Notre pays est à la dérive. Difficile à accepter mais c'est la vérité. L'état dans lequel il est fait pitié. On dirait un no man's land. Sur tous les plans rien ne marche. Alors rien. Commencez une démarche aussi simple que chercher un passeport, obtenir un acte de naissance ou un jugement supplétif d'acte de naissance, vous verrez l'inimaginable. Confiez un chèque en bonne et due forme à quelqu'un, il y a un marathon pour l'encaisser. Passez à l'hôpital visiter un malade, ou vous faire examiner, vous ferez face à l'impensable. A l'Inrb quand même, j'ai trouvé de l'ordre quoique l'on doive être sur ses gardes semble-t-il. Peu de services, très peu alors fonctionnent comme il faut. Surtout pas l'église du coin où le pasteur charlatan clame ses aventures amoureuses comme des trophées de guerre et des performances olympiques. Surtout pas le presbytère du prélat domestique dont le train de vie luxueux côtoie la précarité misérable de ses ouailles. Encore moins chez le sorcier qui vous dira que vous portez des épingles, des barres de fer, des arêtes de poisson ou du poison contagieux dans votre ventre. Sans oublier le commerçant dont le serpent avale la totalité des affaires de ses rivaux.
Blague à part, le pays va mal, il va même à la dérive. Tous les paramètres de base d'un état font défaut ou ne fonctionnent pas. La tribu au pouvoir dicte sa loi sur les autres: la totalité des postes du pays sont entre leurs mains; et on empêche qui que ce soit de s'insurger contre ce système tribaliste érigé en principe de gouvernement. Le cardinal catholique en a dernièrement fait l'expérience. Et les marionnettes des institutions de gestion du pouvoir ne sont là que pour célébrer le maître des céans. La roue tourne en faveur d'une victoire écrasante aux élections prochaines de 2023. Tout est mis en oeuvre pour atteindre cet objectif: la cour constitutionnelle, la commission électorale nationale indépendante, le parlement, le sénat, les services de sécurité et de l'ordre, sont pilotés par de solides partenaires ou des supports tribaux. Là c'est la politique. Rien n'augure une sortie heureuse du tunnel.
J'ai entendu, j'ai vu, j'ai vécu. Avez-vous jamais vu dans un pays au monde un prisonnier construire des immeubles et dont les affaires prospèrent alors qu'il a été mis en tôle pour justement avoir détourné des fonds de l'état? Règlement de comptes certes, mais la réalité sur le terrain est déconcertante. Un prisonnier qui n'avait rien il y a trois ans se trouve soudain propulsé au sommet des magnats millionnaires congolais alors même que sa carrière politique est compromise. De quoi dire que tout ce qui est mauvais, le pire, se passe dans notre pays. Des salaires mensuels de 100 mille, 680 mille, 2.5 millions US Dollars sont perçus par des agents de l'état dans un pays où la majorité vit en-dessous de 1 dollar la semaine. Incroyable, mais cela se passe dans ce pays. Des individus, des haut gradés de l'armée comme des individus, usurpent impunément des biens de l'état, possèdent ou gèrent des gisements d'exploitation minière avec la complicité des étrangers. Des Chinois, Libanais, Indiens, Juifs gèrent désormais toute l'infrastructure économique: diamant, ciment, brasseries, grandes surfaces, coltan, or, bois, etc. Ils occupent tout l'espace macroéconomique et financier ainsi que tous les moyens de production. Le chemin de fer est maintenu dans un piteux état de délabrement afin de permettre à des sociétés privées d'assurer le transport des matières premières. J'arrête là. Je croyais rêver, mais une partie de ce que j'écris là s'avère vraie.
En fait tout est faux dans ce pays. Les statistiques officielles sont fausses comme le recensement de la population. C'est même un non-état. Un non-pays. Comme dans un film fictif, les décisions sont prises à la hâte sans vision ni perspective d'amélioration. Une pègre sans conscience gère ce pays dans une incompétence délirante. L'argent du pays se détourne en centaines de millions par jour. Le pays est pillé systématiquement par ceux-là même qui sont censés en assurer l'intégrité et l'unité. Les factures d'eau et électricité se paient sans que ces précieuses denrées soient décemment livrées. On peut les effacer avec la complicité des agents de la Régideso ou de la Snel. Le système de gouvernement ne sert nullement le peuple qui continue de croupir dans la misère. Nos familles vivent dans une pauvreté inouïe. Un pays à la dérive. Entrez dans les quartiers populaires, fiefs des Kuluna, vous vivrez dans une insécurité totale. Regardez les Wewa circuler à travers les rues et les routes du pays, vous obtiendrez le véritable profil de ce pays. La dérive, et nul ne saura redresser la barre. Je suis pessimiste certes, mais je ne vois pas, je ne sens vraiment pas comment on pourra s'en sortir. Le pillage, la corruption sont systématiques. A chaque retour au pays, je constate que la situation empire, le pays sombre inéluctablement dans le marasme. "Why don't you manage your country properly?", question posée par Jeffrey Sachs à un ministre de ce pays. Un pays à la dérive, pillé par Léopold II, par les Belges, miné par une administration criminelle et par une dictature sans nom à répétition. Voilà ce qu'est ce pays! Rien ne le délie de ce destin fatidique.
On me dit qu'ailleurs en Afrique, c'est pire. Je n'ai pas été ailleurs sauf à l'aéroport de Bole à Addis. J'étais impressionné par la compagnie aérienne Ethiopian et l'infrastructure que possède ce pays pourtant moins riche en ressources naturelles que le nôtre. Allez-y voir. Où va l'argent de notre pays??? "C'est notre tour aujourd'hui, attendez le vôtre", qu'un crapuleux quidam me rétorque comme pour me narguer. "Interrogez plutôt le régime précédent que le régime actuel. Vous risquez d'être éliminé si vous continuez dans cette direction. Regardez et taisez-vous sans élever la voix, c'est la sagesse." Et moi de conclure que nous sommes simplement maudits, damnés à la mort. Il n'y a pas mieux à dire dans un pays à la dérive et sans avenir. Au lieu d'être gouverné, le pays est pillé à tous les niveaux, même par des prisonniers détenus pour détournement et dont les affaires prospèrent. Nous sommes les "damnés de la terre" dont parlait Frantz Fanon. Des générations sacrifiées par la cécité de nos leaders.
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