22 janv. 2017

La santé chez nous

Plusieurs événements récents m'amènent à dire un mot sur la situation sanitaire chez nous. Dans mon article sur mon propre passage dans un service d'urgence médicale ici à Holetown, j'ai indiqué que la stagiaire qui m'a reçu était formée derrière mon bureau. Une façon d'indiquer sa jeunesse et son inexpérience. Quoique je n'aie fait ce chemin que pour obtenir du voltarène que j'aurais pu toutefois me procurer sans son onéreuse prescription, j'assume qu'elle a rempli son devoir professionnel avec une certaine compétence. A aucun moment je me suis senti mal traité, loin de là. J'ai fini sa cure mais le mal continue. Je vais donc suivre des examens plus approfondis.
Lorsque nous avons appris la mort avant-hier de ma belle-soeur, le problème de la santé dans notre pays m'est remonté à l'esprit. Une opération d'appendicite peut certes causer la mort, mais il faudrait quand même retenir que c'est une opération généralement maîtrisée dans beaucoup de pays avancés. Ce qui n'empêche que des complications puissent survenir. Dans le cas de ma belle-soeur, il est clair qu'elle a été libérée trop tôt de l'hôpital qui n'a même pas attendu qu'elle fasse "les gaz", comme on dit. De l'avoir renvoyée à la maison sans achever le processus du réveil relève d'une négligence criminelle. Malheureusement, il y a beaucoup de tels cas qui se répètent dans nos hôpitaux. De là à invoquer le "kindoki" comme cause du malheur, le pas est vite franchi par certains esprits superstitieux. Je n'invente rien, une amie avec qui j'ai parlé de ce cas a tout de suite évoqué la sorcellerie. Allez-y voir.
Il y a presque une année, mon oncle maternel Ngoy m'a téléphoné pour demander de l'aide afin qu'il puisse se faire opérer d'une hernie. L'opération était prévue pour le mercredi qui suivait, on était vendredi ou samedi de la semaine précédente. Il m'a dit que le médecin passerait au village, opérerait tous les cas, et repartirait pour le village voisin. Je l'ai interrompu: "Dans quelques conditions opère-t-il? Y a-t-il un suivi médical en cas de complication?" Il m'a répondu: "Il est équipé. C'est un médecin qui va de village à village pour des opérations, évitant ainsi aux malades de faire le long et coûteux trajet qui mène à Kenge ou Mosango, Bonga, etc. C'est pour cela qu'il ne faudrait pas que je rate cette occasion. Si j'avais l'argent, il m'aurait opéré il y a deux semaines." Après lui avoir promis de l'aide, l'idée m'est venue de l'envoyer se faire soigner plutôt à Kinshasa. J'ai demandé à son cousin Noko Célio de le convaincre et de faciliter le déplacement. Une fois à Kinshasa, les examens radiographiques n'ont révélé aucune trace de hernie. Les médecins se sont contentés de lui prescrire des anti-inflammatoires et des calmants. Voilà quelqu'un qu'un charlatan de médecin aurait cruellement "charcuté" sur son autel du crime pour une maladie qu'il n'avait pas. 
Les médecins - en général des infirmiers qui ont longtemps assisté des chirurgiens au cours des opérations - sont nombreux qui sillonnent des villages reculés pour se faire de l'argent au mépris de la déontologie médicale. Profession: médecin ambulant. On m'a donné le nom d'un que je connais. Un parent par ailleurs. Des villageois, non suivis par les instances médicales officielles, sont les victimes privilégiées de ces charognards sans vergogne. Les zones médicales sont trop centralisées et peu équipées en staff et matériels pour couvrir tous les coins du pays. Et la situation sanitaire est de ce fait catastrophique. Des milliers de nos frères et soeurs compatriotes meurent de suite soit du manque de traitements, soit du manque de médicaments, soit de la voracité cupide d'infirmiers ou médecins inciviques et incompétents. Un vétérinaire devient vite médecin humain dans nos contrées. Si dans les villes règne encore, malgré l'existence de grands centres hospitaliers modernes, une précarité médicale, imaginez combien nos villages les plus reculés sont abandonnés à eux-mêmes. Quelque chose doit être fait, car la vie est sacrée. La vie de chaque citoyen est sacrée. Les autorités ont le devoir de contrôler tous les praticiens de la médecine, d'équiper la santé de ressources humaines et matérielles adéquates et suffisantes. Il en va de la vie de la population. Pour moi, la santé doit être gratuite pour tous.

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