Dans l'entrée de mars 2016, j'ai écrit ce qui suit:
"Il était mon formateur au petit séminaire de Kalonda. Comme tous mes aînés, il a énormément contribué à ma formation personnelle, notamment en français-langue. Je l'ai revu pour la dernière fois en 2008 à la Première Rue. Il ne m'appartient pas de le juger, mais de souligner simplement que son jubilé sacerdotal aurait été un moment important dans l'histoire du diocèse étant donné qu'il a été, en 1957, le tout premier séminariste admis à Mayidi pour le compte de la Préfecture Apostolique de Kenge. Son jubilé aurait bien coïncidé avec celui du diocèse. C'est vraiment dommage qu'un tel événement n'ait pas été célébré en bonne et due forme. La contribution de l'abbé Makolo au diocèse de Kenge et à la coordination nationale ne sera jamais effacée de nos mémoires. Où qu'Amos se trouve en ce moment, quoi qu'il fasse, je lui envoie mes salutations, je lui souhaite paix et joie, grâces et bénédictions divines."
Ma première rencontre avec l'abbé Oscar date de 1966-67 à Kenge alors que je suis en troisième primaire. Responsable de discipline et enseignant à St Jean Bosco (Nto-Kiese), il est connu de la génération des gens comme François Mayengo, Félicien Kasiala, Jean-Marie Petipeti et compagnie (Ignace Mbanza, Philo Kayolo). Il célébrait la troisième messe à St Esprit, en français. A l'époque, il m'arrivait de suivre deux messes de suite. Je le voyais, l'écoutais mais il ne m'avait jamais adressé la parole. C'est plutôt en septembre 1970 que je le reverrai au petit séminaire de Kalonda alors qu'il continue des études de lettres à Lubumbashi. J'apprendrai dans la foulée qu'il est l'oncle de mon condisciple Antoine Mindua, l'actuel juge à la CPI. On le voit souvent en compagnie de l'abbé Firmin Kilunga.
L'année suivante, à la fin de sa licence en philologie romane, le spécialiste de Jean Giono (dont j'entendais parler pour la première fois d'ailleurs) revient remplacer l'abbé Kilunga comme préfet de discipline à Kalonda. Aussi rigoureux que son prédécesseur, Amos "racourbattra" avec l'abbé directeur M'Sanda, un excellent travail dans la formation des jeunes séminaristes. Il fut mon professeur de français, de chimie organique, d'esthétique… je retiendrai qu'en poésie, il m'enseigna l'acrostiche. Les prêtres enseignaient tout, avec une certaine réussite, même des sciences en dehors de leurs spécialités. Lorsque notre professeur de trigonométrie et de mathématique devint évêque, il s'arrangea pour s'assurer les services de son meilleur compagnon de l'époque.
Une parenthèse. En 4e littéraire (1972-73), je fus vice-bidèle général d'Anicet Kerezina. La fête du 3 juin 73 connut un incident: Mgr Franz Hoenen n'était pas installé au siège d'honneur qui lui revenait lors de la représentation théâtrale. Ce qui souleva une colère indignée de l'abbé directeur. La faute me fut imputée car Kerezina était suspendu en ce temps-là. Je fus sérieusement menacé de renvoi par le directeur. Je me voyais déjà au collège de Bandundu, mais l'abbé Oscar me rassura que je ne serais pas renvoyé, divulguant au passage un secret que je ne saurais diffuser ici. Tout en le remerciant, je n'ai jamais oublié qu'il m'a fait jouer le rôle de Véronique dans Le voyageur sans bagages de Jean Anouilh.
Mai 1974: l'abbé préfet avait l'habitude d'éteindre brusquement la lumière dans la salle de classe lorsque nous dépassions l'heure de l'étude, ou de s'infiltrer incognito dans le dortoir des grands afin de s'assurer qu'on faisait silence à notre arrivée. Un soir on entendit dans l'obscurité: "Tais-toi Florent" - "Tais-toi toi-même Makolo" que lui avait répondu Florent Gabati signant ainsi son renvoi du séminaire.
Entre 1974 et 1981, l'abbé Oscar Makolo fut le bras droit de l'évêque qu'il appelait amicalement "Dieudonné" et qu'il tutoyait en public. C'est lui qui assumait la charge du diocèse chaque fois que Mgr M'Sanda voyageait hors du pays. Une collaboration et une complicité sans failles dans la gestion du diocèse. 1974-76, préfet de Nto-Kiese. 1976-77 directeur du petit séminaire de Kalonda. 1977-81 coordinateur diocésain des écoles conventionnées catholiques.
Septembre 1975: L'abbé Makolo nous a conduits d'Ito où l'abbé Henri Izwa nous a prêché la récollection des grands séminaristes. Nous sommes passés par Beno que je voyais pour la première fois, avons atteint Kalonda avant de continuer nuitamment sur Kenge. Au niveau de Tsakala, un cycliste ivre a failli se faire écraser n'eût-été la maîtrise du volant de l'abbé Makolo. Témoins les séminaristes Michel N'Gob, Firmin Mukwasa, Eugène Kapita, Alexis Olenga, Séraphin Kiosi et moi. Le groupe resté à Ito comme celui de Kenge traduisait du français en kikongo le missel édité et publié plus tard par Nicolas Berends sous le titre de Fukimina Mfumu Kikanda ya Nzambi.
Octobre 1977: Séraphin Kiosi et moi sommes à Bulungu après la session église-monde de Ngi. L'abbé Oscar nous rappelle par la phonie de l'état et organise notre voyage pour Kin par Kenge-Rapide d'Omadjela.
Juin 1978: Faustin Mampuya et moi nous nous inscrivons au jury universitaire de philosophie organisé par les Facultés Catholiques de Kinshasa. L'abbé Makolo ne nous accorde pas l'autorisation alors que nous nous trouvons déjà au Centre Nganda avec d'autres grands séminaristes venus de différents coins du Zaïre. Faustin appela cet épisode "Mutshatsha", un lieu hécathombe où les FAZ déguerpirent lors de la guerre du Shaba.
En 1981- l'abbé Makolo fut nommé coordinateur national adjoint à la CEZ avec l'abbé Dibalu comme patron si ma mémoire est bonne. Les relations entre les deux tenors se détériorèrent lamentablement, créant irrémédiablement et ostensiblement une fissure qui consacra la division Nord-Sud du diocèse. Une page sinistre de l'histoire de ce diocèse dont les séquelles se ressentent encore subrepticement jusqu'à ce jour. Après ses mandats à la conférence épiscopale, l'abbé Oscar est retourné au diocèse notamment comme curé à la paroisse Notre-Dame de Malebo, puis économe diocésain, etc. Je ne saurais rien dire sur ces années-là n'ayant pas vécu ces événements personnellement.
Je l'ai revu en 2008, en 2017. Il me croyait enseignant aux Indes: University of the West Indies. La toute dernière fois le 15 juillet 2018 après-midi à la procure de Kenge. Je ne l'oublie pas car c'était après la fête du mariage d'Alice et Jude à Apocalypse, Ndjili. J'y suis vite passé rencontrer Oscar Lemfu qui m'attendait. Amos se trouvait à l'entrée en compagnie de l'abbé Robert Lusilu avant que les abbés Fansaka, Lemfu, Matonga et un autre ne nous rejoignent.
L'abbé Oscar Makolo, un autre qui n'a jamais eu de nom authentique zaïrois. Je me souviens de ses blagues universitaires sur les "curés". Autoritaire, cassant, mais humoriste à ses heures, Amos a servi le diocèse de Kenge et l'église avec ses capacités humaines et spirituelles. Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, il mérite respect et reconnaissance.
Je m'unis volontiers à la douleur de sa famille biolgique et du diocèse de Kenge en ce moment difficile de confinement. Kwenda mbote mbuta. Kuvila beto ve. Nzambi kuyamba nge na bwala na yandi. Amen.