Le changement de cap dans la politique des migrants opéré par les Allemands ouvre une nouvelle ère dans l'histoire du monde, dans les rapports entre les pays en guerre et certains pays du Nord. Qui l'aurait crû il y a à peine quelques mois. Des milliers de personnes sont mortes en traversant la Méditerranée dans l'indifférence totale, aujourd'hui d'autres se voient encouragées à atteindre l'Occident grâce à l'apparente générosité de leurs hôtes. Comme il me plait de voir plus le revers de la médaille que la médaille elle-même, je me permets quelques réflexions oiseuses au premier abord, mais qui peuvent se révéler sensées par la suite.
1. Priorité aux Syriens. La guerre qui s'éternise en Syrie - appendice de conflits de l'Irak, de la Turquie, du Liban, du Yemen - sert de prétexte à la migration. La fuite de la guerre et de l'insécurité constitue une preuve irréfutable du départ vers un pays lointain. Même le petit Jésus, réputé être le premier des réfugiés selon certaines bonnes langues, avait trouvé asile en Afrique. Maintenant la roue a changé de direction quoique nous sommes toujours encore au Moyen Orient. Voilà qu'à la surprise générale, l'Allemagne ouvre la porte à des milliers de réquerants d'asile venu notamment de ces régions belliqueuses, sans craindre d'importer des terroristes, une guerre et une insécurité en son sein. L'arrivée à Munich correspond aux normes organisationnelles allemandes. S'il est un point pour lequel les Allemands sont imbattables, c'est bien l'organisation. Les choses sont maîtrisées, orchestrées avec une efficacité admirable. Espérons qu'ils arriveront à canaliser les ardeurs belliqueuses de leurs hôtes.
2. Générosité. Contrairement à l'opinion répandue, le peuple allemand est un peuple très généreux. C'est mon expérience. Pour avoir passé quelque quinze ou seize années en Europe, je sais de quoi je parle. Les généralisations possèdent les défauts de voiler les détails. Ce que je viens de déclarer n'est pas tout à fait vrai et devait constituer un sujet de discussion. Pour être plus sincère, j'avance qu'aucun peuple n'est a priori ceci ni cela; ce sont plutôt les individus qui forment un peuple. Tous les caractères humains se retrouvent dans tout conglomérat d'individus. Cela dépend donc de qui on croise, et dans quelles circonstances. Il serait hâtif de juger un peuple par les actes d'un individu. Pour peu qu'on se trompe, Angela Merkel est aussi allemande que l'a été le sinistre Göbbels. Personnellement, j'ai rencontré des Allemands qui ont manifesté de la générosité à mon égard, et me sont restés attachés jusqu'à ce jour ou à la fin de leur vie. C'est la même générosité que je ressent dans les coeurs de ceux qui gèrent la ruée migratoire des deux dernières semaines vers l'Allemagne. Je ne suis pas très surpris.
3. Retombées historiques en dividendes. Qu'on se le dise, l'Allemagne voudrait façonner et exhiber à la face du monde une image davantage humaine afin d'effacer le stigmate d'une histoire de guerres mondiales et de défaites. S'en relèvera-t-elle jamais? De tout temps ce peuple entretient un mythe d'excellence: tout ce qui est allemand est solide, efficace, compétitif. Pendant mes études de théologie, j'avais obtenu de leur ambassade à Rome une bourse pour une étude intensive de l'allemand à l'Institut Goethe Staufen. L'année suivante, j'avais effectué via la Commissione Tedesca un travail de vacances dans une usine textile, la FilzFabrik, Fulda. Avec d'autres jeunes, nous étions initiés à la langue et à la culture allemandes, éléments positifs dans le contexte de l'après-guerre. Cela nous a permis d'avoir une autre vision, un regard positif envers ce pays auquel la réputation belliqueuse a longtemps collé à la peau. Ils offrent le refuge massif à des milliers de personnes, c'est pour bénéficier de la pluralité culturelle et répandre leur propre culture auprès d'individus. Plus que tout autre pays, l'Allemagne réunifiée sait la valeur du facteur humain dans le développement d'un pays. Il y aura sans aucun doute des retombées historiques en termes de dividende.
4. Rapport gagnant-gagnant. Acte généreux au départ, l'accueil des étrangers n'est pas totalement gratuit. "Nous vous accordons le refuge, vous devez vous plier à nos lois, à notre langue et à notre culture." Déferlent sur l'Allemagne comme tombées du ciel des centaines de milliers de personnes dont l'allemand sera à long terme la langue de communication, d'échange et de culture. Des marchés en perspective pour l'économie. Une main-d'oeuvre qualifiée à sélectionner à recruter ou à former dans différents domaines. A une époque, des informaticiens avaient été amenés de l'Inde. En dernière analyse, chacun y trouve son compte: l'étranger en s'intégrant retrouvera sa grandeur humaine, et le pays hôte comble ses lacunes sur le marché du travail.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire