7 avr. 2015

425 corps dans une fosse commune à Maluku?

Il s'est ouvert un houleux débat en RDC depuis la découverte cette semaine à Maluku, près de Kinshasa, d'une fosse commune dans laquelle ont été inhumés nuitamment des centaines de cadavres. Des voix passionnées s'élèvent dans tous les sens pour condamner cette pratique très bizarre et réclamer la vérité. Le pouvoir comme l'opposition s'en mêlent pour en faire une affaire politique. Dans tout ce débat, l'absent c'est le petit peuple, la population. Une véritable épreuve de forces!
On parle d'un ordre venu de l'Hôtel de ville pour inhumer des cadavres abandonnés à l'hôpital central par les leurs. Selon la version officielle, le pouvoir a l'habitude d'enterrer dans le respect des personnes décédées dont les proches parents ne se manifestent pas. Cela justifie l'usage d'une fosse commune? Les fosses communes sont souvent considérées comme la conséquence de tueries brutales de grande envergure dont les responsables tiennent à effacer les moindres traces. Clémentine Anwarite comme Thomas Sankara ont été enterrés dans des fosses communes. Dans le cas des cadavres de Maluku, rien n'a filtré à propos de leurs identités avant la découverte de la fosse. Seuls les initiés étaient au courant comme M. Pobard dans Ces fruits si doux de l'arbre à pain de Tchicaya U Tam'si. Mais il ne s'agit pas de fiction ici.
L'opposition politique et la population demandent des explications au gouvernement et aux services de sécurité. Elles exigent simplement la vérité. Qui sont ces morts? Comment sont-ils morts? Sont-ils morts de maladies, d'accidents, d'assassinats ou de suicide? Pourquoi ont-ils été inhumés là plutôt qu'ailleurs? Pourquoi leurs familles n'ont pas été sensibilisées ni alertées pour assurer un enterrement décent et digne à leur(s) proche(s)? Pourquoi n'y a-t-il pas une liste des noms simplement? Qui a décidé cette action? Autant de questions sans réponses claires. Les soupçons vont dans tous les sens. Les autorités, surprises par l'ampleur de l'événement dont ils ont peut-être minimisé les conséquences, en sont maintenant à repenser leur stratégie. Elles sont partagées entre exhumer les corps et/ou les laisser intacts. Parmi les explications éventuelles, j'imagine que d'autres, guidés par leur intuition, parlent de meurtres sacrificiels pour voiler un terrorisme d'état qui ne dit pas son nom. Ceci me ramène à des réflexions faites précédemment à propos de dernières tragédies.
Un avion allemand s'écrase dans les Alpes Françaises avec 150 personnes à bord. Tous les efforts sont menés par la police française et les services de la Lufthansa  pour identifier les cadavres dont pourtant les noms étaient inscrits dans le manifeste. Un devoir de vérité et de transparence oblige toutes les instances à élucider l'accident dans son entièreté. Quoique les boites noires aient conclu à un accident délibéré du copilote Lubitz, les parents des défunts ont eu droit à un accompagnement psychologique, à un soutien religieux, à des égards très particuliers. La compagnie aérienne s'est engagée à dédommager les sinistrés. L'école des étudiants morts dans ce crash a entrepris un travail collectif de deuil. Autant d'actions menées de la part des autorités, des institutions et de la compagnie pour assurer le plus d'assistance aux personnes touchées ou endeuillées par cet accident. 
Dans le cas de Maluku, tout est différent. Obscurantisme total. On a plutôt à faire à des morts anonymes, inconnus ou méconnus, ignorés, devenus objets de discussions et de polémiques politiques. Là réside la différence d'approche et de leadership avec les contreparties européennes. On parle de dépouilles d'indigents longtemps gardées à Mama Yemo. Le sens d'humanité et de respect envers les morts semble avoir été le dernier souci des décideurs. Doit-on attribuer cet embrouillement à un flagrant degré de sous-développement ou à un manque de structures logistiques? Que 425 morts soient enterrés dans l'anonymat total ne surprend, ne scandalise au plus haut point que les non-initiés. Les gens qui en savent quelque chose se trouvent liés par le secret professionnel. Des jours passeront, des semaines passeront certainement sans que la vérité au sujet de ces morts ne soit élucidée. Attendons donc voir!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire