17 janv. 2016

Papa Frédéric Kayolo quinze ans déjà

16 janvier 2001 - 16 janvier 2016 soit quinze années écoulées depuis que mon oncle paternel bien aimé a quitté ce monde. Papa Frédéric est né le même jour que son cousin Papa Kala. On lui a donné le nom de cendre "Mbombi", pour signifier que les Bunda ne restent pas au foyer, alors que l'autre nommé "Kala", charbon symbolisait stabilité, constance, permanence. Ces deux noms résument les rapports conflictuels et agressifs qui existaient dans la famille paternelle. La cendre s'évade du foyer alors que le charbon demeure le noyau du feu. Les enfants de Kahiudi seraient inutiles au clan en disparaissant à travers le monde alors que les enfants de Khoso constitueraient l'inamovible berceau du clan. La réalité se révéla pourtant différente.
Elève brillant, Papa Kayolo a été pris en charge par mon père, son frère aîné jusqu'à l'obtention de son diplôme pédagogique à Banningville 1961. Le père Antoine Ekkelboom était le directeur de l'école normale avant sa cession aux frères joséphites. Il était de la promotion des directeurs Bampumbudia, Félix Kapende, etc. De son tout premier salaire d'enseignant à Kimbau, il offrit une pièce Wax à ma mère Christine avant même de penser aux autres siens. Un cadeau très symbolique! Muté peu après de Kimbqu pour Kenge, il a aussitôt été nommé directeur à St Frédéric - actuellement Mateka Mbuta -.
Comme personne, il était l'enfant le plus aimé et le plus apprécié de sa famille. Ses frères et soeurs ne juraient que par/sur son nom. Fwetedika, comme l'appelait tendrement Kha Kalongo, faisait la joie de sa mère à laquelle il était très attaché. J'en ai été témoin. Généreux, abordable et sage, Papa Frédéric a longtemps été l'homme qui réconciliait ses frères et soeurs lorsque des problèmes surgissaient. Homme de relations et de contacts, il savait mener des démarches avec succès. Un démarcheur très efficace! Il avait aussi ses défauts comme tout homme. Travailleur infatigable, il a énormément contribué à l'éducation de la jeunesse du Kwango et du Bandundu. Il a entre autres suggérer la création de beaucoup d'écoles du diocèse: notamment l'école primaire Ntinu-Ngemba avec l'argent des PCDK. Je le vois encore entonner à la deuxième messe, à St-Esprit, à l'intention de ses élèves: "Mu butuka Yezu Kristu" et les élèves répondaient: "Bantu sa baguluka. Mfumu Nzambi unkwa mawaete utusadisanga, etc..." Tous mes congénères s'en souviennent avec affection.
Papa Frédéric m'aimait beaucoup: "Tu es mon fils aîné", me répétait-il lorsqu'il était mon directeur à Kenge. Il suivait attentivement mon évolution. Les Bapelende m'appelaient: "Mwana Kayolu." Quelques souvenirs! Lorsqu'il était en Europe en 67, il avait envoyé un aérogramme à Maman Véronique: j'étais impressionné par cette lettre écrite sur l'enveloppe. La toute première lettre dactylographiée que j'aie reçue de ma vie m'a été envoyée par lui début 69. Ce fut un honneur pour moi. Dans cette lettre, il me suggérait de m'inscrire  au petit séminaire de Kalonda ou bien au collège de Bandundu, les deux meilleures écoles de l'époque. J'optai pour Kalonda auquel j'étais déjà psychologiquement préparé.
Lorsqu'il revint d'Europe, Papa Frédéric m'apporta de jolies culottes et chemises. Je me souviens aussi qu'il avait ramené un tourne-disque. Et parmi les disques qu'il aimait et qui le poussaient à danser, il y avait: "A ya samba tokosamba na yo ooo"; et il s'agenouillait. Je n'ai jamais oublié cette scène. Papa Frédéric était un viveur, un ambianceur, un féru de la bière et de la belle vie. 
Lorsque j'entrai à Kalonda, il s'occupa de mes frais d'étude, et je passais mes vacances de Noël à Kenge. A la surprise des dirigeants de Kalonda, il est arrivé que mon minerval soit payé doublement, ie par mon père et par mon oncle. Son déplacement de Kenge en 1971 a en quelque sorte arrêté cet élan spontané de générosité. Papa Frédéric m'a toujours pris pour son propre fils, et m'a traité comme tel. Il m'appelait "Papa", exactement comme Papa Donatien avec lequel il avait une complicité indescriptible. Il m'est rarement arrivé de voir deux frères s'entendre si bien. Plus d'une fois, je me suis dit: "cette fois, c'est fini entre les deux". Mon père, cracheur de vérité, avait souvent un langage très agressif et critique contre son frère, mais ce dernier ne se laissait jamais ébranler. Chapeau!
Sa contribution a été énorme à l'organisation de notre diaconat et de notre ordination. Je n'oublierai jamais son discours de circonstance, le 15 août 1982, à l'hôtel Musey de Kenge: "Entendons-nous, entendons-nous. Nous sommes venus célébrer le diaconat de nos abbés. Réjouissons-nous dans la paix et l'ordre." Pendant tout le temps que j'ai travaillé à l'évêché de Kenge, je me rendais tous les dimanches soirs ou presque au camp ONL. Et lorsque je suis retourné de Fribourg en  mai 1992, il s'est déplacé de Kenge pour Kinshasa avec l'abbé Pindi et Papa Mabana afin de m'alerter de ce qui se tramait à mon sujet. On a eu une conversation importante et décisive à la 1ere Rue. Pour le petite histoire, cette année-là, en octobre je suis reparti pour Fribourg contre vents et marées. Pour dire que Papa Frédéric a été de tous les événements importants de ma vie et a énormément contribué à ma formation comme à ma vie.
Comme la vie tourne, Ma Véronique a été arrachée à notre amour il y a une année. Puissent-ils tous les deux jouir du repos éternel dans la maison céleste du Père.
Requiescant in pace!



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