13 févr. 2021

Réussir dans la vie

C'est d'abord une question de philosophie individuelle avant d'être générale. Réussir dans la vie ou réussir sa vie, cela s'entend pareillement. Cette expression s'utilise souvent à temps et à contre-temps. Généralement réussit sa vie celui ou celle qui a suivi une bonne scolarité primaire, secondaire ou professionnelle, exerce un métier louable et arrive à satisfaire ses besoins courants et ceux des siens (famille, dépendants). Est-ce correct? Le critère est souvent le métier que l'on exerce, sa valeur financière et son poids social. Autrement dit, mener une vie décente sans tomber dans l'extrême pauvreté ni accéder à la notoriété de l'abondance matérielle ou financière. A juste titre on parle de classe moyenne. S'il est évident que le riche a réussi sa vie, il n'en est pas de même pour le pauvre. C'est là le point de la discussion. Un point fondamental car il définit la justice et le niveau de la distribution des biens et des richesses d'un pays. 

Dans un contexte normal, réussir sa vie reviendrait à opérer positivement dans les étapes de la vie que j'ai citées plus haut. Dès l'enfance, on est préparé à fréquenter une école où l'on apprend un métier pour servir la société tout en étant rémunéré. L'injustice intervient lorsque les uns puissants et pilleurs prennent tout et ne laissent rien. Et souvent le partage du pouvoir selon le savoir tant prôné jadis ne correspond pas à la réalité. Réussir revient à zigzaguer positivement ou intelligemment dans ce maillon. D'où l'imposture, le vol, l'extorsion, l'usage de la force et des armes. D'où les détournements des millions au détriment de la population muselée et laissée à sa précarité. On encense le voleur qu'on gratifie du titre d'honorable ou d'autorité morale, de patron ou de riche. On méprise le pauvre qui n'a jamais su voler ni piller les biens de l'état ni des autres. L'immoralité est récompensée tandis que la probité est vilipendée. 

Au-delà de la caricature il y a l'école de la vie qui est bien plus importante car elle dispose l'homme à trouver des solutions concrètes à ses problèmes, à s'organiser et à juger la vie avec droiture et mesure. Certains métiers dénigrées chez nous sont porteurs d'énormes richesses ailleurs. Le Pape de la Sape dont j'ai parlé dans une entrée précédente incarne des antivaleurs, la vulgarité et la légereté des moeurs. Un habit, si onéreux soit-il, demeure une couverture pour cacher la nudité du corps. Rien de plus. Il ne donne de l'honneur qu'à l'insensé qui y croit. Le comble est de prêcher à travers les radios et médias que cet homme a réussi sa vie. Dieu seul sait comment il a acquis ces biens et cette notoriété. L'inutile est placé au sommet des valeurs, c'est ce que le Pape de la Sape a réussi à inculquer à une jeunesse sans repères ni visions. Il a réussi puisque son impact reste intact même vingt-six ans après sa mort. Il a réussi puisqu'il y a personnes qui partagent son idéologie de la "forme" et de l'élégance. Loin de moi l'idée de détruire cet héritage devenu national. Mais nous avons besoin ou intérêt à mieux éduquer nos enfants et notre jeunesse contre ce genre de dépravations. 

Une éducation pour la réussite, la vraie réussite d'une vie stable, ordonnée et honnête. Là c'est le prédicateur qui parle, mais il le faut bien parfois. J'ai du mal à tolérer l'anarchie, l'anticonformisme. Je crois qu'il me faut accepter la différence, que l'apport de l'autre qui pense autrement que moi, contribue aussi à mon épanouissement intérieur. J'ai souvent tendance à tirer la balle de mon côté, penser à la place des autres et à imposer ma vision comme la seule vraie. C'est pourquoi je ne crois pas à la politique. Hier encore je comparais ma vision des présidents congolais et français. J'ai décelé a posteriori la grandeur écrasante de Mr François Mitterrand au dessus de la mêlée et de Mobutu comme quelqu'un d'éminemment intelligent avec ses analyses prophétiques. Les deux étaient des brillants orateurs médiatiques. J'étais surpris de lire avec netteté l'étiquette de "voleur" sur certains visages à travers certaines déclarations ou attitudes. Aucun autre ne m'a convaincu de leur envergure autant que les deux précités. Je ne les canonise pas comme des saints immaculés car je suis aussi informé de leurs crimes. Au final, le sinistre Mobutu n'a sûrement pas réussi sa mission, alors que le fin Mitterrand demeure grand dans l'histoire séculaire de la France. Au final, aux yeux des Congolais, Mobutu qui a amassé des millions a réussi contrairement à Kasavubu qui n'a pas pillé les caisses du pays et est mort relativement pauvre. De quelle réussite dans la vie parlons-nous finalement?

Ce raisonnement n'engage que moi. Réussir dans la vie n'a à avoir avec l'amassement frauduleux de l'argent et des biens, ni avec la réputation que reçoivent sur scène les hommes de la politique, des médias ou du spectacle, mais c'est l'aboutissement d'un dur et constant travail. Réussit celui qui vit conformément à sa conscience et réalise honnêtement ses nobles objectifs. Malheureusement, ce qui se vit dans la réalité a changé la vision du monde: l'imposteur ou le receleur mènent la barque de la réussite.

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