18 novembre 2015. Il
est 12h36. Je me trouve devant la mer, à la plage en face de
l’aéroport de Ste Lucie. Je viens de m’offrir un plat antillais : de la
daurade bouillie avec riz, patate douce, igname, fruit à pain et de la salade
verte mélangée à la tomate et la carotte. Le plat complet aurait inclus des
haricots. Un peu lourd, mais j’ai besoin de me sentir vivre car j’ai eu une
nuit des plus stressées. De tous les voyages que j’aie effectués de ma vie,
celui-ci a été le plus agité à cause de l’insécurité où je me suis retrouvé.
En route pour Ste Lucie. Après
l’échéance du délai donné par l’appel à contributions, j’ai été invité à
participer à une conférence sur le post-colonialisme à la Martinique du 23 au
25 novembre. A la demande expresse d’une collègue professeur de littérature
caribéenne anglophone informée qu’on souhaite une présence des trois campus à
cette conférence, J’ai ainsi soumis ma proposition aux organisateurs le 18
août. J’attendais une réponse immédiate, mais cela n’a pas été le cas. Il m’a
fallu attendre jusqu’au 28 octobre pour recevoir un programme dans lequel ma
proposition a été reprise, suggérant de fait que mon papier était accepté.
Pourtant j’avais mentionné
expressément qu’il me fallait une réponse immédiate afin que j’entreprenne les
démarches de financement et de voyage. N’ayant rien obtenu, j’avais simplement
déconsidéré cette conférence et programmé de participer au CHIPS, notre
symposium de philosophie habituel de Cave Hill. Mais comme le symposium a été
annulé, j’ai accepté spontanément
d’aller en Martinique quoi que cela m’en coûte. J’ai donc pris les dispositions
nécessaires : autorisations de mes supérieurs, nomination d’un remplacement,
recherche de fonds mais au titre rétroactif, etc. Car j’ai une moyenne de deux conférences annuelles
au cours desquelles je présente un sujet.
Le visa de Martinique, il faut
le chercher à l’ambassade de France à Castries, St Lucie plutôt qu’à Trinidad
et Tobago comme ce fut le cas par le passé. Il faut obtenir un rendez-vous chez
les Français et solliciter un visa à Ste Lucie. Après avoir pris des
informations, j’ai scanné et envoyé tous le dossier au service d’immigration de
Ste Lucie. Ce service n’ayant jamais accusé réception de ce courrier, l’idée m’est
alors venue d’utiliser les relations d’un collègue st-lucien. Mr NN a pris les choses en mains. Je croyais naïvement que, vu la position de
ce monsieur, j’allais facilement obtenir le document. J’ai passé toute la
journée d’hier et toute la nuit à attendre ce document. Il n’est pas arrivé. De cœur las, j’ai appelé Mr NN qui m’a rassuré :
« Do not worry, do not stress yourself. You will travel tomorrow. Immigration already knows
your case. You will get sorted out ».
Ce matin, nous sommes partis de
la maison à 6h20 pour l’aéroport. De là, Clavère devait ramener les enfants à
leur école. J’étais parmi les premiers à arriver à l’aérogare, mais le dernier
à embarquer. On a même fait une annonce pour que je me présente immédiatement à
la porte 11. J’ai raté le bus commun ; une agent m’a accompagné jusqu'à l’avion.
Vous vous demandez ce qui s’est passé entre temps. Eh bien, je n’avais pas le
visa waiver pour Ste Lucie. Mr. NN, en homme important, m’a promis qu’un
email serait envoyé par le service d’immigration de Ste Lucie dans les cinq
minutes qui suivaient, mais le document n’est pas arrivé jusqu’à la clôture de Check-in. Devant cette situation, il a appelé le chef de police de
l’aéroport pour qu’un OK oral soit donné et qu’on me laisse embarquer. Mr. NN a
de l’autorité, il a résolu le problème sans se déplacer de sa maison. L’avion
est passé à Fort-de-France, Martinique, avant d’atterrir à Castries.
Mon rendez-vous à l’ambassade
était à10h ; l’avion est arrivé à 10h10. A la sortie, j’ai cherché un taxi mais un taximan m’a conseillé plut de marcher, tellement c’est près.
Effectivement, cela m’a pris 7-8 minutes pour atteindre l’ambassade française.
Le passage à l’ambassade a duré vingt-vingt-cinq minutes au maximum. Curieusement, j’ai fourni
moi-même la photo mais ils ont pris mes empreintes digitales. C’est parce que
je dois attendre jusqu’à 14 heures que je me suis arrêté à ce malewa de luxe comme seuls les Antillais
savent le faire. J’écris ce passage en somnolant à moins de trente mètres de la
mer : l’idée m’est même venue d’aller m’y baigner, mais je n’ai pas
l’équipement approprié. Au moins, je peux profiter de la brise antillaise et
rincer l’œil en regardant des touristes qui n’ont pas froid de s’exposer au
regard collectif des rodeurs. Je pense à ce fabuleux panorama qui a sans doute inspiré les génies de Sir Arthur Lewis et Derek Walcott pour obtenir des Prix Nobel. Les reflets des montagnes et collines sur la mer sont sublimes à contempler. A présent, il reste près de quarante minutes
avant de retourner à l’ambassade, j’en profite pour faire des photos-souvenirs.
Un peu plus tard, E. Louis, une ancienne étudiante à présent enseignante, viendra me prendre pour un petit
tour de l’île. Je connais un peu l’île. J’y étais en 2006 avec Clavère pour présenter une
conférence à l’Alliance Française.
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