6 juin 2013

L'engagement selon l'écrivain togolais Sami Tchak

Le texte de Sami Tchak que j'ai lu sur la page de  Yanick Lahens est intéressant et fascinant à plus d'un titre. L'auteur, sociologue, philosophe et écrivain de son état, fait montre d'une culture littéraire que même un professeur de littérature lui envierait. C'est vraiment un plaisir de lire un tel texte qui paraît à la fois informé et basé sur une solide argumentation. Son analyse de l'engagement est correcte, équilibrée et marquée par un souci d'objectivité quoique parfois transparaisse une veine subjective, ce qui n'est d'ailleurs que son droit le plus légitime. Nous apprenons là, au-delà des considérations historiques et des témoignages bien choisis, une définition de l'écrivain. Par l'acte d'écriture, l'écrivain se détermine lui-même sa réalisation existentielle. Le choix de l'engagement dépend de l'individu qui sent la tragédie de son peuple, à sa manière, l'intègre dans son œuvre en utilisant les outils linguistiques ou médiatiques qui sont à disposition. Le texte de Tchak met en garde contre la "commande" imposée par les pouvoirs financiers, culturels ou politiques. La différence d'engagement qu'il donne entre les anciens écrivains et ceux de la nouvelle génération, entre la littérature "locale" et celle "d'exil" confirme des points de vue que je partage et défends dans mes écrits. Plusieurs paramètres entrent en ligne de compte pour évaluer la réception d'une œuvre. Un écrivain peut se définir "engagé" sans que son œuvre ne le montre. Peut-on attendre d'un jeune homme et d'une jeune femme nés en ville de dépeindre les "cultures primitives" de nos villages africains avec la même passion que le feraient un Mongo Beti, Oyono ou Kourouma? Chaque temps a ses coutumes. D'autre part, les écrivains qui ont une visibilité aujourd'hui ne sont pas forcément les meilleurs sur le plan de l'art littéraire ou stylistique. Calixte Beyala comme Alain Mabanckou ont découvert des sujets de consommation immédiate que leurs lectorats adorent, et autour desquels tournent la plupart de leurs écrits. D'où leurs succès en librairie et en édition. Ces deux voix illustrent bien ce que j'entends par francophonie périphérique: marginalité, races, noir(e)s en Occident, sexe, exil, prostitution dans un contexte d'entre-cultures ou de mondialisation. Est-ce de la littérature engagée? Je sais bien que Beyala est une féministe très engagée, que son œuvre l'est en partie. C'est quoi finalement l'engagement en littérature?
Merci Sami Tchak pour votre texte si profond qui ouvre de riches perspectives de réflexion sur la littérature francophone.

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