2 mars 2014

L'art de la vérité 2

"Claver,
J'interviens après avoir lu tes discours décousus sur Emeneya. De quoi te mêles-tu? Tu quittes les calotins pour les musiciens. Décidément, tu sais surprendre. Te voilà chroniqueur musical aujourd'hui! Tabu Ley, je comprends, a marqué notre jeunesse à tous. Mais pour Emeneya, je ne te sens pas. Un lecteur informé perçoit aisément que tu forces la note et que par conséquent tu remplis des pages dans le seul but de les remplir. Je ne te croyais plus mélomane depuis la mort des Frères Soki qui incarnaient tout pour toi.Tu as promis une suite à ton article intitulé "l'art de la vérité". J'attendais une analyse plus profonde, mais tu m'as servi des salades indigestes. Je suis vraiment resté sur ma soif. Sois un peu plus profond.
Soit, je peux t'aider. Tu as bien détecté quelques "vérités" sur la personne et le personnage de King Kester. Il aurait fallu évoluer dans ce sens et revenir sur l'art de la vérité. Etc."
(Email du 3 mars).

A quoi je réponds:

Cher ami,

Il y a beaucoup de détails de ma vie que tu connais bien mais que tu ignores volontairement lorsque tu attaques mes écrits. C'est ma vérité, connue de moi seule, pas celle racontée, romancée par des tierces personnes à mon sujet. Ma vérité, comme celle d'Emeneya, n'est connue que de moi-même. Ce qui explique que tu me forges une image que tu as de moi. Je ne cesserai de te répéter que je ne peux prétendre à plus d'intelligence que celle que j'ai, à plus de talents que ceux dont Dieu m'a doté. Une chose est sûre: tu ne me crééras jamais à ton image. I am what I am.
J'ai chanté déjà très jeune dans les PDCK à Kenge. J'étais bon en musique à Kalonda et ai fait partie de la chorale du Père Masisi, des flutistes et de l'équipe qui entonnait les chants à la chapelle. A Mayidi, tu m'as vu gratter la guitare; et depuis, je possède toujours une guitare. Je ne suis pas un bon guitariste, mais les mélodies que je crée m'élèvent du monde terrestre vers des horizons plus éthérés. Pour passer mes temps libres, j'écrivais jadis de la poésie, jouais de la guitare, composais des chansons pour consommation personnelle car je suis timide, à défaut de me déambuler dans la forêt. Oui la forêt, ma muse éternelle. Et tu sais aussi combien j'étais piètre en esthétique quoique la vie professionnelle m'ait destiné à décrire le beau. Petit fils du Vieux percutionniste Kahiudi, je peux battre du tambour et accompagner des chansons et des danses. Quoique le grotesque m'intéresse aussi, je demeure sensible à la beauté des oeuvres musicales. Je respecte la bonne musique, quelle que soit son origine, quelle que soit la couleur de son auteur. Aujourd'hui, Madeleine-Chrystelle et Claver Junior forment la meilleure symphonie que ni Bach ni Beethoven n'ont réussie à mes yeux. Tout cela, c'est ma vérité; tu la connais même mieux que quiconque. Mais ma vérité, ma vraie vérité, demeure hermétique, inaliénable.
Créer la vérité, c'est un art. Même le mensonge constitue la vérité du menteur. De ce point de vue, il n'y a plus grand menteur que le romancier, plus menteur attitré par excellence que le créateur de la fiction, ainsi que l'a constaté René Girard dans Mensonge romantique et vérité romanesque.
 

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