20 avr. 2021

Plénière du parlement du Kwango

20 avril 2021. Je suis tombé par hasard sur la plénière de l'Assemblée Provinciale du Kwango en direct à Kenge. Tout a commencé par une question orale de l'honorable Socrates Kangulumba. A la barre le ministre des finances Tite Mund qui devait justifier entre autres la gestion calamiteuse de la DGRKWA, du FSK et de diverses sources de recettes de la province. Tous les députés sont revenus sur le même problème. Pour toute réponse, le ministre a demandé qu'on lui accorde 48 heures pour formuler ses réponses. Ce que j'ai remarqué, avec tout le respect que je dois à ces honorables députés dont je connais certains, m'a touché. Tous ou presque avaient le turban "Député National" en bandoulière. Bel apparat, et beau décor. Les élus provinciaux étaient très solennels, impressionnants dans leur tenue comme dans leur comportement. En face d'eux un ministre du gouvernement provincial, lui aussi sapé de blanc avec un nœud-papillon noir. Je n'ai pas suivi les premiers intervenants mais j'ai attentivement écouté l'intervention du ministre des finances: "Nous devons reconnaître que la province (du Kwango) éprouve des difficultés d'ordre structurel et conjoncturel." (sic).

Langage. Je suis toujours surpris par la pompe langagière pratiquée chez nous. C'est plein d'Excellences et d'Honorables. On aime les titres gonflants et vides de sens. Un langage que même les Français propriétaires de la langue ne pratiquent plus. La langue de Molière est fréquemment massacrée dans la diction comme dans la syntaxe, certains déchiffrant difficilement leurs propres textes dans des cahiers genre cahiers de brouillon. Et le public les hue à chaque erreur de prononciation. Ce qui a par ailleurs énervé plus d'un. Je me suis même demandé si certains n'auraient pas mieux fait d'intervenir en kikongo ou lingala. Un député a eu le courage de glisser des phrases en lingala alors qu'il est de bonne formation. Un autre a corrigé la question orale en étendant la période du contrôle au delà de décembre 2020, période pendant laquelle le père de l'Honorable interrogateur a exercé la fonction de gouverneur a.i. du Kwango. On aura tout vu. Mes respects!

Leçon. L'ambiance de cette assemblée provinciale donne sans aucun doute une idée du fonctionnement général des instituions de notre pays. Le culte des titres majestueux. Si vous écrivez à Son Excellence le Président de la République, vous devez ajouter en exergue une expression du genre "avec toute ma déférence". Un système protocolaire médiéval complètement anachronique. En fait, l'autorité est déifiée à tous les niveaux. "Honorables membres du bureau, honorables députés"... En France citoyenne, tout le monde est appelé "Monsieur ou Madame". Cette pratique constitue une marque d'obséquiosité qui fait de nous d'éternels "servants" ou "thuriféraires" voués à chanter la gloire du chef. Je ne serai sans doute pas au prochain rendez-vous vu que j'ai déjà une claire idée de comment "nous sommes dirigés et gérés". Pour le littéraire que je suis, c'est une illustration des comédies classiques de Molière ou de La tragédie du roi Christophe d'Aimé Césaire.      


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