Vous aurez remarqué comment j'ai appris la mort de Jean Bumbakini. Juste un message Facebook de Bernardin Iwongi Mbuku que j'ai contacté par un hasard de circonstances. Paix à son âme! Je viens de parler avec Bernardin. Souffrant depuis des années d'un diabète aigu qui a ruiné sa santé, Jean est parti de Dayton pour Kinshasa via Bruxelles il y a deux semaines. Il s'en est allé le lundi 15 février 2015.
J'ai connu Jean Bumbakini pendant qu'il était étudiant en philosophie et religions africaines à la Faculté de Théologie Catholique de Kinshasa. Il était de ceux qui ont connu la fermeture de Mayidi en 1974-75 et ont été reversés aux facultés. A mon retour de Rome en 82, il était assistant aux Facultés Catholiques de Kinshasa. Et il donnait des cours comme visiteur au grand séminaire de Kalonda. Je l'y ai trouvé lors d'une récollection que j'avais animée à Kalonda. Proche de Constantin et Pascaline Mawana, il s'est marié à une vieille connaissance, Sindani, parmi les filles de Pelende qui ont étudié au Lycée de Kisantu. A chacune de nos rencontres, nous avions donc quelques sujets de conversation.
En mars-avril 90, nous nous sommes retrouvés à Paris. Il avait obtenu une bourse de Missio pour un doctorat en philosophie à la Catho. Je crois que ce temps-là fut le seul que nous avons avons vraiment passé ensemble, où nous nous sommes rencontrés régulièrement autour d'un verre ou d'un repas. Que des souvenirs. A cette époque, il se débattait à ouvrir un compte en France. Et c'était un problème sérieux. En bon philosophe, il prenait cela de haut: "Claver, disait-il, les illogicismes appris en cours se réalisent ici. C'est un parcours de combattant que d'ouvrir un compte bancaire dans ce pays." C'est de cette époque date ma pensée sur la raison blanche: "La raison blanche cesse dès qu'il s'agit des Noirs."
A un guichet de poste où il avait présenté son passeport zaïrois pour retirer de l'argent, on lui avait demandé:
"- Monsieur, n'avez-vous pas un autre document que celui-là?
- Y a-t-il mieux qu'un passeport pour m'identifier? A-t-il rétorqué. Si c'est insuffisant, ajoutez les éléments qui y manquent.
- Monsieur, vous savez bien que cette pièce est douteuse."
Depuis ce temps, nous nous sommes revus une fois à Bruxelles. J'avais de ses nouvelles mais jamais directement de lui-même jusqu'aux échanges d'emails que j'ai repris dans l'article précédent. Il m'a recherché et trouvé. Je lui ai exprimé ma reconnaissance pour ce geste si fraternel.
Avec Jean Bumbakani, le Kwango perd un de ses fils intellectuels et universitaires. Puisse la terre de nos ancêtres lui être tendre et accueillante. Mes condoléances les plus émues à sa famille biologique et à tous ceux et celles que cette mort affecte. Nzayiku bweyi ya kudila, Jean! Wenda mboti!
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