Lorsque je suis arrivé en Suisse pour des études de lettres, j'étais intrigué par la langue allemade suisse, le suisse allemand comme on disait. Habitant chez les missionnaires d'Immensee à Tory, j'ai très vite été confronté à ce nouvel environnement linguistique bilingue. La transition n'était ni difficile ni facile, j'ai pris le temps de m'adapter sans trop de problèmes. J'étais néanmoins surpris d'entendre "Vierzig" un peu partout: "Mais qu'est-ce que ces Suisses ont avec ce chiffre 40 qu'ils répètent à longueur de journée?" Loin de moi l'idée que c'est une formule de salutation. Arrivé mi-novembre 87, je me suis organisé pour fêter le Nouvel An 88 à Munich. Là, je me suis remis dans l'ambiance bavaroise qui m'était relativement plus familière. "Grüss Gott" se dit en Bavière pour entamer un dialogue au téléphone, au restaurant, à la poste, en route, partout. Sur mon chemin retour, les controleurs ou douaniers suisses, qui sont montés dans le train à Bregenz, dévoileront l'énigmatique casse-tête en saluant: "Grüezi miteinander". Déclic dans ma tête! "Ah bon, me suis-je dit, le fameux Vierzig que j'entendais était en réalité Grüezi" C'est la première fois que j'ai entendu ce mot aussi clairement et nettement prononcé. Est-ce que ceux qui me l'avaient dit auparavant le prononçaient mal? Je ne saurais l'affirmer d'autant plus que c'était leur langue maternelle. C'était plutôt moi dont l'oreille n'était pas habituée à la diction suisse allemande. A partir de ce séjour en Allemagne, le suisse allemand devient un peu plus compréhensible. Il m'a donc fallu, aussi paradoxal que cela paraisse, un detour par la Bavière pour comprendre le Schweizerdeutsch ou Schwiitzertüütsch. Depuis, je me suis débrouillé tant bien que mal dans mes activités pastorales à Muttenz, Burgdorf, Riehen, Bern, Gstaad, Zweisimmen, etc. Une expérience très instructive pour un homme sensible aux traits de langues. Dans une langue étrangère, on perçoit souvent autre chose que ce qui est dit, on sélectionne souvent les sons pour tenter de créer une signification. Pourquoi le cours de français proposé par le Commandant au roi Djigui a-t-il été interrompu? C'est qu'en réalité il entendait le français en malinke, et cela donnait des phrases indécentes, moralement condamnables. Ce fut aussi mon approche face au suisse allemand.
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