11 sept. 2012

"La mort fait partie de la vie"

J'ai plusieurs fois entendu cette phrase et son autre équivalent: "La vie fait partie de la mort". Chacun y va de son tempérament optimiste, fataliste, cynique, stoïque ou sophiste. Mais les deux phrases ne peuvent pas être vraies, selon toute vraisemblance. La mort survient après la vie, c'est la fin de la vie. Vie et mort se repoussent mutuellement, radicalement. (Sauf chez les gens qui croient aux légendes et mythes). Certains soutiennent que la vie vient de la mort. Qui croire? Je ne voudrais pas toucher aux sensibilités religieuses de certaines personnes, moi catholique qui ai une connaissance assez avancée de la théologie et de la philosophie. Là n'est pas mon point.
En fait, ces deux phrases veulent dire une même chose et poursuivent une même fin. En fait, la mort aussi fatale soit-elle, s'affronte à un moment ou à un autre de la vie, lorsque ce n'est pas sa propre mort. Elles possèdent une vertu thérapeutique formidable chez le consolé, car elles permettent de relativiser la fatalité et la prépondérance de la vie.
Un ami m'a surpris: "Bienvenue au club des orphelins full, la mort est notre destin à tous".
Un nonagénaire me disait récemment: "Je n'ai pas peur de la mort. Dieu me connaît, il ne me reste qu'à ouvrir la dernière porte et à la franchir." N'est-ce pas une belle préparation à cet événement tant redouté?
Un autre, un frère laïc missionnaire svd, me disait autrefois: "Le jour de ma mort, fêtez, célébrez, surtout ne versez pas des larmes". Il suggérait même qu'on l'incinère. Il vit encore, et a fêté dernièrement ses 65 ans de vie religieuse.
Certains vous diront: "Mieux vaut mourir jeune, car on garde ses facultés, on n'est un poids pour personne." D'autres soutiennent: "Il faut mourir vieux, le plus âgé possible, quel que soit le fardeau que l'on fait porter aux siens. C'est la vie qui veut ça; c'est Dieu qui donne et reprend comme et quand il l'entend". D'autres souhaitent une vieillesse sans maladie, sans Alzheimer ni Parkinson, sans tension artérielle ni autres signes de sénilité.
Pour ma part, la mort bien qu'ayant fait partie de ma famille avant ma naissance, n'a pris forme qu'avec la mort de ma soeur Anne-Louise en juillet 1994. A cette époque, je vivais reclus dans mon coin d'Enney. Une amie d'origine angolaise été ma consolatrice, elle a versé des larmes à ma place car j'en étais incapable. J'étais perdu, hagard. Tout était remis en question. Que valait la vie? Que valait le diplôme auquel je sacrifiais tant d'énérgie? Dépité, découragé et effondré, j'en suis arrivé à douter de tout, à réaliser l'inanité de tout; j'en suis arrivé à un point où je devais tout lâcher, car plus rien n'avait de sens à mes yeux. Un peu comme Dalida: "la vie ne vaut plus la peine d'être vécue", mais sans aller jusqu'au suicide.  C'était incompréhensible pour moi que ma soeur, une si jeune femme, meure le jour même de ses vingt-neuf ans. Tout était devenu pareil. Pourquoi se démener tant si c'est pour retourner à la poussière après la recherche de tant de gloires vaines et d'honneurs insensés sur terre? Ce jour-là, j'ai tranché: je devais achever ma thèse à n'importe quel prix et la dédier à ma soeur pour rendre sa mémoire en quelque sorte "éternelle". Et deux semaines avant le colloque de thèse est décédée à Munich Mme Weingärtner, ma seconde mère qui m'a soutenu financièrement au cours de ce parcours de combattant. Paix à son âme!
De tout cela j'ai appris une chose: "La mort fait partie de la vie"... "partie de ma vie". Paix à l'âme de Maman!

 

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