29 août 2016

La pensée de Fabien Lengelo


28 août 2016. Je n’ai pas dormi de la nuit. A peine deux ou trois heures, pas plus. Peut-être même moins.  C’est le jour du grand retour à la Barbade après près de deux mois d’absence. Il est déjà 7h lorsque la petite société civile quitte Granville Road. Ephrem Mosimi, mon beau-frère, est un habitué de cette route. Il connaît Londres comme sa poche. La jeep VW  est tellement chargée, voire surchargée qu’il a suggéré à un moment donné de nous déposer à Victoria. A cause du carnaval caribéen organisé ce weekend, il est obligé de faire un détour vers Wembley pour trouver une voie de secours pour arriver à temps l’aéroport. Heureusement, le trajet vers Gatwick se passe sans encombres : pas d’embouteillage ni de trafic.
A présent, pendant que je me trouve dans l'avion entre Londres et Barbados, je me souviens d'une très intéressante conversation que j'ai eue à la SOAS (School of Oriental and African Studies, University of London) avec Fabien Lengelo, un compatriote très critique vis-à-vis de la gestion politique de l'Afrique. Il insistait sur la nette différence qui existe entre nos pays et les pays développés. Je le cite de mémoire :
« Chez nous en Afrique les gens en commençant par les autorités ne se comportent pas correctement; celles-ci  pensent qu’elles peuvent tout faire impunément. Regarde ce qu’elles font au Congo avec les élections ; au lieu de les organiser comme le veut la Constitution, elles instituent de toutes pièces un soi-disant dialogue dans le seul but de rester au pouvoir, oubliant que tout ce qui a un début a aussi une fin. Je doute de leur intention de lâcher le pouvoir. Elles se considèrent comme des dieux parmi les hommes, prêtes à révoquer un agent de ses fonctions simplement pour l’avoir croisé dans le couloir. C’est la loi du chaos et de la jungle qui règne chez nous. Le règne de l’arbitraire. Comment par exemple expliquer qu’un ministre s’empare des biens publics sans être inquiété ou qu’il détourne l’argent de l’état sans qu’il ne subisse aucune sanction ? Ces autorités sont elles-mêmes les agents de la corruption dans le pays, du terrorisme d'état, du banditisme, des kuluna au cas où elles ne le seraient pas. Kuluna en cravates! Tout est militarisé. Un dictateur en cache toujours un autre, en plus bavard ou en laconique, en plus incompétent, mais tout aussi pilleur, tueur, démagogue, militariste et sanguinaire. Seule la violence terroriste guide leur action. Et leurs militaires ne sévissent que contre leurs compatriotes au lieu de les défendre contre les étrangers. C'est pour ne plus voir ça que j'ai choisi l'exil. Nos soi-disant autorités démontrent leur incompétence et leur incapacité de bâtir le pays, de construire les routes, d’ériger des écoles compétitives ou des hôpitaux. A se demander si elles ont un sens de leur statut d’intellectuel ! Bref, le sens de l’Etat n’existe pas. Ces gens voyagent, viennent et voient ce qui se fait en Europe ou en Amérique. Au lieu de se remplir les poches de l'argent du sang, il ferait mieux, faute d'inspiration ou d'esprit d'innovation, d'imiter ce qu'ils voient ici. N’aurait-il pas été mieux de laisser les Blancs nous gérer car du temps de la colonisation les écoles et les hôpitaux fonctionnaient mieux qu’ils ne le sont aujourd’hui ? Nos parents possédaient des biens et des équipements qu’ils ne peuvent plus acquérir. Les faits montrent que les indépendances n’ont pas apporté la prospérité espérée ni les droits civiques qui relèvent de l’état moderne. Les Européens nous traitent mieux que les pays dont nous sommes ressortissants. L’exil, qui qu’on pense ou dise, possède aussi sa part de magie. Les migrations répondent à un mal-être palpable dans nos pays. »
Pour la petite histoire, Lengelo possède un MA en gestion financière et bancaire. Il dirige un petit bureau d'études stratégiques à Londres. Après l'avoir écouté, je lui ai conseillé de diffuser ses idées par écrit, et plus concrètement de rentrer bâtir le pays car il y a actuellement des opportunités inestimables pour les jeunes entrepreneurs en Afrique. Il ne doit pas forcément faire la politique, mais mettre ses compétences au service du pays.

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