23 oct. 2012

Les débats présidentiels

1. J'ai des quatre débats présidentiels américains suivi trois entièrement. J'ai raté le second débat entre candidats présidents, fatigué que j'étais d'une longue journée de travail. Je me souviens des débats entre Carter et Reagan, Bush et Clinton, Bush et Kerry, Obama et McCain. J'ai aussi suivi les débats présidentiels entre Mitterand et Chirac, Royal et Sarkozy, Hollande et Sarkozy. A chaque fois, l'opposant attaque l'action du président en exercice, et le débat est engagé, musclé et parfois embrouillé. Quelle qu'en soit l'issue, une chose m'est apparue certaine: le président est un être humain comme un autre.
2. Le président est un homme comme un autre. Je le répète parce que dans nos démocraties en devenir, cela s'oublie souvent. Comment pouvez-vous remettre en question l'action d'un leader réputé "envoyé de Dieu" et "investi par les ancêtres" sans courir le risque d'être décapité? Cela s'est vu en Afrique, et ce n'est pas aujourd'hui que cela disparaîtra. Nous avons encore de longues années à parcourir pour que les choses se remettent en ordre.
3. Il s'est dégagé du premier débat américain que l'homme le plus puissant du monde a fait montre de faiblesses aussi bien dans son argumentation que dans sa capacité de leadership, qu'un homme politique autre que Barak Obama peut administrer les Etats-Unis avec compétence. On le donnait gagnant à plates coutures, voilà qu'il est aussi vulnérable que tout autre sujet Américain. C'est cela qui rend les élections américaines intéressantes et passionnées. A ce jour, on ne peut prédire exactement qui gagnera ces élections. C'est un sujet d'enseignement pour un Africain habitué à des élections par acclamation, aux résultats manipulés ou dont certaines urnes disparaissent dans la nature lorsqu'elles ne sont pas remplies d'avance ou invalidées pour Dieu seul sait quelles raisons.
4. Après le premier débat, j'ai eu une discussion avec des compatriotes africains du Cameroun, du Sénégal, d'Ouganda-Tanzanie. L'ami camerounais soutenait que le débat n'allait avoir aucun impact sur les élections et qu'Obama serait réélu quoi qu'il en soit. Quel Africain ne souhaiterait pas qu'il en soit ainsi? Les jours suivants ont vu Romney remonter la pente et devenir favori. Pour ma part, j'ai dit que ce serait une catastrophe si Obama perdait les deux débats suivants car j'ai eu l'impression que Mitt Romney s'était très bien préparé à ce débat-là. Entre nous, j'ai même soupçonné une odeur de Watergate. Lors du dernier débat, Obama a tenu à dessiner avec insistance le portrait de Romney à tel point que ce dernier, acculé, a déclaré à deux reprises: "Attacking me is not an agenda". C'est important pour lui, et il a gagné le débat.
5. Bien sûr que le débat a un impact considérable sur les élections, car il donne aux électeurs l'occasion de se faire une idée claire du personnage qu'ils vont élire: son caractère, sa maturité, son intelligence des choses et des affaires, sa capacité à s'en sortir des situations difficiles, voire à prendre des décisions impopulaires pour le bien de la nation. Les téléspectateurs et les auditeurs voient l'individu sans titre et s'imaginent comment ce dernier peut débattre dans les différentes instances du pouvoir aussi bien au niveau national qu'international. Le candidat doit convaincre ses électeurs qu'il est capable de défendre les intérêts de la nation avec efficacité, sagesse et ténacité à l'intérieur comme à l'extérieur du pays.
6. J'ai vu en différé quelques extraits du débat ivoirien entre Gbagbo et Ouattara. Débat très révélateur car c'était une première en Afrique. Ambiance courtoise, conviviale et sereine malgré la gravité de l'heure. Qu'avons-nous vécu après? Une guerre sans merci dont les séquelles minent encore la Côte d'Ivoire.
7. La faiblesse de l'Afrique, je ne cesserai de l'affirme, c'est l'instabilité de ses institutions. Rien n'est certain ni constant, tout est imprévisible. L'Afrique gagnera en maturité démocratique le jour où elle se conformera à des principes fondamentaux relatifs aux droits humains élémentaires, le jour où les présidents descendront de leurs piédestaux impériaux et montreront un visage vraiment humain. Le débat est un moyen parmi d'autres pour dévoiler la personnalité de ceux qui nous gouvernent. Autrement, ils demeureront des îles en plein océan, éloignées ou isolées de leurs populations par l'armada militaire et sécuritaire terrorisante et terrifiante qui les entoure.
 

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