Ce matin autour de 9h00, à Brownes Beach, j'ai eu un entretien de courtoisie avec Alison Hinds en lui disant en français: "C'est le secret de votre succès en musique?". Comme elle n'a pas tout compris, j'ai traduit en anglais. "Yes, it. Hard work. Hard work". Alison est une vedette internationale barbadienne que le monde de la musique appelle : The Queen of Soca Music. Sans savoir que ce dialogue préludait une triste nouvelle qui m'attendait au bureau: la mort de King Kester ce 13 février 2014 à Plessis-Robinson en France.
Après Pepe Ndombe, Tabu Ley, voilà que Jean Emeneya Mubiala Nkwamambu alias Kester, un artiste bourré de talents qui a connu ses heures de gloire et de mérite. La RDC, le Bandundu perdent un autre de leurs vaillants fils, un artiste de grande rénommée. Le compositeur de Okar ekob ou de Nzinzi a fait vibrer les cordes de sa voix à travers tous les continents et a vaillamment défendu la culture du pays. Que son âme repose en paix!
Je ne l'ai pas connu personnellement, je n'ai connu que sa musique car un artiste se valorise par son oeuvre. J'ai cependant connu son petit frère qui étudiait à l'école des sourds-muets de la MC Beno. Ils avaient des traits communs: le jeune imitait la coiffure de son frangin. J'ai par contre des proches qui ont étudié avec lui à l'INDOBO et à l'université de Lubumbashi. Le Kester que j'ai le mieux connu est le jeune talentueux de Molokai grâce à un ami fanatique, Jean-Willy Kindanda qui se renversait, envoûté, par terre pour se tremousser au rythme de ses morceaux en kimbala. Oui, c'était un grand-prêtre de la musique congolaise, King Kester Nkwamambu.
Ce monsieur avait quand même personnalité bizarre. Se prenant pour un très grand artiste, un rare phénomène, Emeneya était un vantard, imbu de lui-même, voire arrogant à beaucoup d'égards. Je me plaisais souvent à écouter son auto-célébration et une affirmation exagérée de son ego à travers ses interviews. La vedette du Mayumbu s'attribuait beaucoup de choses, beaucoup de réalisations dont personnelement je me doutais. C'était un artiste; il fallait le prendre comme tel. Compositeur de talent, il l'était. Appréciateur de musique, il l'était également: il adorait son maître Tabu Ley comme une vénérable icone. Sa voix unique a fait le bonheur de millions de mélomanes à Kikwit comme à Kahemba, à Kinshasa comme à Luxembourg où j'avais apprécié sa version de la litanie kikongo de l'abbé Kinzanza.
Hiver 2000, Berlin. J'aidais un professeur de l'Unikin et des Facultés catholiques à choisir un véhicule dans un marché public de voitures, lorsqu'un compatriote nous a approchés: "Bo zo luka BMW ya Kester?" (Vous cherchez une BMW de Kester?). On n'en savait rien, même le professeur de Kinshasa n'en savait rien. On a compris que Kester devait se pavaner dans les rues de Kinshasa avec une BMW dont il avait sans doute été le premier possesseur. De la même façon qu'on avait appelé la Mercedes 190 Bobi Ladawa. Emeneya était une personnalité en vue dans la ville de Kinshasa, un leader confirmé de la musique congolaise et africaine.
Ngwashi Kester, kwenda mbote. Lufwa kele nzila ya beto yonso. Nzambi kuyamba nge na bwala na yandi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire