12 nov. 2022

Jubilé d'Or Sacerdotal - Abbé Charles Kapende

12 novembre 1972-2022. Jour de merveilles que fit le Seigneur. Jour du Seigneur, jour de louanges et de prières. Alleluia. Il y a cinquante ans Mgr François Hoenen ordonna prêtre l'abbé Kapende Swa-Yaamvu sur l'espace du désert à Kenge 1, derrière l'école primaire Nto Mazaya. Félicitations émues à l'aîné, au maître, au  confrère et au modèle qu'il a été pour beaucoup de nous. Revenons un peu arrière. 

1972, le Zaïre du Général Mobutu avec son programme d'authenticité et de zaïrianisation, s'est engagé dans une grave crise avec l'Eglise catholique. Le Cardinal caméléon Malula s'est réfugié au Vatican. Le Grand Séminaire Jean 23 est fermé; les séminaristes renvoyés dans leurs diocèses. La tension est à son comble. C'est dans ce contexte que nous nous avions appris d'abord l'ordination sous-diaconale d'un certain abbé Charles Kapende. Personnellement, je n'avais jamais entendu parler de lui, et je serai surpris de savoir plus tard qu'il était le frère aîné de Dominique, mon ancien condisciple des 3e et 4e primaires. D'ordinations on n'en entendait jamais parler puisque tous les séminaristes de Kenge envoyés à Mayidi ou Rome ne terminaient jamais les deux cycles. Le mythe sonnait comme une malédiction. Les détracteurs n'hésitaient pas à déclarer l'inanité du séminaire de Kalonda vu qu'il ne produisait pas les prêtres pour lesquels il a été érigé. Tel était le défi qui se posait aux formateurs de l'époque. Voilà que brinkessement surgissait de nulle part comme un don du ciel l'avènement d'une ordination inattendue. Quel courage pour un jeune homme que d'accéder au sacerdoce à une époque où l'église était affaiblie, ridiculisée, diabolisée par les autorités de la Révolution zaïroise. Il était formé qu collège jésuite de Kasongo-Lunda par le célèbre père Baton (?) avec ses amis Louis Nzala et Dominique Kahanga. Nous séminaristes de Kalonda avions eu la chance de le connaître parce qu'il avait passé quelques mois d'enseignement avec nous. Ses cours de religions tenus dans un enthousiasme envoûtant et émaillés de grec, hébreu et latin nous donnèrent du goût pour l'exégèse et les langues bibliques. Poète à ses heures, maître du verbe, le "sapeur" Kapsy fut un jeune homme dynamique, vivant, jovial et... plein d'humour. 

Que des souvenirs déjà de ce séjour. L'abbé Kapende nous expliqua les raisons pour lesquelles il avait postulé son intégration au diocèse de Kenge plutôt qu'au diocèse de Popokabaka qui pourtant le forma. Nous avions découvert un apôtre des jeunes et un aîné très abordable.  "Smile awhile and while you smile another smiles. There are miles of smiles when you smile awhile". "Chantez diables!" On s'en délectait de ses blagues intarissables François Mapasu et moi. L'autre jour, Arthur m'a rappelé "Tata Inspecteur puisque vous êtes arrivé brinkessement, les élèves ont eu peur". Ou encore: "Quidquid recipitur, recipitur ad modum recipientis". Kapsy, le Bon Kapsy, c'est cela. Il ne me revient pas d'évoquer ses défauts, car la générosité était à l'époque son plus grand défaut. 

Le 12 novembre 1972 fut le grand jour pour cet appelé du Seigneur. J'ai déjà commenté cette cérémonie à plusieurs reprises car ce fut la toute première ordination sacerdotale à laquelle j'assistai. Nous étions très fiers et honorés de son accueil à la procure: le Révérend Abbé Kapende nous connaissaient tous par nos noms. Ce n'était pas évident. Nous étions logés dans la salle des Petits Chanteurs et Danseurs de Kenge. Ce jour, je vis Papa et Maman Kapende; je revis Dominique et Constant. Il y avait aussi en vareuses vert-blanc et bottines bien cirées, les joueurs d'Imana de Kenge parmi lesquels Saio Manza et José Kimbuta. J'apprendrai que l'homme du jour s'entraînait avec cette équipe lors de ses vacances à Kenge. Tout ce que Kenge comme diocèse comptait comme prêtres, religieuses et religieux, missionnaires et grands séminaristes, était présent à cette mémorable cérémonie. De l'homélie de Mgr Hoenen, je retiens les explications du terme prêtre comme "ngungudi ya bakristu". Le commentateur avait impressionné beaucoup de nos amis dont Floribert Makakala qui aimait répéter: "Ntangu yai monsieur l'abbé Kapende ke baka lusampulu...." Un peu plus tard, le nouveau prêtre est venu célébrer ses prémices à Kalonda: j'ai déjà rapporté l'épisode du fou qui demandait pourquoi le mois suivant ne commençait pas par le 2 lorsque le mois précédent finissait le 31. Réponse du prélat après avoir saisi où ledit fou voulait en venir: "Bamindele bantu kusalaka yo buna." Quel esprit éveillé! Bref pour dire que cette ordination nous marqua tous très profondément et nous encouragea à persévérer dans notre cheminement vers le sacerdoce. En cela, l'apport de l'abbé Kapendson Fils, comme l'appelait affectueusement M Boubou, a été important. Mgr Hoenen était tellement conscient de cet impact sur les aspirants à la prêtrise qu'après une année de vicariat à St Hippolyte, l'abbé Charles Kapende fut affecté comme formateur au petit séminaire de Kalonda en 1973-74. Le reste a suivi son cours. 

Cette année-là 73-74, nous élèves de cinquième littéraire étions logés dans le premier bâtiment de la Maison régionale SVD occupé auparavant par les abbés M'Sanda, Makolo et le P. Overgoor, lesquels se déplacèrent dans le bâtiment qui abritait la chapelle des Pères SVD. L'abbé Kapende, les abbés régents Singa et N'Gob partagèrent avec nous l'autre bout du bâtiment. Kapsy avait l'habitude de nous réveiller brutalement. Alors des fois on s'arrangeait pour qu'au premier coup la porte s'ouvre. Alors il la poursuivait pour la marteler encore plus fort. Nous nous souvenons de ses homélies ya kafukafu et de "khalu madinga." Cette année-là, ce n'est plus un secret, des amis découvrirent sur du papier carbonne son choix pour le nouvel évêque de Kenge, et les justifications de son choix. Je le lis un peu plus tard. Nous n'étions pas donc surpris d'entendre le nom de l'évêque le 20 mai 74, de la bouche du P Charles Swertz rapportant un message de Radio Vatican ou de la Nonciature.

Après, la suite est connue. Licence en théologie pastorale à Rome, direction du petit séminaire de Kalonda et plus tard Katende, pastorale comme curé-doyen à Fatundu, Bandundu, formateur au grand séminaire St Cyprien. Que du travail rabattu pour ce diocèse et l'église provinciale. Le 14 août 78, c'est lui que l'évêque consultera pour que Faustin Mampuya et moi soyons retenus en régence à Kalonda. Je l'ai encore mieux connu cette année-là pour avoir travaillé sous sa direction. Ce fut aussi l'année de la grève du 23 mars 1979 qu'a rapportée Anaclet Mutaba sur ce blog. Que des souvenirs! En novembre 82, diacre, j'étais allé célébrer ses dix ans de sacerdoce à Fatundu. Nos rapports interpersonnels ont toujours été conviviaux et fraternels. Comme pour mes ainés, je garde un profond respect et remercie l'abbé Kapsy Charles Kapende Swa-Yaamvu N'Ketu Toma Ku Nzo N'kwenu N'Singa N'Situ", un nom que peu de gens connaissent ou reconnaissent. A la phonie, combien de fois ne m'a-t-il pas ciblé comme "M'Tikudi Mayanda". Voilà pour la companie. Je l'ai revu aux obsèques de l'abbé Mwela en janvier 19, et en janvier 21 à la procure de Limété. Il n'a rien perdu de sa jovialité malgré le coup de l'âge.

Il ne me reste qu'à souhaiter un heureux cinquatenaire sacerdotal à mon aîné, confrère et maître Charles Kapende. Que le Seigneur lui accorde la santé physique, spirituelle et mentale pour les années qui lui restent à vivre. Qu'il retrouve le sourire qui ne l'avait jamais quitté du temps de sa jeunesse. Merci Kapsy pour tant de bienfaits en ce jour mémorable. J'étais là il y a cinquante ans. Rendons gloire au Maître de la Vigne en ce jour béni.  

 

  

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