Kin, 19 avril 24. Hier j'ai vécu une expérience inouie de circulation. Parti pur Bandal, je voulais faire une surprise à ma cousine Blandine. C'était sous une pluie battante, la rue s'est transformée en un fleuve drainant tous les immondices stagnants de la ville. Au niveau de Tshibangu sur l'avenue qui va du Pont Lunda Bululu vers Moelart. Du jamais vu. Jamais je n'ai auparavant roulé dans un tel fleuve, sous une marée haute. On pénétrait dans l'eau presque jusqu'au niveau des vitres, j'exagère comme à mon habitude. Il fallait simplement suivre le pas des autres voitures probablement habituées à ces situations. J'ai dû rebrousser chemin car la bretelle de sortie était devenue un immense golfe maritime. Du jamais vu pour moi. J'ai cependant acquis la conviction que la rue reste la même malgré les innondations. Cette fausse conviction m'a permis de l'affronter sans hésitation quoique l'eau puisse creuser encore plus profondément les trous.
Le soir, sur la route menant du Triangle au CNPP, la même scène s'est répétée, avec moins de véhicules impliqués mais sous la même pression psychologique. Je me suis rendu au centre neuropsycho pathologique sur rendez-vous avec le directeur. J'ai ainsi fait la connaissance du Prof Valentin Ngoma Malanda avec lequel j'avais rendez-vous. Une ponctualité parfaite. A 18 heures précises, j'étais dans son bureau. Un véritable labyrinthe car toutes entrées sont fermées avec des chaînes cadenassées comme on le voit dans certains films. J'ai été témoin de la présence des derniers fous livrés par la police urbaine au service de réhabilitation. Quel spectacle que de voir autant d'handicapés mentaux rassemblés à ce centre. Tous portaient des touffes de cheveux visiblement non peignés ni coupés depuis des mois, voire des années. Un était même torse nue. J'ai félicité le professeur Ngoma pour son dévouement au service de nos frères et soeurs souffrants de démence mentale, dans des conditions extrêmement difficiles. J'ai pu voir de mes propres yeux comment il s'y prenait pour rendre un petit sourire à ces personnes malades, peut-être désespérées. Comme toujours, certaines de ces personnes aux looks étranges pourraient être des faux fous, peut-être des agents informateurs pour des sociétés secrètes ou étrangères. Sélectionner l'ivraie parmi les bonnes récoltes, séparer le bon grain du mauvais, n'est pas facile lorsqu'il s'agit d'êtres humains. Quoi qu'il en soit, ces damnés de la terre ont aussi droit au respect comme à la dignité comme tous nos autres compatriotes.
Voilà où la circulation chaotique de Kinshasa nous a menés. Je suis encore là. Voyons ce que nous réserve la journée d'aujourd'hui.
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