Depuis plusieurs décennies je suis régulièrement le discours raciste et xénophobe non seulement du FN français, mais aussi d'autres partis d'extrême droite essaimés à travers l'Occident. Le discours est le même partout: le pays aux habitants, les autres n'ont qu'à retourner chez eux.
Mon premier séjour en Europe m'a rendu sensible au problème racial. Ayant vécu principalement en Italie, je considérais ce pays comme un lieu idéal de vie. Je jurais que, si j'avais à choisir, ce serait mon pays d'élection. Un ami m'a vite remis à ma place: l'Italie prospère et accueillante que tu as connue diffère complètement de l'Italie d'aujourd'hui. La crise économique, le chômage et d'autres délitements sociaux justifient cette volte-face. Le souvenir de Cécile Kyenge est encore frais dans nos esprits. Les étrangers y sont l'objet d'agressions racistes, d'humiliations et d'autres actes de violence.
Chaque fois qu'il y a une crise sociale ou économique dans un pays, on l'impute aux étrangers qui pourtant exercent les plus modestes emplois. La misère des Européens vient des réfugiés asiatiques, africains ou latino-américains qui s'emparent de leurs emplois, de leur espace, de leurs avantages, qui envahissent leurs écoles, centres de santé et infrastructures communes, qui accèdent à des droits réservés comme le chômage, les allocations de toutes sortes. Un banal accident de circulation n'a d'autre suite que d'insulter l'étranger broussard qui ne respecte jamais les règles de la route quand bien même le natif du pays aurait tort. Bref, l'étranger est assimilé au voleur, au fraudeur dans les transports publics - pas seulement Mme Royal - au violeur de mineures, au criminel de grand chemin. On le prend pour un malhonnête dans les affaires, un vil profiteur des biens du pays d'accueil. Pour lui on n'éprouve que du mépris, du dédain et du dégoût. On distinguera entre l'Arabe assassin, le Chinois imposteur, l'Africain hédémoniste et paresseux, le Noir jouisseur, l'Allemand travailleur, le Suisse horlogier, l'Américain sans culture. Des stéréotypes basés sur des critères douteux, subjectifs et obscurs, mais qui forment des impensés impulsifs d'actes, d'abus et d'attitudes xénophobes.
Le FN ou l'extrême droite, c'est la voie autorisée du racisme et de la discrimination nationale. Il soutient que les fils et les filles du pays n'ont de compte à rendre à personne dans l'espace de leur pays, que tous les non-natifs n'y ont pas de place. A force d'insister sur ce slogan gratuit, l'on finit par trouver qu'on serait mieux sans les étrangers. "Une poubelle abandonnée en pleine rue, c'est pas suisse. Propre en ordre, c'est suisse". Ainsi l'étranger du village est spontanément montré du doigt par toute la communauté communale, alors que ce n'est pas lui qui a abandonné la poubelle à la place du village. Pourquoi? Parce que l'étranger est une non-personne. "C'est le torchon dont on s'essuie le cul", a dit un fameux musicien dont je tais le nom.
Aux approches d'importantes échéances électorales, tous les candidats deviennent populistes, tenant des propos ambigus ou dont l'ambiguïté est intentionnellement entretenue, dans le but de s'attirer le vote des mécontents au nombre desquels on compte les Lepenistes, les Vlamsblok, les droites nationalistes. Les étrangers, sujet controversé, deviennent des cibles discursives idéales pour l'acquisition du pouvoir. On s'est étonné naïvement lorsque la France Républicaine s'est réveillée avec Le Pen comme deuxième candidat à la Présidentielle. On oublie que ce monsieur disait haut ce que d'autres pensaient tout bas.
Le paradoxe FN consiste en ce que la vérité énoncée par la bouche de la majorité ne reflète pas celle des urnes. Personne n'est raciste, mais le nombre des racistes augmente presque à chaque élection. Marine Le Pen peut se frotter les mains, Yannick Noah peut se mordre le pouce, la roue tourne dans le sens de la haine, de l'intolérance raciale et sociale. On durcit les lois de l'immigration, on restreint les conditions d'octroi de visas, on complique l'acquisition de la nationalité aux enfants étrangers nés sur le territoire, on impose des restrictions sur l'accès aux soins, aux avantages sociaux, à la scolarité. Tout cela pour rappeler, à chaque tournant de l'histoire, que l'étranger n'est pas chez lui. On a même créé le mot "intégration" pour le dépouiller de ses barbaries originelles. On a ... on a... on a ainsi posé les bases pour rendre la vie difficile aux non-natifs du pays.
Le paradoxe FN consiste en ce que la vérité énoncée par la bouche de la majorité ne reflète pas celle des urnes. Personne n'est raciste, mais le nombre des racistes augmente presque à chaque élection. Marine Le Pen peut se frotter les mains, Yannick Noah peut se mordre le pouce, la roue tourne dans le sens de la haine, de l'intolérance raciale et sociale. On durcit les lois de l'immigration, on restreint les conditions d'octroi de visas, on complique l'acquisition de la nationalité aux enfants étrangers nés sur le territoire, on impose des restrictions sur l'accès aux soins, aux avantages sociaux, à la scolarité. Tout cela pour rappeler, à chaque tournant de l'histoire, que l'étranger n'est pas chez lui. On a même créé le mot "intégration" pour le dépouiller de ses barbaries originelles. On a ... on a... on a ainsi posé les bases pour rendre la vie difficile aux non-natifs du pays.
La montée des extrêmes droites aux élections européennes est symptomatique d'une réalité simple, vécue au quotidien: l'incertitude de l'union avec l'étranger. Autrement dit, l'échec de l'Europe angélique affichée comme prétexte pour gérer des situations sociales et économiques inconciliables. Que les riches Suédois, Allemands ou Danois se mettent au même diapason que les pauvres Espagnols, Grecs ou Portugais, rien de plus utopique. Cette Europe-là menée par le bout du nez ne satisfait personne, ni les riches ni les pauvres. Quoi qu'il prêche des antivaleurs, l'inégalité des races et des hommes, le FN a encore des beaux jours, que dis-je, des belles années devant lui.