30 avr. 2017

Note de lecture: En attendant la montée des eaux (M. Condé)

Le bien du repos, c'est qu'il permet de lire. J'ai donc prévu de lire quelques romans achetés depuis des mois mais que je n'ai jamais réussi à achever. Ainsi, ai-je lu En attendant la montée des eaux, roman de Maryse Condé aux Editions JC Lattès, en 2010. 
1. Une intrigue faite de malheurs.
L'intrigue commence avec la mort de Reinette Ovide accouchant d'une fillette que le Dr Babakar Traoré Jr. recueille et adopte comme sienne. Il l'appelle Anaïs. L'insolite donne lieu à une remontée dans le temps, notamment dans le passé de tous les protagonistes. Reinette était une clandestine haïtienne alors que le médecin est de père malien et de mère guadeloupéenne. Son premier poste de travail était à Eburnea où il a suivi son compagnon d'études, Hassan engagé en politique dans un pays où les tensions entre le Nord et le Sud sont très vives. Eclate soudain dans le pays une guerre civile provoquée par les Nordistes, désormais révoltés contre le sort qui leur est réservé dans la gestion du pays. Dans ces désordres ethniques et religieux, il perd son amour,  A l'issue de cette rebellion, Hassan devient vice-président. Peu de temps après, il occupe le poste de président à la suite de l'assassinat suspect du président titulaire. Ce Malien qui a voué sa vie à accucher des enfants ne saurait supporter ce pays corrompu et saigné à blanc par la rapacité avide de ses dirigeants en collaboration avec les grandes puissantes. Son égérie de mère Thécla Minerve lui suggère en rêve d'émigrer en Guadeloupe, où se présentent de meilleures opportunités pour son travail.
2. Migration et xénophobie.
A son arrivée en Guadeloupe, Babakar monte ou prend la relève d'une infirmerie dans laquelle il exerce sa profession d'accoucheur d'enfants. C'est sa véritable passion. Sa clientèle vient de toutes les couches de la population, même d'immigrés clandestins: Je suis suivi par le médecin Africain", ce qui n'est pas sans rappeler l'exemple de la discrimination relevé par Fr Fanon dans Peau noire, masques blancs..On souligne "médecin africain" au lieu de dire simplement Dr Babakar Traoré. Il se fait des amis dont le C'est dans ces conditions qu'il receuille et adopte Anais. Cependant Movar lui rappelle la promesse faite à Reinette de ramener Anaïs à Haïti. Cette fois, la décision de partir pour Haiti n'est pas du tout appréciée par sa mère Thécla qui y voit une erreur.  
3. Le destin d'Haïti: une malédiction.
Partant à la recherche de Reinette Ovide, il arrive à Port-de-Prince. Il est logé à l'hôtel Au Cèdre du Liban, où Movar fait venir ses soeurs Miriam et Jahira. La recherche des Ovide se réalise dans un contexte politique compliqué et sensible. Jean Ovide ayant été très proche des Duvalier. Il va se retrouver face à une rébellion menée par le roi Chrisotphe II qui tient en maître une partie d'Haïti. Isabelle Ovide, la soeur de Reinette, n'est pas plus coopérante; seule la bonne Tomine lui relate la vie tumultueuse de Reinette. Honteuse ou révoltée contre son père, celle-ci aurait eu l'intention de divuguer tous les documents classés au cours d'une émission "   " en collaboration avec le journaliste ... Voilà que s'annonce une ravageuse tempête tropicale. Il faudrait de nouveau partir vraisemblablement pour... l'Afrique.
4. La boucle est bouclée. Ce n'est pas attesté clairement. Voilà un roman qui reflète à la fois la vie de l'auteur Maryse Boucoulon qui est partie de la Guadeloupe pour l'Afrique via Paris où elle a rencontré  son mari guinéen dont elle garde le nom de Condé jusqu'à ce jour. Le métissage Afrique et Caraîbe y est parfait. Le protagoniste vit comme dans une identité incertaine: ni Africain ni Caribéen, mais les deux à la fois. Hassan, son mentor, tente de lui en donner une, mais échoue à cause de manoeuvres politiques. Le regressus ad uterum (Eliade) guadeloupéen lui porte un bonheur inouï: l'adoption d'Anaïs, sa fille bien aimée, au bonheur de laquelle il consacre sa vie. Par l'action de Traoré, Afrique, Guadeloupe et Haïti collaborent symboliquement dans la défense et la célébration de la vie. Mais ce destin a comme nom Haïti, terre conçue comme maudite par les dieux de la nature et de la civilisation. C'est là qu'il attend la montée des eaux. Rentrera-t-il en Afrique? Qu'arrivera-t-il? Le texte reste ouvert. 

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