Il m'arrive souvent de me poser la question de savoir si je suis un homme libre. Au fond de moi, je crois que je suis un homme libre, un homme qui peut déterminer le sens de sa vie, s'auto-déterminer, s'assumer jusqu'à la limite de sa responsabilité. Au fond de moi-même, je ne cède qu'à ce que je crois moi-même. Je refuse d'être guidé par une autre conscience que moi-même. Même les ordres, je les reçois avant de les exécuter. Au nom de cette même liberté que je revendique, je suis prêt à affronter tout ce qui la contredit.
Aucune autorité terrestre ne dicte ma conduite; seule ma conscience me dirige. Je n'ai pas de président à me dicter sa volonté; ni de ministre à décider pour mes choix; encore moins de députés à parlementer pour moi. En cela, je suis libre. Lorsque je ne suis pas d'accord, lorsque je me sens attaqué dans ma liberté, je me défends. Tout cela, c'est ce que je prétends. Suis-je vraiment un homme libre? C'est à ce point que la réalité me rattrape.
Je dirais: euh, non. J'appartiens à la race des parias du monde, à la classe des colonisés et des déshérités de leur dignité humaine. Voilà ce que je suis. J'ai un mauvais passeport qui restreint ma liberté aux humeurs de mes hôtes. Voilà ce que je suis. J'assume une identité que je n'ai pas en réalité. On ne me respecte pas à cause de mon identité, de mon groupe ethnique, de ma peau. Pourquoi? Parce que c'est moi. Je crois que, de ce point de vue là, je ne suis pas un homme libre, car les choses qui m'arrivent, personne d'autre ne peut les vivre et les supporter sans "craquer". Moi, je suis patient c'est-à-dire je sais souffrir et subir exploitations, injustices, agressions et autres atteintes à mon intégrité.
Je suis mal-né. C'est pourquoi je n'ai pas accès aux droits universels de l'homme.
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