Depuis quelques semaines, je réfléchis sur ce que je peux apporter comme contribution à une conférence sur la pauvreté. Au début, je pensais que n'étant pas économiste, c'était une mission impossible. C'est en partie vrai. J'estime toutefois que le phénomène "pauvreté" est beaucoup plus complexe et ne saurait se limiter au seul domaine économique. Pauvreté pécuniaire ou financière, pauvreté mentale, pauvreté spirituelle, autant de termes couvrant une panoplie de domaines. La pauvreté dont il est question ici est plutôt d'ordre social et touche tous les pays du monde. Avant d'en parler dans les détails, il conviendrait de la définir et éventuellement d'élaborer, à partir de ce qui se sait, une sorte de typologie personnelle. J'ouvre donc une série de réflexions qui vont m'amener à déterminer d'ici-là mon sujet de présentation. Je vous informerai de la suite, car pour un littéraire les outils d'analyse sont assez limités.
1. Pays pauvres et pays développés. Le monde est divisé en pays riches (Nord) et pays pauvres (Sud), tout comme la société en classes aisées et classes démunies. Les nantis possèdent tout tandis que les pauvres n'ont presque rien. Donc la pauvreté est un seuil de division du monde et de la société. En terme de pouvoir, elle représente le prolétariat, les misérables, les moins que rien. Le pays développés réussissent le test des attributions liées à ce statut: abondance de biens, argent, luxe, facilité, aisance, santé, nourriture, longévité, etc. Les pays dits pauvres sont appelés par euphémisme pays en voie de développement. En réalité, ils n'atteindront jamais le seuil du développement tel que défini par les détenteurs du pouvoir et de l'argent. Pour se défendre contre l'hégémonie "coloniale" ou l'impérialisme occidental, ils se sont eux-mêmes appelés "pays non alignés" à la suite de la conférence de Bandoung.
2. Le seuil de pauvreté. Il y a en Afrique, en Asie et en Amérique Latine des ménages qui vivent avec moins d'un dollar américain par jour tandis que d'autres dépensent sans compter. Ils vivent, dit-on, en dessous du seuil de pauvreté qui est de 2 UDS. Me revient à l'esprit l'image de Michael Jackson faisant son shopping dans un magasin exclusif. "I like this", répétait-il sans même discuter le prix. Ce décallage est simplement scandaleux dans un monde où les richesses sont distribuées de façon inégale. Les riches s'enrichissent, et les pauvres n'ont aucun espoir de s'en sortir à moins de recourir à des moyens malhonnêtes ou violents. L'ordre économique en vigueur n'offre pas d'issue aux plus démunis sacrifiés sur l'autel du capitalisme. Des mouvements de diverses tendances luttent et s'activent à relever le pouvoir d'achat de tous les hommes à un niveau plus élevé. Ce voeu demeurera pieux tant que des mesures ne seront pas prises à l'échelle mondiale, tant que des efforts ne seront entrepris pour que la majorité de l'humanité accède à l'éducation, à l'eau et à l'électricité, à la santé et au minimum vital, signes fondamentaux d'une vie décente. Il en va de l'équilibre économique universel.
3. L'éradication de la pauvreté. Voilà un défi qui exige l'engagement de toutes les forces actives du monde. Depuis une décennie, à chaque réunion du G8 fait pendant une rencontre des tiers-mondistes. Dans ce contexte est sortie l'expression: les pays émergeants. La Chine, le Brésil, le Mexique, l'Afrique du Sud sont classés dans cette catégorie qui comporte des connotations davantage politiques que réellement économiques. Pour avoir réuni les conditions d'une amélioration de conditions sociales, ces pays constituent un marché susceptible de concurrencer, voire de dépasser les tenants de la haute finance qui dirige le monde. La voix leur est de plus en plus accordée lors des grands sommets. Malheureusement, cette mouvance ne se traduit pas encore dans la réalité sociale des pays du Tiers-Monde, terme inadéquat mais dont l'existence est plus qu'évidente.
5. La littérature et la pauvreté. Y a-t-il un lien entre la littérature et la pauvreté? Oui. La littérature parle-t-elle de la pauvreté? Oui. Comment est-elle exposée? Beh simplement à travers des personnages, des scénarios et des récits qui évoquent ce thème. Dans le passé, des auteurs recouraient à la littérature pour dénoncer les fléaux sociaux de leur temps. D'autres comme Clément Marot s'en sont servi pour inspirer la générosité de leurs nantis mécène, pour s'adresser directement aux tenants du pouvoir politique. Balzac, Hugo, Zola en ont fait le point de mire de leur combat social. Les cas sont nombreux. Sans parler de la littérature francophone d'Afrique et de la Caraïbe avec Roumain, Césaire, Mongo Beti, Oyono, Ousmane Sembene, etc. qui ont épinglé la pauvreté avec une surprenante perspicacité. Il existe donc en littérature un champ immense pour l'exploration de la pauvreté. Le plus intéressant serait d'examiner les solutions ou les voies d'issue qu'elle propose.