13 janv. 2015

"Une maman ne meurt jamais dans le coeur de ses enfants"

Cette phrase que j'ai écrite le 10 mars 2013 pour consoler mes amis Noël Matonga et Evariste Pini-Pini s'avère éternellement, confirme un parcours de vie personnel et une expérience que je vis au jour le jour. Je vais remonter dans mon propre passé. 
Enfant, j'étais le chouchou de toutes mes mamans, partant des propres soeurs et demi-soeurs de ma maman jusqu'à mes tantes tentaculaires à différents endroits où j'ai eu à vivre. Je me suis trouvé aussi une maman en Allemagne; à sa mort, une autre l'a remplacée. Ma Mbuta, Ma Madiya, Ma Lumengu, Ma Kutala, Ma Mbongu m'ont entouré d'un amour qui ne s'est jamais éteint dans mon coeur. Très tôt, j'ai senti la chaleur de cette filiation maternelle qui m'a permis d'affronter avec un relatif succès certaines adversités de la vie.
Septembre 78 est morte une cousine à moi, Brigitte Mabaka. L'enterrement a eu lieu en mon absence alors que je me trouvais en régence à Kalonda. J'avais d'ailleurs blâmé Séraphin qui effectuait son stage pastoral à Kenge de ne m'avoir pas informé de la tragédie. Lorsqu'une semaine plus tard, je me présentai sur la rue Musey, ma tante Mama Vivianne m'a raconté qu'elle voyait sa fille morte tous les soirs. Rationaliste à l'époque, j'ai tout de suite pensé à une illusion psychologique sans gravité. Je n'y ai cru que quinze années plus tard lorsque Louise est décédée alors que je me trouvais en Suisse.
J'ai toujours prétendu avoir une relation télépathique avec ma mère Christine Matsasu. Mais je ne l'ai pas sentie le jour où elle est morte. Alors pas du tout. Allez-y voir. Et pourtant, j'avais prédit sans y croire fermement l'approche de sa mort. Mes dires se sont réalisés beaucoup plus vite que j'avais pensé. Et à chaque tournant, il y a eu ce que j'appelle le dialogue manqué. Elle est partie sans me dire au revoir, à moi son fils, son premier rejeton. Le dialogue manqué, je l'ai éprouvé à la mort de Ma Véronique, car j'aurais pu lui parler lorsqu'Adrienne m'a informé de sa grippe. Au-delà de ces événements terrestres, il y a un dialogue ininterrompu qui s'est tissé depuis le cordon ombilical dans la nébuleuse des entrailles. Maman est là chaque fois que mon coeur l'appelle. Ma Véronique est partie, mais elle demeure vivante dans notre coeur. Il ne s'agit nullement de faire une apologie de la mère, une sorte d'ennuyeux verbiage, car l'amour d'une mère se tait, se contemple dans le silence et se vit sans forces démonstrations.
Quelques années après la mort de sa mère, mon ancienne doyenne Hazel Simmons McDonald m'a affirmé que chaque jour qui passait lui rappelait que sa mère était décédée la veille. N'est-ce pas une image profonde de ce lien éternel? D'autre part, une vie peut basculer dramatiquement à la mort d'une mère. J'ai tenté en août 94 d'aider un adolescent, Tobias Messner, qui a renoncé à tous ses projets de vie (formation, travail, vision), à retrouver des raisons d'espoir après la mort de sa mère. "Celle pour qui je voulais faire tout, n'est plus là. Was soll das?" Je lui avais rétorqué que sa mère qui l'a mis au monde serait fière de le voir, depuis l'au-delà, réussir dans la vie. Dix ans plus tard, il m'a recontacté par la magie de l'Internet, pour me remercier, mais aussi pour me dire que sa mère lui avait sauvé la vie en lui prodiguant les conseils dont il avait besoin pour se remotiver à chaque échec.
"Une maman ne meurt jamais dans le coeur de ses enfants. Sa mort ne change rien au lien profond qui les unit inextricablement".

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