Comme à mon habitude, j'aime bien ironiser sur certains métiers. J'exècre la politique, mais je suis candidat aux prochaines élections. Je déteste l'argent, mais je me fais payer pour le travail que je fais. Je prêche la modestie et la tolérance mais je ne cache pas mon amour-propre ni mon intransigeance vis-à-vis de certains principes. Je dresse un portrait peu luisant des pasteurs, mais je ne manque pas de les envier, du moins de vouloir jouir de leurs privilèges et autres honneurs.
L'intention de devenir pasteur me tente depuis quelques mois. Ne me prenez surtout pas au sérieux, sinon je serais resté là où j'étais. Une tentation typique d'un homme instable et peut-être insatisfait de sa vie, mais d'un homme quand même. Tournure littéraire vide de sens! Les pasteurs vivent bien quoique leur réputation soit ternie par quelques individus maladroits. C'est un métier en or qui n'épargne personne et attire toute personne désireuse de servir l'Eternel Jahvé hors des églises dites traditionnelles. En jetant un regard sur la vie de mes compatriotes, je constate des réalités surprenantes.
Des politiciens sont devenus des pasteurs. Des musiciens sont devenus des prophètes, des bergers, des diacres. Des danseuses sont devenues de saintes diaconesses, des servantes, des soeurs en Christ.
Des aventuriers criminels animent des soirées de délivrance et de guérison. Des hommes de vie immorale se sont transformés en prédicateurs de l'évangile. Pourquoi pas moi? Cur non ego?
Moi qui ai une solide formation ancrée dans la vie religieuse depuis ma tendre enfance. Servant de messe, petit séminariste, grand séminariste, acolyte, lecteur, diacre, prêtre diocésain. Autant d'atouts pour devenir un prophète, un pasteur, voire un bishop comme mon ami Louis Ngomo. Autant de talents à mettre à profit pour assurer l'évangélisation dans une église du réveil de mon choix ou de ma propre création car je suis théologiquement parlant très solide. N'ai-je pas été un bon étudiant en théologie? N'ai-je pas obtenu de meilleurs résultats que certains de mes copains devenus aujourd'hui évêques ou hauts fonctionnaires dans l'église catholique romaine? Pourquoi n'ajouterais-je pas un peu de sainteté à cet attelage spirituel, intellectuel et moral pour attirer le plus de monde possible à mes prêches et à mes assemblées? Etc. Argent, succès, honneurs, privilèges descendront sur moi par le don de l'Esprit du Seigneur. "Cur non ego?", comme aurait dit mon illustre mentor. Suivez pour terminer.
Mars 2006. J'étais invité à Castries, Ste Lucie, pour une conférence sur Senghor. A la fin, Armelle, une des panellistes, m'a révélé que j'avais amorcé mon intervention exactement comme un prêtre commence son homélie. Eh bien, chassez votre formation, elle vous rattrape tôt ou tard... à une vitesse vertigineuse. Moi encore pasteur? Jamais.
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