23 avr. 2021

Etre président de république

23 avril 2021. En 60 ans d'indépendances africaines, nous avons vu toutes sortes de présidents. Des bons, mais surtout des mauvais. Aujourd'hui on enterre à N'Djamena le président du Tchad, le Maréchal Idriss Déby Itno pourtant réélu ce 11 avril pour un énième mandat après 30 ans de règne sans partage. Le président Emmanuel Macron y est présent, aux côtés des présidents congolais, malien, guinéen, nigérian, burkinabé, etc. L'occasion est propice pour réfléchir sur les présidents des républiques africaines.

Après 60 l'Afrique s'est illustrée par des coups d'état détrônant des présidents élus dans la foulée des indépendances. Certains ont été tués, d'autres détrônés et assignés à résidence dans leur localité d'origine. D'autres ont pris le chemin de l'exil. Le Tchad a toujours eu un régime fort à sa tête. En commençant par François Tombalbaye que j'ai eu, enfant, l'occasion de voir en juillet 66 paradant sur le boulevard Kasavubu aux côtés de Mobutu. Il a été tué en 75, lui et sa famille. Suivi de Félix Maloum Goukouni Wedeye, Hissen Habré qui croupit en exil dans une prison de Dakar, dont j'ai vu l'entrée en 19. Son successeur Idriss Déby est mort au front il y a une semaine, tentant de repousser une rébellion venue de Libye. Une ère nouvelle s'ouvre avec le propre fils du défunt. La chaîne du pouvoir se fait et se défait au rythme des rébellions ethniques pour la plupart. 

Néo-colonialisme. Le président français est venu rendre hommage à un ami de la France, soldat mort au front armes à la main. Ce geste montre toute l'ampleur du néo-colonialisme. A l'époque Mongo Beti avait sorti l'expression des "dictatures francophiles". La France continue de soutenir des dictateurs, regrettant la "perte d'un ami courageux", s'assurant que la transition aille dans le sens des intérêts françafricains. Cet empressement à ne jamais rater de telles occasions montre à quel point le néo-colonialisme se réveille des cendres africaines. 

Présidents à vie, présidents morts au front. La péréquation est là: ou bien on le reste à vie ou bien ça pète. L'intention de beaucoup est de tripatouiller les constitutions ou les résultats des urnes pour s'assurer une présidence à vie. Lansana Conté comme Robert Mugabe n'ont jamais eu l'intention de quitter le pouvoir. Sassou-Ngouessou, Biya, Kagame, Bongo, Guelleh, Ouatara, et d'autres ont encore de longues années de règne devant eux alors qu'ils s'y trouvent depuis plus de dix ans. D'autres dont on vante le mérite d'avoir assuré une passation pacifique de pouvoirs ne l'ont fait qu'à contre-cœur, forcés par les pressions tenaces des citoyens comme de la communauté internationale. On peut les classer en deux catégories: les jouisseurs et les militaires. Les jouisseurs savourent du champagne au mépris de la pauvreté qu'endurent leurs concitoyens. Les militaires s'assoient de force sur le pouvoir et imposent une discipline intransigeante.    

Nous en avons des présidents. Des bouffons comme des théoriciens. Des charlatans  comme des tragiques. Des patriotes comme des traîtres. Des intellectuels comme des tueurs. Des voleurs sans vergogne comme des héros épiques. Des maréchaux comme des empereurs. La liste est interminable. Tous étaient ou sont encore présidents. Vive les républiques bananières!

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