16 août 2015

17.8.86: Les ordinations de Bandundu

Le 17 août 1986 eurent lieu à Bandundu des ordinations qui restent inoubliables dans les mémoires à cause de leur particularité. J'en profite pour souhaiter un joyeux anniversaire sacerdotal aux abbés Côme Ngiengo, Ghislain Mukanu, Albert Munkaba et à Mgr Jean-Pierre Kwambamba. Que le Maître de la Vigne bénisse leur saint ministère!
Le diocèse de Kenge était au sommet de la tension Nord-Sud. Vous comprendrez que je me limite à ce que tout le monde sait ou à ce qui a été vécu aux yeux de tous. La fonction de secrétaire que jai 'assumée ne m'autorise pas de divulguer des détails sensibles. Quelques mois auparavant, des abbés originaires du Nord avaient ouvertement exprimé leur désaccord vis-à-vis de la hiérarchie par un courrier signé en bonne et due forme. Ils s'étaient retranchés à la Paroisse Nto-Luzingu, soutenus par de nombreux symptahisants acquis à leur cause. Tout était mis en oeuvre pour que des désordres surgissent lors de la cérémonie des ordinations. Des pressions étaient exercées pour un changement de date ou de lieu. Alertés, le Redoc et les services de sécurité s'en étaient mêlés; le gouverneur Mananga ma Pholo avait pris les dispositions utiles.
Ainsi, contrairement aux habitudes, cette fois-là Mgr l'Evêque de Kenge était parti de Kenge pour Bandundu-Ville par la route de Mongata dans un convoi de quatre jeeps le 16 août pour atteindre le bac de Kwango-Kwilu autour de 16 heures. L'abbé Modeste Kisambu était là, il avait traversé de l'autre côté et organisé que le passage s'effectue sans retard. Je le revois encore parlant à l'évêque. On sentait la tension dans l'air et sur les visages crispés des gens. Des tracts circulaient dans la ville, réclamant la division du diocèse, insultant vertement le prélat et dénonçant sa gestion injuste des affaires du diocèse. L'abbé Liévin M'Banga assurait une dernière répétition de chants lorsque nous sommes arrivés à St Hippolyte.  Des agents de l'ordre étaient placés à tous les coins de la concession paroissiale. On a entendu beaucoup de choses que je me réserve de révéler.
Le dimanche 17.8 a eu lieu un événement inoubliable: des soldats armés affectés par les autorités politiques ont escorté l'Evêque depuis la salle qui a servi de sacristie jusqu'à l'esplannade des ordinations. J'étais présent, et je parle de ce que j'ai vu et vécu ce jour-là. Monseigneur était très tendu et a tenu ce jour-là une homélie impressionnante sur le sacerdoce, la meilleure selon moi. Malgré quelques piques inévitables, il s'en est tenu au texte qu'il avait mis par écrit. Tout s'est vraiment détendu lorsque j'avais appelé les diacres à l'autel pour que l'archiprêtre Charles Kapende les présente à l'Evêque. S'en est suivie une très belle cérémonie digne de la splendeur liturgique traditionnelle de Kenge.
Je passe les détails de la fête dans la salle paroissiale de St. Hippolyte. Une religieuse de la Charité de Namur avait commis une maladresse, que d'aucuns avaient qualifiée de suspecte. Le lendemain, nous nous sommes rendus à la région pour un entretien de courtoisie avec le Vice-Gouverneur, en l'absence du titulaire. Le 19.8, alors que tout le monde nous attendait sur la route de Kenge, Monseigneur l'Evêque, l'abbé Flavien Busina et moi avions pris l'avion SCIBE ZAIRE pour Kinshasa. Dans cet avion se trouvait également le Membre du Comité Central Joseph Singa Udjuu qui, présent à Bandundu, avait délibérément évité de se mêler aux tensions qui avaient entouré ces ordinations.
Ces événements regrettables m'ont laissé un goût d'amertume car ils avaient confirmé la division du clergé diocésain de Kenge. Même vingt-neuf ans plus tard, je revois les images défiler dans ma mémoire; je revis ces moments d'écart entre le ministère apostolique et l'aspect humain qui se reflète dans l'église de ce monde. Je ne peux que rendre grâce à Dieu de m'avoir donné le courage de le servir dans ces circonstances difficiles et exigeantes.




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