Un pays n'est pas un village. Il y a des hégémonies que l'on voudrait nous imposer mais qui résistent à passer l'épreuve du peuple. Les rouages de la machine politique possèdent des anicroches insoupçonnés. C'est rassurant d'avoir l'appui des militaires mais on ne sait jamais dans quelle direction se dirige le viseur des armes. Les nouvelles qui viennent du Zimbabwe semblent confirmer une déstabilisation du pouvoir du Président Mugabe complètement pris dans l'engrenage des luttes de succession auxquelles se livrent ses proches. Dans sa fulgurante ascension, DisGrace qui mène la barque politique depuis des années - car on sait pertinemment que le sénile nonagénaire ne possède plus l'entier usage de ses facultés - a réussi le coup d'écarter deux vices-présidents en poste. Des observateurs notent avec insistance que le président obéirait au doigt et à l'oeil de sa dame de fer aux ambitions considérables; que le sort du pays se déciderait dans la chambre à coucher des époux Mugabe. Cela a toujoirs été ainsi. Mais cette fois, c'en était trop. L'armée a dit son mot; elle a fait entendre sa raison.
Cette situation de.confusion m'amène une fois de plus à revenir sur la démocratie en Afrique. Nous avons vu des présidents se succéder à eux-mêmes en mutilant ou tripatouillant leurs constitutions; nous avons vu des fils succéder à leurs pères par des manoeuvres frisant l'imposture; nous avons tout vu. Tous les cas de figures ont déjà eu lieu. Nous voyons aujourd'hui Mr. Mugabe paver le chemin en faveur de sa propre épouse afin que cette dernière lui succède à la tête du Zimbabwe. C'est là que la sordide politique s'est montrée dans toute son envergure. Comme pour se moquer du peuple et des règles démocratiques, il n'a pas trouvé de meilleure solution que de laisser le pouvoir aux mains de son adorable dulcinée. Sommes-nous vraiment en démocratie? L'histoire du pays se confondrait-elle avec celle du couple Robert-Grace Mugabe? Du jamais vu. Comme s'il s'agissait d'un portion de gâteau ou d'un bien personnel, on se distribue de façon démocratique le pouvoir d'époux à épouse, de père à fils, de fils à frère. On dispose tous les rouages démocratiques au profit d'une cause nationale délibérément confondue avec celle de sa famille. Des liens tissés sur des soubassements politico-familiaux, des alliances montées pour contrôler tous les moyens de production et toutes les ressources du pays, tracent dorénavant le destin des millions des citoyens réduits à des simples spectateurs appauvris, tacites, muselés, intimidés et terrorisés, forcés de chanter la gloire de leur bienheureux dictateur. Des choses qui ne se passent qu'en Afrique, ou dans des pays à la pensée unique. Le Zimbabwe se retrouve dans ce cycle infernal depuis que son vénérable père de l'indépendance, perdu dans la schizophrénie despotique et manipulé par des prédateurs "criminels" et sans vergogne, s'acharne à imposer sa mainmise sur la destinée du pays.
Si Mme Mujura a été évincée sans difficulté quoique de façon spectaculaire, le cas de Mr Emmerson Mnangagwa s'avère plus difficile et compliqué. L'armée est intervenue pour remettre de l'ordre en chassant les vautours rapaces et "criminels" qui tournent autour de RM et imposent la pauvreté, la famine et la misère aux braves Zimbabwéens. Elle a écarté l'idée d'un coup d'état alors que la réalité sur le terrain démontre le contraire. Les médias rapportent que R Mugabe serait en résidence surveillée. Reviendra-t-il au pouvoir? S'il y revient, ce sera dans quelles conditions? Comment se résoudra le problème de sa succession? Grace Mugabe, si elle revient aux affaires, réussira-t-elle encore à faire passer ses intrigues de coulisses pour faire tomber toutes les têtes non désirables? L'aveuglement de l'ambition politique tue plus fréquemment qu'il ne libère mentalement l'individu.
Les guerres de succession ouvrent souvent des portes inattendues. Malgré l'improvisation des circonstances, les choix sont téléguidés par les faiseurs des guides providentiels et des dictateurs sans coeur. Suivons de près ce qui se passe aux pays des Shonas. Un autre cas dans l'histoire de la démocratie africaine. Politique, politique! Mani pulite.
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