14 mars 2014

A chacun son -isme

A l'instar des doctrines consacrées par l'histoire et la culture, chaque grand personnage possède son -isme. Ainsi trouve-t-on aisément à côté du classicisme ou du stoïcisme, le cartésianisme ou le kantisme, tout comme le léninisme et le sarkozisme, le mobutisme ou le kabilisme. Pourquoi pas le mabanisme? Mais là s'arrête la similarité, car le succès d'un mouvement de pensée dépend beaucoup de la personnalité qui l'incarne. Chez les politiques, il faut distinguer plusieurs catégories intellectuelles. Certains ont une stature solide tandis que d'autres s'entourent d'une doctrine pour servir leur ambition politique. En outre, il y a des politologues très solides qui n'ont jamais un seul instant de leur vie exercé la politique. Tout dépend donc de la façon dont on appréhende cette réalité.
Le philosophe africain-américain Mudimbe raconte ses rencontres avec l'illustre président qui prêchait le socialisme scientifique au Congo-Brazzaville. A force de lire et de se former en autodidacte, Marien Ngouabi semblait suivre avec attention l'argumentation philosophique sur le marxisme que lui exposait le pédant post-moderniste. Chapeau! D'autres n'auraient comme argument que la gachette de leur revolver à la place d'idées indigestes à leur esprit. Le "isme" ne viendrait que combler leur statisme spirituel et leur carence intellectuelle, à défaut de couronner leurs projets despotiques et machiavéliques.
Et le mabanisme dans tout cela? Pourquoi pas? Mabanisme comme le nnikonnikunisme viendrait étymologiquement de Mabana. Nom sacré et comblé de gloire! Je parle. On n'est bien ensensé que par soi-même. Je baptise le mabanisme comme l'ensemble des pensées mentales, politiques et idéologiques conçues par votre humble serviteur. Comble de misère et de malheur! Es-tu sûr d'avoir du succès avec ce néologisme si exotique, rétorque mon pourfendeur de lecteur! Abacha n'avait pas d'isme - au fait il n'existe pas d'abachisme -; il n'en avait pas eu le temps tellement il était occupé à se remplir les poches. Aux dernières nouvelles, ses millions volés en un temps record végètent encore dans les banques occidentales. L'abachisme s'allierait au pragmatisme, un pragmatisme qui vous enrichit comme Crésus en l'espace de trois années de pouvoir. Un pragmatisme époustouflant proche des exploits des maffiosi, des pègres de la drogue. Le mabanisme sera une suite décousue des phrases susceptibles de vous appauvrir si vous êtes riches, de vous maintenir dans la pauvreté si vous y êtes déjà; mais de vous tenir la tête haute au milieu de votre misère, en dépit de votre dénuement. Tant qu'il y aura de la pauvreté, il y aura le mabanisme, autrement dit l'ontologie de la paupérisation. Le mabanisme propulse bien les mots compliqués, les jeux de mots susceptibles de tenir une argumentation verbale tout en vous maintenant dans une flagrante indigence matérielle et spirituelle.
Entre l'abachisme et le mabanisme, mon choix est clair. J'ai choisi mon nom que je lègue pour toujours à ma postérité. Les savants qui étudieront ma pensée s'en délecteront comme on s'extasie aujourd'hui devant le génie de Socrates, Averoes et ... j'ai oublié son nom. Du mabanisme naîtront sans aucun doute l'ibanguisme et le mukawisme. A chacun son -isme. C'est selon, comme on dit chez nous.
Observez les enjeux politiques dans les actualités, vous verrez que je ne dis pas que des bétises.

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