Expérience de la RDC (Juin –
Juillet 2019)
Je viens de passer trois semaines
dans mon pays. J’ai beaucoup observé, comme à mon habitude.
Je suis resté une semaine à
Kinshasa avant de descendre à Kenge à bord d’une Mitsubishi Colt dans la nuit
du lundi 17 au mardi 18. J’ai donc perdu une journée d’enseignement, et pour
cause ? Le service corrompu de notre administration. Quand
quelqu’un refuse visiblement de se laisser corrompre, sache qu’il est le plus
corrompu et qu’il a son réseau de corruption. Le plus exécrable corrompu se
montre le plus correct et honnête des agents des services publics. Méfie-toi
des apparences. Tout s’achète, même les consciences. Tout s’achète à tous les
niveaux. Il n’y a rien pour rien. A
chaque opération il y a de l’argent à dépenser sinon tu vas poireauter
indéfiniment. Passe par la porte à côté et tu verras de quel bois il se faut. Je
l’ai souvent remarqué à mes dépens. Lorsque je me gêne de présenter des billets
pour un service – pour lequel cet agent reçoit son salaire – je dois comprendre
qu’il est attendu ou suggéré que cela se fasse dans la discrétion.
Passant devant une banque tous
les jours, j’ai demandé à un motard de m'expliquer les raisons de l’attroupement que j’y vois tous les jours.
Ce dernier de me rétorquer : « Il y a paiement des agents de l’état.
La plupart de ceux que tu vois là, sont des figurants, des fictifs. Les vrais
prédateurs sont invisibles, mais présents chaque fois que quelqu’un perçoit son
salaire. Certains de ces agents vendent au marché, mais viennent percevoir leur
paie comme commis à tel ou tel service de l’état. » Et il ajoute : «
Taba nionso na mulayi ya singa na ye. Moto nionso aza na musuni na
ye ! » (Chaque chèvre à la mesure de sa laisse. Chacun obtient sa
part du gâteau.) Entendez par là : Les plus gros bouffent les parts des
plus petits. Intelligenti pauca. Bref tout le monde est corrompu.
Déplorable et triste constat. Quoique
j’éprouve un amour inaliénable envers mon peuple, quoique je demeure solidaire
du sort de mes compatriotes, j’ai honte de m’identifier avec les pratiques de
corruption en vigueur dans mon pays. La corruption est devenue, à tous les
niveaux, notre seconde nature.De celui qui se présente comme le serviteur zélé de
l’état, mets-toi en tête qu’il est prêt à vendre même son pays rien que pour se
remplir les poches. Chance éloko pamba.
J’observe beaucoup. J’observe surtout le petit peuple car j’affiche mon
indépendance, m’éloigne des leaders politiques et des personnes de la haute
société financière et sociale. Ma place est auprès des démunis dont je me sens
proche et partage les malheurs. Mais la corruption est une tare indélébile
qu’il nous faudra éradiquer ensemble. Souvent je suis surpris par la fausse
réticence de mes interlocuteurs qui n’y croient pas, alors pas du tout.
Un monde de la débrouille ou de la corruption? C'est selon, comme on dit chez nous. Chacun s'y prend à sa façon. Chacun arrive à sa fin.
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