22 nov. 2018

Présentez de l'argent à quelqu'un et vous le connaîtrez 2

L'argent est un appât incontournable pour évaluer la personnalité de quelqu'un. J'ai suivi ou subi une éducation dans laquelle l'argent était plutôt méprisé, dévalorisé et vilipendé. On l'utilisait, mais on nous lavait le cerveau en nous convaincant qu'il n'était rien. La section littéraire que j'ai faite au petit séminaire valait plus que tout, et nous donnait des valeurs humaines d'après lesquelles je vis jusqu'à ce jour. Jamais j'aurais suivi la section commerciale. Inimaginable pour moi. J'étais formaté contre l'argent.
Tenez! Le 16 janvier 2018 alors que je devais attendre le bus Transco qui me mènerait de Kenge à Kinshasa, je suis parti de la procure sans prendre une somme importante d'argent que me devait le SGA de peur de rater le bus. On m'a fait suivre ladite somme à la station de bus. Lorsque j'ai raconté cette histoire à mon frère, il s'est écrié: "Tu vis décidément dans un autre monde. Moi à ta place, j'aurais annulé le voyage pour attendre mon argent. Le choix est clair." Ce n'est pas mon attitude, l'argent me sert et je ne tuerais jamais personne pour l'obtenir. Et je n'ai pas besoin de beaucoup d'argent pour vivre. J'ai l'essentiel et le strict nécessaire. C'est ça ma philosophie. 
Il est, par contre, des gens pour qui l'argent est le sommet de la vie. Prêts à tout, pourvu qu'ils obtiennent cette valeur pourrie qui ne cesse de diaboliser notre monde. 
Il y a une semaine. Mon neveu Hermann a été agressé, blessé à la machette au visage par des malfrats qui lui ont ravi son téléphone Androïde, son porte-monnaie et son sac à computer. Les bandits qui l'ont attaqué étaient dans une voiture Ketch. Un paisible citoyen se trouvant à la mauvaise heure au mauvais endroit a failli perdre sa vie pour avoir entrepris une tardive ballade nocturne. Les criminels ne cherchaient rien d'autre que l'argent, ou les valeurs qui vont avec. A toute place publique de nos mégapoles africaines se trouvent par centaines des voleurs d'argent prompts à dévaliser les baladeurs innocents non avertis ou inattentifs. Ils sont dans la foule, se mêlent à elle, ne se distinguent par aucun signe particulier du moins aux des non avertis. Ces impitoyables détrousseurs ont le visage d'un monsieur tout le monde. Pendant que j'y pense, les femmes ne volent pas à la pique, mais sont plus méthodiques, utilisant des moyens plus élaborés ou sophistiqués comme suggérés dans l'article précédent. Souvent elles appartiennent à des gangs criminels bien organisées. Une dame de Berlin m'a édifié une fois alors qu'elle déclinait un poste de trésorière-comptable de l'ambassade: "S'il vous plait, Ambassadeur, n'osez pas me confier ce poste. Je vous ferai honte, car je ne résiste jamais à l'attrait de l'argent." Tous ces cas de figures existent à tous les niveaux. Une chèvre broute à la mesure de la corde qui l'attache. Du portier au patron tout le monde vole sans honte. Une machine irréversible du vol. C'est ainsi que vous vous retrouvez avec des présidents ou des ministres milliardaires dans des pays où persistent encore la malnutrition, la maladie épidémique, la pénurie d'eau et d'électricité. Tout l'argent tiré des taxes, productions et ressources du pays atterrit, grâce à une corruption bien organisée, dans leurs poches et celles de leurs collaborateurs ou alliés financiers. Le sinistre Abacha n'en représente qu'un spécimen parmi des centaines connus et insoupçonnés. Les nombreux paradis fiscaux, les contrats léonins, les Panama Papers, illustrent ces dilapidations inconscientes des biens communs, ces détournements sans pitié qui plongent les pays dans la misère et la précarité.
Devant l'argent chacun a une attitude bien caractéristique. Tout le monde est un suspect voleur implicite ou explicite. Seul le comportement compte. Honnête, malhonnête, correct, malfrat, bandit, pauvre ou riche, rien n'est jamais sûr. Le donneur suspecte le receveur, et vice-versa. C'est pourquoi on le compte en le présentant et on le recompte après l'avoir reçu.  Ce n'est jamais dit, mais c'est la réalité. Il y a comme un pacte de silence autour de l'argent.
Dans notre pays comme dans notre continent africain, tout se paie monnaie comptant. Qui a l'argent est considéré, respecté, adulé et présenté comme un modèle de réussite. Le pauvre est un laissé pour compte; personne ne jette un regard sur lui, pis encore, personne ne le prend pour un humain. L'argent détermine la mesure de l'individu. La possession financière constitue le grade le plus élevé sur l'échelle de l'humanité. "Matin, midi, soir, hommes et femmes vont à la recherche de cette valeur rare qu'est l'argent. Et chacun rêve d'en avoir plein un jour." Les jeux de loterie montrent ce rêve entretenu par des millions de personnes. Las Vegas, Monaco, les casinos sont des destinations fabuleuses du rêve d'argent. Car tout se monnaie, tout s'achète, et tout s'estime en espèces. L'argent donne puissance et honneur, il offre des possibilités énormes du fait qu'il ouvre toutes les portes possibles. Quand on l'argent, on peut tout se permettre. D'où le désir insatiable de l'argent chez la plupart de nos compatriotes. Les migrations vers l'Eldorado occidental américain et européen concrétisent cette propension de l'homme vers l'accumulation de l'argent et des biens. D'où le désir de s'essayer en politique pour des musiciens, des artistes, des professeurs, des avocats, des comédiens, etc. récupérés par le régime en place pour se maintenir au pouvoir. Il est évident que le premier but non avoué est de s'enrichir en argent et d'accumuler le plus de biens possibles. L'attrait de l'argent ne s'arrêtera jamais, c'est une obsession universelle. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire